Un camp d’internement a été ouvert pendant la Seconde Guerre mondiale près du village de Fossoli. Créé par l’armée italienne en 1942, il servait de prison pour les soldats alliés, principalement britanniques.
Suite à l’occupation allemande du pays et avec la participation de soldats locaux, les prisonniers furent déportés vers des camps de concentration. En quelques semaines, près de 1000 juifs y furent emprisonnés. En tout, 5000 prisonniers furent conséquemment déportés dont la moitié de juifs.
De sa libération jusqu’au années 1960, le camp de Fossoli servit de lieu d’accueil pour réfugiés, étrangers ou Italiens fuyant les villes limitrophes dirigées par le régime de Tito.
Dans les années 1980 et 1990, le camp fut transformé en lieu de mémoire et en centre d’études dédié à Primo Levi, qui fut emprisonné dans ce camp et déporté.
Comme dans de nombreuses villes de la région, la présence juive se développa à la fin du Moyen-Age.
Leur présence dans les milieux commerciaux et culturels connut un essor relatif selon la politique appliquée à leur égard par les autorités politiques et religieuses.
Lorsque la ville de Cento, ainsi que l’ensemble du Duché de Ferrara, passa sous juridiction papale, les juifs durent s’installer dans un ghetto, qui se forma principalement au centre-ville dans les années 1630. Au niveau des rues Via Provenzali et Via Malagodi, où vécurent une centaine de juifs.
Une synagogue exista déjà avant l’instauration du ghetto et fut restaurée au 19e siècle. D’autres lieux d’études juives s’établirent au 17e siècle. Les activités professionnelles principales des juifs de Cento étaient différents types d’artisanats, le commerce et la banque.
Parmi les personnalités originaires de la ville, il semble que la famille de l’illustre premier ministre britannique Benjamin Disraeli en fasse partie. Le sociologue Leone Carpi fut un citoyen de la ville au 19e siècle.
Si la communauté juive ne s’est pas relevée après-guerre, depuis une vingtaine d’années le ghetto de Cento a été restauré grâce aux efforts de la ville, permettant de redécouvrir les traces du patrimoine culturel juif de la ville. L’arc de la synagogue a été transféré dans la ville israélienne de Netanya en 1954.
Cette petite île se situant au sud de la Sardaigne possède des catacombes datant de l’époque romaine.
Parmi elles, certaines présentent des inscriptions hébraïques, ou plutôt en judéo-latin, une langue menacée de disparition.
Les inscriptions présentes dans ces catacombes semblent dater du 4e ou 5e siècle. Elles sont aujourd’hui accessibles aux visiteurs.
Lors de la conquête de la Sardaigne par Pierre IV d’Aragon au 14e siècle, des juifs faisaient partie du contingent de soldats.
Suite à la conquête, certains s’y installèrent, rejoints en 1370 par des familles juives de Catalogne et de France.
Néanmoins la présence juive en Sardaigne semble dater d’au moins deux milles ans.
Une synagogue fut construite à Alghero en 1381. Et un cimetière juif quatre ans plus tard.
Ils participèrent au développement économique et géographique de la ville, en finançant notamment ses fortifications.
Les bonnes relations entre la communauté et les régents d’Aragon permirent aux juifs de ne pas subir les discriminations courantes de cette époque.
Néanmoins, suite à l’application des mesures de l’Inquisition à la fin du 15e siècle, leur situation se détériora rapidement et ils furent expulsés ou forcés de se convertir en 1492.
En 2013, le maire de la ville présenta au nom de celle-ci des excuses à la communauté juive pour le sort infligé pendant l’Inquisition et les invitant à revenir sur l’île. A cette occasion fut inauguré une Place des juifs à l’endroit où se situait l’ancienne synagogue.
La présence juive dans cette ville du centre de l’Italie semble dater de la fin du 13e siècle.
Durant le siècle suivant, ils y jouirent de droits de citoyens égaux et la communauté prospéra.
Néanmoins, lors des siècles suivants, selon l’attitude des différents régents politiques et religieux, cette situation fut plus compliquée.
Il y avait encore quelques familles juives à la fin du 16e siècle, parmi eux de célèbres médecins.
L’église St Gregorio della Sinagoga commémore encore cette ancienne présence.
L’auteur Israel Horovitz y connu un de ses premiers succès internationaux en y présentant en 1968 la pièce « l’Indien cherche le Bronx », avec deux comédiens d’origine italienne qu’il révéla d’abord sur les planches new-yorkaises, Al Pacino et John Cazale.
Ceux qui incarneront quatre ans plus tard Michael et Fredo Corleone dans Le Parrain !
Horovitz retourna à Spoleto pour remercier la ville et participer à un festival en 2009, y présentant des pièces sur le racisme et les tensions moyen-orientales.
Une loi locale datant de 1279 ordonnant l’expulsion des juifs de la ville atteste par là même de leur présence en ce siècle à Pérouse.
Un manuscrit écrit en hébreu du 1414 a été retrouvé, illustré par l’artiste local Matteo di Ser Cambio. Aux 15e et 16e siècles, les juifs furent expulsés puis accueillis à nouveau, à plusieurs reprises.
Un des lieux de la ville qui attira leur venue fut l’Université de Pérouse où ils purent étudier, certains devenant d’illustres médecins.
Récemment, des images cinématographiques de 1923 ont été retrouvées, présentant la vie de deux familles juives de Pérouse.
On y voit notamment un mariage. Ils s’agit probablement des plus anciennes images tournées en Italie attestant de la vie juive.
Ce film de 9 minutes a été projeté à Rome et surtout restauré et digitalisé par des institutions étatiques.
Le film original a été donné au Centre de Documentation Juif de Milan (CJDCF).
Des documents administratifs attestant de la présence juive depuis au moins le 16e siècle. Des textes faisant référence à des banquiers et médecins juifs travaillant dans la ville.
Au fil du temps, ces professions se diversifièrent, notamment dans l’agriculture, la culture de vers à soie et l’artisanat. Une synagogue fut inaugurée en 1731. Et quatre ans plus tard, la communauté juive acheta un terrain pour y placer un cimetière .
Parmi les personnalités de San Daniele, la longue lignée des Luzzatto, originaires de Venise en 1600 et dont les membres de la famille s’illustreront le long des siècles dans différents domaines. Parmi eux, Letizia Luzzatto, les poètes Ephraïm et Isaac Luzzatto.
Suite à l’expulsion de ce territoire vénitien, en 1777, la ville ne comptant pas de ghetto, la présence juive y fut interdite. Au début du 20e siècle une petite communauté juive se reconstitua à San Daniele.
La ville fit partie de l’empire austro-hongrois jusqu’à la fin de la Première Guerre mondiale, mais très imprégnée par la culture italienne voisine.
Si la présence juive date probablement du 13e siècle, la reconnaissance de celle-ci ne fut concrétisée par les autorités locales qu’au 16e.
En 1696, un ghetto fut érigé dans la ville. Lors du siècle suivant, les juifs furent autorisés à pratiquer différentes activités commerciales, comme la manufacture de la soie et de la cire, notamment par une branche de la grande famille italienne Morpurgo qui rencontra un grand succès.
Une synagogue fut érigée en 1756 sur la Via Ascoli. Suite à des expulsions de villages vénitiens et l’acquisition de droits en terre autrichienne à la fin du 18e siècle, la population juive de Gorizia totalisa 270 personnes en 1788. Un chiffre stable, qui augmenta graduellement à la fin du 19e siècle, atteignant près de 900 personnes.
Le régime mussolinien et les lois raciales appliquées provoquèrent le départ de nombreux juifs, qui ne constituaient que 183 personnes en 1938.
Suite à l’invasion allemande de 1943, 47 juifs furent déportés, dont 2 seulement survécurent.
La très faible présence juive après-guerre encouragea le rattachement de ceux-ci pour la célébration des fêtes à la communauté de Trieste.
Lors de la séparation de la ville entre l’Italie et la Yougoslavie après-guerre, le cimetière juif est resté du côté yougoslave. Un nouveau cimetière juif est présent à Gorizia.
La présence juive dans cette ville est attestée depuis, au moins, le 1e siècle avant Jésus-Christ sur l’épitaphe concernant un de ses habitants.
Des fouilles archéologiques effectuées dans la région ont permis de retrouver les traces de caractères hébraïques dans des immeubles, principalement des églises.
Mais ces caractères figurant dans de nombreuses églises, il n’a pas pu être établi s’il s’agissait précédemment d’une synagogue ou pas.
Une stèle a été retrouvée datant de 1140 avec des inscriptions hébraïques, et dans ce cas présent, contrairement aux doutes concernant les édifices, il s’agit bien d’une tombe juive.
Parmi les personnages originaires de Aquileia, à noter la famille du poète David ben Mordechaï Aboulafia.
La présence juive génoise semble dater du 6e siècle au moins, lorsque Théodoric autorisa la communauté à y rénover une synagogue, qui fut détruite lors d’actions de locaux hostiles.
Cette présence fut très limitée au Moyen Age, Benjamin de Tudèle y nota seulement celle de deux juifs, teinturiers originaires d’Afrique du Nord.
Dans le tournant de l’Inquisition espagnole, les juifs furent autorisés à s’installer à Gênes et expulsés à plusieurs reprises le long du 16e siècle.
Il en fut de même pour leur obligation de vivre dans un ghetto, parfois appliquée de manière vigoureuse, parfois souple.
En 1516, la première bible en plusieurs langues fut publiée à Gênes, mêlant hébreu, grec, latin, araméen et arabe. Il y fut mentionné des notes de bas de page sur Christophe Colomb. Son fils se plaignit auprès des autorités de la description de son père. Celles-ci ordonnèrent que les 2000 livres imprimés soient détruits. Quelques exemplaires survécurent à ce décret. Un de ceux-ci fut d’ailleurs vendu aux enchères à New York en 2017.
Si la population juive génoise ne fut que de 70 en 1763, l’égalité en droit accordée en 1848, permit à cette population d’augmentée et de représenter en ces années près de mille personnes.
Une nouvelle synagogue est inaugurée en 1935 pour les 2500 juifs génois. Comme dans le reste de l’Italie, ils seront victimes des lois raciales de 1938. Suite à cette application et avant l’occupation allemande de la ville en 1943, de nombreux juifs réussissent à fuir. 238 juifs sont déportés, parmi lesquels seuls 10 survivront.
A la fin du 19e siècle, un nouveau cimetière juif fut utilisé par la communauté et les tombes situées dans l’ancien transférées en ce lieu.
Si la présence de juifs vésuliens est attestée depuis le 13e siècle, une communauté s’y forma notamment grâce à la synagogue située sur la Grande-Rue. Une quinzaine de familles juives habitaient la ville.
Si contrairement à d’autres communautés de la région les juifs vésuliens n’étaient pas particulièrement connus pour leurs yeshivot, certaines personnalités jouèrent un rôle historique, à l’image de la famille de banquiers Héliot ou bien Manessier de Vesoul qui prit part aux discussions concernant le retour des juifs en France en 1359. Les juifs furent régulièrement accusés d’empoisonnement, selon une propagation de rumeurs antisémites fréquente à l’époque.
Une petite communauté juive vit le jour à nouveau suite à la vague d’émancipation provoquée par la Révolution française, renforcée suite à l’arrivée d’Alsaciens après la guerre de 1870. Parmi eux, les grands rabbins Isaac Lévy et Moïse Schuhl.
On y trouve aujourd’hui une synagogue datant de 1875 ainsi qu’un cimetière juif aménagé au 19e siècle. Pendant la Seconde Guerre mondiale, 107 juifs sont déportés de Haute-Saône. Le maire René Weil est contraint de démissionner en 1940 et retrouvera son poste à la Libération de 1944. Raymond Aubrac, célèbre résistant, est né en 1914 dans une famille juive de Vesoul. Des juifs vésuliens reconstruisirent la communauté après-guerre, mais la synagogue est désaffectée.
La présence de juifs mâconnais est attestée depuis 820 lors de pression contre les juifs pour se convertir. Mais leur présence date au moins du 6e siècle.
Une bonne partie de ceux-ci étaient alors vignerons. Un quartier juif fut situé à Bourgneuf. Le Musée des Ursulines de Mâcon possède des pierres tombales juives médiévales.
Suite à l’expulsion des juifs en 1394, une petite communauté pu enfin s’y reconstruire suite à l’émancipation accordée par la Révolution française.
A la veille de la Seconde Guerre mondiale il n’y avait qu’une cinquantaine de familles juives mâconnaises. Une synagogue a été aménagée en 1962, pour une communauté grandissante suite à l’arrivée de juifs d’Afrique du Nord lors de cette décennie.
Si l’origine de la présence des juifs jovigniens n’est pas certaine, sa présence médiévale est notamment remarquée par le nombre de tossafistes qui vivent dans la ville au 12e siècle.
Parmi eux, Menahem Perez de Joigny et Yom Tov Ben Isaac de Joigny. Suivront d’autres éminents érudits, avant l’expulsion du 14e siècle.
L’émancipation des juifs de France grâce à la Révolution française ne fera pas revenir beaucoup de juifs dans la ville. Ainsi, Joigny recense 10 juifs en 1841. La rue des Juifs est le seul vestige de cette riche époque culturelle médiévale.
Les premières traces documentées de la présence de juifs dijonnais datent de la fin du 12e siècle.
Ils vivaient principalement rue de la Petite-Juiverie, actuellement nommée rue Piron , rue des Juifs, l’actuelle rue Buffon et rue de la Grande-Juiverie, l’actuelle rue Charrue . La synagogue se trouvait dans la première de ces rues. Un cimetière juif était situé dans l’actuelle rue Berlier. Une cinquantaine de pierre tumulaires juives y ont été découvertes entre 1885 et 1900.
Il y avait au Moyen-Age de célèbres médecins juifs, parmi lesquels Salomon de Baûme et Elie Sabbat. Le 14e siècle vis une série d’expulsions et de réintégration, comme dans d’autres villes de France, pour finir par une expulsion en 1394.
L’émancipation accordée par la Révolution française permit aux juifs de revenir sur ces terres, une immense majorité de juifs d’origine alsacienne. La population juive passe ainsi de 50 familles au tournant du 19e siècle à 400 individus au début du 20e.
La synagogue actuelle de style néo-byzantin, a été construite par l’architecte Alfred Sirodot pendant les années 1870, remplaçant celle devenue trop petite de la rue des Champs.
Une grande partie des 376 juifs dijonnais recensés en 1941 et des résistants de la ville sont victimes de la Shoah. Parmi eux, le rabbin Elie Cyper, prisonnier de guerre en 1939 qui s’évada et rejoignit la Résistance, capitaine de FFI notamment à Périgueux, qui sera déporté et assassiné en Lituanie en 1944. Une aide de la population dijonnaise et des réseaux de passeurs permit à la moitié des juifs dijonnais de fuir vers le sud.
Au lendemain de la guerre, la communauté se reconstruit notamment grâce à l’arrivée de juifs d’Afrique du Nord et d’Alsace.
La présence de juifs chalonnais date au moins du 9e siècle selon des documents de l’époque liés à des conversions forcées. Certains datant du 12e évoquent le métier de vigneron exercé notamment par des juifs de Chalon.
La communauté juive avait un cimetière situé sur l’actuelle rue des Places et un mikvé à Saint-Jean-des-Vignes. La rue des Juifs se trouvait sur l’actuelle Grand’rue. Le talmudiste Eliezer ben Yehouda y vécut au 11e siècle.
Suite aux expulsions du 14e siècle, des juifs chalonnais furent autorisés à s’y réinstaller, jusqu’à l’expulsion de 1394. L’émancipation octroyée par la Révolution française permit aux juifs de revenir à Chalon-sur-Saône comme dans d’autres communes de France et la communauté y fut officiellement établie en 1871, grâce notamment à l’arrivée de juifs d’Alsace-Lorraine. La synagogue a été inaugurée en 1882. Depuis la fin des années 1960 une centaine de juifs chalonnais habitent dans la ville et ses environs.
La présence juive bisontine semble dater du premier siècle, du moins elle est attestée à l’époque par des documents officiels.
Le quartier juif était historiquement autour de la boucle du Doubs. La rue Juive se situait sur l’actuelle rue Richebourg . Le cimetière juif était quant à lui situé en face de la Porte de Charmont. Les juifs bisontins furent expulsés au 15e siècle. Ils furent autorisés à y parvenir de manière très parcimonieuse.
Suite à l’émancipation des juifs par la Révolution française, la communauté juive bisontine s’y établit à nouveau. Une vingtaine de familles la constituent en 1807.
La synagogue actuelle, de style mauresque selon l’architecte Pierre Marnotte, a été inaugurée en 1869. Elle succède à une autre synagogue construite rue de la Madeleine, dans le quartier de Battant en 1831, devenue trop petite pour accueillir les fidèles.
La venue de juifs d’Alsace-Lorraine suite à la guerre de 1870 permit un accroissement de la communauté. 763 juifs bisontins sont recensés par le Consistoire en 1897. 20 soldats juifs bisontins meurent les armes à la main pendant la Première Guerre mondiale comme le rappelle un monument située à l’entrée du cimetière juif de la ville.
Si 170 familles juives bisontines habitaient dans la ville au début du 20e siècle, grâce notamment à l’arrivée de réfugiés des révolutions russes et de la montée de l’antisémitisme en Allemagne, la Shoah fit de nombreuses victimes à Besançon.
La communauté retrouva un deuxième souffle avec l’arrivée de juifs d’Afrique du Nord dans les années 1960. Le Centre Jérôme Cahen (nommé en hommage à l’ancien rabbin de la ville) a été ouvert dans les années 1970 et organise de nombreux événements liés à la culture juive.
La ville porte le nom de Bagnos (« petit bain ») qui sera complété en Baigneux-les-Juifs suite à la venue de nombreux juifs dans cette nouvelle agglomération.
La présence juive semble dater du 13e siècle. La synagogue médiévale était située rue Vergier-au-Duc .
Néanmoins, à la fin du Moyen Age, comme dans de nombreux autres lieux en France à l’époque, les juifs furent expulsés de la ville.
La présence des juifs auxerrois dans la capitale de l’Yonne est attestée grâce à une lettre de Rachi adressée aux talmudistes de la région.
Un des quartiers juifs se situait près de la Porte Féchelle. L’ancienne rue du Puits des Juifs est l’actuelle rue du Pont .
Une pierre d’un mur de la Tour de l’Horloge contient une inscription hébraïque.
Les juifs furent expulsés de la ville à plusieurs reprises entre 1184 et 1393.
Les juifs auxerrois feront à nouveau partie de la ville avec le vent d’émancipation de la Révolution française. Néanmoins, il n’y avait que 70 juifs à la veille de la Seconde Guerre mondiale.
De nombreuses traces épigraphiques permettent d’attester la présence de juifs à Pompéi avant la destruction de la ville par l’éruption volcanique du Vésuve en 79. Ils vivaient également dans les villes proches de Herculanum et Stabia.
Des noms de personnalités juives ont été retrouvées tels Fabius Eupor et Youdaikos. L’historien Flavius Joseph mentionne qu’un descendant du roi Hérode serait mort pendant l’éruption.
Dans les ruines de Pompéi a été retrouvée une maison surnommée par les archéologues « Casa degli ebrei ».
Elle se trouve en ce lieu : N.6, Reg. VIII, Ins. 6. Des peintures murales évoquent le Jugement du Roi Salomon. Néanmoins, l’œuvre étant un peu caricaturale par rapport au sujet, des doutes subsistent sur l’origine de l’œuvre et l’appartenance de la maison. On retrouve également une inscription « Sodom Gomor » sur des ruines situées à N. 26, Reg. IX, Ins. I. D’autres dessins tels une étoile à cinq branche a été retrouvée.
Toutes ces œuvres ne constituent pas des preuves et stimulent de nombreux débats entre historiens. La mise en valeur touristique du patrimoine culturel juif sur le site est donc à prendre avec des pincettes, les débats au sujet de son authenticité étant loin d’être résolus.
La présence juive à Capoue semble dater de la fin de l’Empire romain.
Les ancêtres du poète liturgique Ahimaatz ben Paltiel vécurent dans cette ville, occupant des rôles important dans la gestion financière de Capoue. Selon Benjamin de Tudèle qui y passa, 300 juifs y vivaient au milieu du 12e siècle.
Entre cette période et le 15e siècle, les juifs y pratiquèrent d’autres métiers tels que la teinture et la médecine. Malgré une relative liberté, ils subirent également des conversions forcées.
La ville accueillit des réfugiés de l’Inquisition espagnole au tournant du 16e siècle, mais la communauté de Capoue fut obligée elle aussi de quitter la ville quelques années plus tard.
En 1946, des soldats israéliens membres de la Brigade juive servant sous le drapeau britannique pendant la Seconde Guerre mondiale furent stationnées dans la ville en attendant de pouvoir rentrer.
Une Haggadah de Pessah spécialement écrite pour l’occasion fut retrouvée. Ils prirent part à l’aide aux réfugiés de la Shoah et à la traque de Nazis. La Haggadah fut présentée parmi d’autres de cette époque lors d’une exposition à la Bibliothèque nationale d’Israël en 2018.
Il semble que la présence juive à Benevento date au moins du 5e siècle. Une yeshiva y a été établie au 11e siècle par Hananeel ben Paltiel, membre de la famille du poète liturgique Ahimaatz ben Paltiel.
Benjamin de Tudèle y nota la présence de 200 familles juives. Lesquelles ne subirent pas les mêmes expulsions du Royaume de Naples que les autres communautés, étant sous protection papale.
Des stèles avec des inscriptions hébraïques datant du 12e siècle ont été retrouvées dans le cimetière de la ville. Les juifs travaillèrent alors principalement dans l’industrie du textile, puis plus tard dans le maïs.
Néanmoins, une expulsion fut ordonnée au 16e siècle par un Pape, au 16e et au 17e siècle, suite notamment aux accusations fallacieuses antisémites d’empoisonnement de puits.
Il n’y a plus de vie juive organisée à Benevento depuis, mais la ville attira récemment des migrants israéliens.
Les premières traces de la présence juive à Amalfi remontent au 10e siècle. Des lettres retrouvées dans la genizah du Caire en attestent notamment.
Cette petite communauté travaillait principalement dans la confection et la soie en particulier. Un commerce international avec des échanges en Egypte, d’où les indications de ces lettres.
Benjamin de Tudèle y mentionne la présence d’une vingtaine de familles en 1159, dont un Ben Paltiel, probable descendant du poète Ahimaatz ben Paltiel. Des conversions forcées menées dans le Royaume de Naples forcèrent des départs ou renoncement au judaïsme à la fin du 13e siècle. La petite communauté qui réussit à se reconstituer au début du 14e siècle dû quitter le royaume de Naples en 1541, comme le reste de celles-ci.
Un Centre culturel juif tente actuellement de se pérenniser à Amalfi.
La présence juive à Reggio semble dater du 4e siècle. Néanmoins, les documents officiels retraçant cette présence datent du 12e siècle. Comme dans différentes villes de la région, les juifs travaillèrent principalement dans le domaine de la soie et de la laine.
Les premiers livres en hébreu imprimés en Europe le furent à Reggio par Abraham Garton en 1475. Les premiers commentaires hébraïques de la Hagaddah y sont également publiés en 1482.
On retrouve d’ailleurs encore aujourd’hui une via Giudecca . De nombreux juifs s’y réfugièrent après l’Inquisition espagnole, avant que la ville ne tombe sous leurs mains également.
Des objets anciens attestant de la présence juive dans la ville sont gardés au Musée Archéologique National de Reggio. Parmi eux, une inscription en grec sur du marbre « synagogue des juifs » datant du 4e siècle, une lampe à huile avec une menorah dessinée dessus et des pièces en bronze du 5e siècle frappée d’une menorah.
En 2007, cette petite ville de Calabre inaugura la première synagogue ouverte dans la région depuis 500 ans.
Un projet rendu possible grâce au dévouement de Barbara Aiello qui fut la première femme rabbin en Italie, depuis 2004.
Née aux Etats-Unis, sa famille était originaire de cette ville. Son père, qui y a grandi, participa en tant que soldat à la libération de Buchenwald.
La synagogue Ner Tamid del Sud accueille depuis 2007 de nombreuses familles juives de la région souhaitant y prier et célébrer les fêtes, bat et bat mitsvot, ainsi que les mariages.
En tant que fondatrice du Centre Culturel Juif Italien de Calabre, qui se trouve au rez-de chaussée de la synagogue, Aiello aide les descendants de familles converties de force durant el Moyen Age à redécouvrir le judaïsme.
Cette synagogue demeure actuellement la seule en activité de la région de Calabre.
Voici notre rencontre avec le rabbin Barbara Aiello
Jguideeurope : Vous êtes originaire de la région de Calabre. Qu’est-ce qui vous a poussé à revenir, à construire une synagogue et à développer le judaïsme dans la région ?
Rabbin Barbara Aiello : Mon père. Il faisait partie d’une famille crypto-judaïque, ou comme on dit bné anoussim, les « enfants des contraints ». Ses ancêtres étaient venus de Tolède à l’époque de la persécution et de l’expulsion d’Espagne. Ils sont allés à Lisbonne, puis en Sicile, dans les îles Éoliennes, et enfin dans les montagnes de l’Italie continentale. Mon père pensait qu’il y avait une riche histoire juive ici. J’ai été le premier membre de ma famille à naître aux États-Unis. Mon père en parlait tellement que je l’ai ramené à Serrastretta, en fait quatre fois avant sa mort en 1980. Chaque fois, il disait : « Il y a tant à accomplir ici et vous pouvez le faire parce que vous avez reçu une éducation juive. Malheureusement, les gens ici n’ont que des bribes de leurs traditions, et parfois ne savent même pas que ces bribes sont liées au judaïsme.
Comment les avez-vous rejoints ?
Beaucoup de gens se demandent pourquoi j’ai choisi Serrastretta pour y établir la première synagogue. Dans ces petites villes de montagne, il est difficile de commencer quelque chose de nouveau si l’on n’est pas connu des locaux. Ma belle-mère était la première femme médecin de Calabre et notre famille était bien connue. Le fait qu’un Américain veuille revenir était considéré comme un honneur pour la ville. J’ai une combinaison très inhabituelle de compétences : L’italien et l’hébreu. Je pouvais déterminer immédiatement divers mots que beaucoup de gens ici croyaient être du dialecte italien de montagne, mais qui étaient en fait de l’hébreu. Par exemple, les Calabrais appellent les petites miettes sur la table « hamets ». La « baïta » est une petite maison que l’on construit et dans laquelle on reste pour s’occuper de ses cultures. Mon arrière-grand-père, Saverio Scalise, qui était le père de ma grand-mère, dirigeait les prières hébraïques dans la cantine de cette maison d’où je vous parle. La synagogue se trouve dans le bâtiment voisin. Quatre fois dans les années 1880, il est allé étudier à Val-David, une petite colonie hassidique de Montréal. Lorsqu’il réunissait les gens pour la prière, il s’agissait de la famille élargie. Pas en public, c’était trop dangereux de le faire ouvertement.
Ce renouveau de la vie juive est-il davantage lié à un désir de découvrir ou d’embrasser des racines juives ?
Nous sommes la première synagogue active dans toute la région de Calabre depuis l’Inquisition, il y a 500 ans, et le premier membre affilié du mouvement juif reconstructionniste. Nous sommes ouverts et accueillants pour les juifs de toutes origines. Cela inclut les familles interconfessionnelles, les descendants patrilinéaires, les couples gays et lesbiens. Nous tendons la main de l’accueil juif à tous ceux qui retrouvent leurs racines, se reconnectent culturellement et spirituellement. Je dis à ma communauté que vous pouvez embrasser ou simplement découvrir vos racines juives. Au centre culturel juif de Calabre, nous organisons de nombreux événements pour notre communauté. Nous venons d’organiser un festival dans la région, qui mettait en avant l’artisanat et les arts d’il y a plusieurs siècles. Nous y avons participé en montrant certains éléments d’un mariage juif, en installant une houpa dans la synagogue où 600 personnes sont passées pour écouter votre présentation. Je suis également très impliquée dans le camp Ferramonti, où je célèbre Rosh Hashanah pour la quatrième année consécutive. Il semble que nous ferons Yom Kippour à Trani. Nous essayons de faire connaître notre présence dans toute la région.
Vous recevez beaucoup de demandes de recherches généalogiques ?
Au moins dix par semaine ! La raison en est que l’immigration italienne vers l’Amérique s’est accomplie principalement à partir de la Calabre et de la Sicile, les deux régions les plus pauvres : 81% ! Et si effectivement 50 % des Calabrais et des Siciliens d’avant l’Inquisition étaient juifs, votre chance d’être juif en Amérique du Nord est plus grande que si vous êtes un Italien vivant en Italie. Nous avons beaucoup de visiteurs et un programme qui communique des informations sur les noms de famille. Nous remontons les noms de famille, si possible, jusqu’à l’Espagne et à l’endroit où le nom a migré vers l’Italie. Heureux d’accueillir des touristes, les gens peuvent venir nous rendre visite sur rendez-vous et nous partageons avec eux l’héritage juif de la région.
La présence juive à Catanzaro date de la fin du 11e siècle.
En 1073, Robert Guiscard, le conquérant normand, les invita à y développer le tissage de la soie. Ils permirent à la ville de devenir le haut-lieu de cette spécialité en Italie, populaire dans toute cette région.
Benjamin de Tudèle attesta de la présence juive dans celle-ci et de son développement. Néanmoins, après deux siècles d’une vie relativement paisible, les accusations et expulsions provoquèrent le départ de la plupart des juifs de la région, principalement pour la Grèce.
L’ancienne synagogue de Catanzaro fut transformée en église dédiée à St. Stefano.
La présence juive à Venosa date de l’époque romaine. Des inscriptions hébraïques ont été trouvées sur place datant probablement du 3e siècle.
Des inscriptions funéraires présentes dans des catacombes juives ont été découverts lors de fouilles archéologiques. Ces découvertes attestent pour l’instant de 75 inscriptions présentes, mais l’accès aux catacombes a été compliqué pendant longtemps.
On y trouve notamment une fresque ornant un arcosolium où l’on aperçoit une menorah au centre entourée d’un etrog, un loulav, une fiole d’huile et un shofar.
Les chroniques d’Ahimaaz ben Paltiel évoquent la présence d’un émissaire de Jérusalem présent au 11e siècle à Venosa, terre de nombreuses rencontres et échanges culturels.
Il y rencontra le talmudiste et poète Silano. Suite à la conquête des Normands en 1041, Venosa perdit son statut de haut lieu d’études juives.
En 2007, les catacombes juives de Venosa ont été ouvertes au public après de grands travaux effectués. Une cérémonie officielle avec les autorités locales et régionales, ainsi qu’une conférence au château de Pirro del Balzo accompagnèrent cet événement.
La présence juive à Aquila semble dater de la fin du 13e siècle.
Ladislas, le Roi de Naples, autorisa deux familles juives à s’y établir et à y tenir des activités commerciales. Des autorisations furent délivrées puis retirées au fil de siècle selon la mansuétude à géométrie variable des dirigeants politiques et religieux. Ainsi, en 1488, suite à des prêches particulièrement hostiles contre eux, seules deux familles juives restent dans la ville. En 1511, les juifs furent expulsés du royaume de Naples, dont Aquila faisait alors partie.
Quelques familles juives s’y sont réinstallées au 20e siècle. Suite au tremblement de terre de 2009 qui eut des effets désastreux sur la ville, les communautés juives d’Italie, et celle de Rome en particulier se sont beaucoup engagés pour venir en aide aux victimes.
La terrifiante guerre menée contre l’Ukraine change, bien entendu, la fonction de ces pages consacrées au patrimoine culturel juif de ce pays. Une grande partie des lieux mentionnés ont été rasés par les bombes. Si ces pages ukrainiennes n’ont pas actuellement de vocation touristique, elles pourront peut-être servir à des chercheurs et étudiants comme références historiques. Références à tant d’histoires douloureuses lors des pogroms et de la Shoah mais aussi heureuses du judaïsme ukrainien, dans ses dimensions culturelle, cultuelle et sioniste. En souhaitant au peuple ukrainien une fin rapide à ces atrocités dont il est victime.
La présence juive à Oujhorod, (Ungvar lors de l’appartenance à l’empire austro-hongrois), date probablement du 16e siècle et a été un centre d’études reconnu de par la présence de nombreux référents rabbiniques.
Essor intellectuel
Parmi eux, Solomon Ganzfried (1804-1886), auteur du Kitsour Shoulkhan Arokh qui est toujours considéré aujourd’hui comme un ouvrage de référence. Un développement intellectuel encouragé par une imprimerie hébraïque présente depuis 1864, reflété par les différents mouvements orthodoxes et hassidiques et leur production écrite, écoles juives et yeshivoth.
En 1904 fut inaugurée la très belle synagogue de Oujhorod. Construites par les architectes Gyula Papp et Ferencs Szabolcs, elle est de style néo-byzantin.
Expulsions et déportations
Lorsque la ville repassa sous contrôle hongrois après les accords de Munich et l’attaque de la Tchécoslovaquie par l’Allemagne, des mesures anti-juives furent prises et les juifs polonais expulsés vers leur pays d’origine.
En 1944, une déportation massive vers Auschwitz fut organisée en Transcarpatie. Ainsi, si en 1930 il y avait 7357 juif à Oujhorod, après les expulsions et surtout les déportations, seuls quelques centaines retournèrent dans la ville après-guerre.
Renaissance de la vie juive
En 1947, la synagogue de style néo-byzantin a été transformée en salle de concert par les autorités soviétiques. L’immeuble est intact et un Beth Chabad y assure aujourd’hui les prières. La communauté d’Oujhorod centralise aujourd’hui les activités juives pour les villes de la région.
La terrifiante guerre menée contre l’Ukraine change, bien entendu, la fonction de ces pages consacrées au patrimoine culturel juif de ce pays. Une grande partie des lieux mentionnés ont été rasés par les bombes. Si ces pages ukrainiennes n’ont pas actuellement de vocation touristique, elles pourront peut-être servir à des chercheurs et étudiants comme références historiques. Références à tant d’histoires douloureuses lors des pogroms et de la Shoah mais aussi heureuses du judaïsme ukrainien, dans ses dimensions culturelle, cultuelle et sioniste. En souhaitant au peuple ukrainien une fin rapide à ces atrocités dont il est victime.
La présence juive à Berehove date probablement de la fin du 18e siècle, lorsque la ville faisait partie de l’empire austro-hongrois. La plupart étant issus de villes polonaises.
En cette période, Berehove comptait déjà une synagogue et un cimetière juif .
Nombreuses victimes de la Shoah
Selon un recensement effectué en 1921, 4592 juifs habitaient à Berehove. Un nombre qui s’élève à près de 6000 en 1941. Ils travaillaient dans des domaines très variés : moulins, vignes, commerces, médecine…
Suivant les accords de Munich et le dépeçage de la Tchécoslovaquie par l’Allemagne et ses alliés, la région passa sous contrôle hongrois. La Shoah fut très brutale.
Ainsi, après avoir perdu de nombreux droits, les juifs sont déportés massivement en 1944. 11000 juifs furent déportés à Auschwitz, dont 3600 issus de Berehove.
Synagogues à visiter
En 1959, la synagogue principale fut fermée par les autorités soviétiques et transformée en théâtre. Comme ce fut le cas dans d’autres villes comme Moukatchevo, les prières se déroulèrent ensuite principalement dans des appartements privés. L’ancienne Grande synagogue de Berehove est aujourd’hui une maison de la Culture. Son entrée a été couverte d’une reproduction dessinée de la façade l’ancienne synagogue.
S’il y avait encore plus ou moins 300 juifs à Berehove en 1970, ils sont très peu nombreux aujourd’hui mais ont depuis quelques années une nouvelle synagogue .
La terrifiante guerre menée contre l’Ukraine change, bien entendu, la fonction de ces pages consacrées au patrimoine culturel juif de ce pays. Une grande partie des lieux mentionnés ont été rasés par les bombes. Si ces pages ukrainiennes n’ont pas actuellement de vocation touristique, elles pourront peut-être servir à des chercheurs et étudiants comme références historiques. Références à tant d’histoires douloureuses lors des pogroms et de la Shoah mais aussi heureuses du judaïsme ukrainien, dans ses dimensions culturelle, cultuelle et sioniste. En souhaitant au peuple ukrainien une fin rapide à ces atrocités dont il est victime.
Cette ville de Transcarpathie, située au carrefour de plusieurs nations aux frontières évolutives a d’autant plus été marquée par de nombreuses influences : tchèque, slovaque, polonaise, autrichienne, hongroise, ukrainienne…
La présence juive à Moukatchevo, autrefois appelée Munkacs semble dater de la fin du 17e siècle. La première synagogue date d’ailleurs de 1768. De nombreux courants religieux traversèrent les yeshivot, imprégnées jusqu’à la fin du 19e siècle par des rabbins tels Hayim Sofer et Shlomo Shapira, aidé par une reconnaissance de droits par les autorités locales et une bonne entente entre toutes les populations.
Bel essor de la culture juive
La communauté est juive très pauvre matériellement, la plupart des gens étant agriculteurs ou ouvriers, mais d’une richesse intellectuelle remarquable. L’hassidisme s’y mêlait aux autres mouvances orthodoxes, mais aussi le sionisme et le judaïsme culturel. Trois journaux hebdomadaires en yiddish étaient alors publiés à Munkacs ! Le Yidishe shtime, le Yidishes folks-blat et le Yidishe tsaytung. Et même un journal humoristique, au nom légèrement indicatif de sa fonction, Der Humorist.
Pas seulement cantonnés aux études, ce qui prouvait l’ouverture d’esprit pour les arts, un juif orthodoxe ouvrit le premier cinéma de la ville. Moins divertissant mais assez urgent, les juifs de la ville repoussèrent les assauts des troupes cosaques en 1919.
A cette période d’ailleurs, les relations régionales complexes firent que la ville était coupée en deux par les armées tchèque et romaine, nécessitant un passeport pour passer d’un côté à l’autre. En 1920, la ville devint tchèque, en accord avec le Traité de Trianon, retirée à la Hongrie qui la dirigeait jusque-là. Un peu plus de 5000 juifs étaient recensés en 1891, ce qui constituait la moitié de la population totale. 10000 juifs habitèrent la ville en 1920, dans des proportions similaires.
Une école juive progressiste modèle
En 1925 fut inauguré le Gymnasium Hébraïque de Munkacs. Un des lycées juifs les plus progressistes d’Europe de l’Est. Un enseignement classique y était enseigné, en hébreu. Jeunes femmes et hommes étudiaient ensemble et de manière égalitaire. Une ouverture d’esprit pas toujours saluée par certains représentants orthodoxes, menaçant les parents d’élèves et enseignants d’excommunication. Des tensions existaient également entre les différentes mouvances orthodoxes.
Avant la Seconde Guerre mondiale, Munkacs avait la plus grande communauté juive de cette région, avec une trentaine de synagogues, petits shtiebels pour la plupart et constituait près de la moitié de la population. Les deux principales synagogues étant la Bais Hakneses Hagadol et la Bais Medrash du Munkacser Rebbes .
Destruction des communautés pendant la Shoah
Profitant de l’invasion allemande de la Tchécoslovaquie, la Hongrie s’empara à nouveau de la ville en 1939. L’activité religieuse et culturelle fut drastiquement réduite et de nombreux juifs forcés de servir des fonctions de travail forcé au sein de l’armée hongroise.
Suite à l’invasion allemande le 19 mars 1944, les communautés juives de la ville et des environs furent détruites, de très nombreux juifs étant déportés vers Auschwitz. Parmi les 2000 survivants (sur 15000 juifs), Chaïm Kugel, le fondateur du Gymnasium Hébraïque de Munkacs. Il immigra en Israël et devint le maire de Holon.
Renaissance de la vie juive
Suite à la guerre, Munkacs intégra l’Ukraine et fut rebaptisée Mukatchevo. En 1966, sur les 50500 habitants recensés, 6 % se déclarèrent juifs. En 2001, sur les 82200 habitants ils représentèrent seulement 1 %. Certains bâtiments d’époque sont encore debout mais peu reconnaissables, transformés par l’ère soviétique et utilisés pour d’autres fonctions.
L’ancien cimetière juif avait été presque entièrement détruit. Une centaine de tombes ont pu être réinstallées par la communauté dans un cimetière dans le village voisin de Koropets. Un nouveau cimetière juif est également présent en ville.
Néanmoins, ces dernières années une vie culturelle juive y renait. Une synagogue a d’ailleurs été inaugurée en 2006. Tout cela, en grande partie grâce à l’aide d’Américains, dont certains sont descendants de Munkacs. Une centaine de juifs y habitent aujourd’hui.
Rencontre avec le grand peintre Samuel Ackerman
Né en 1951 dans la région de Transcarpathie, Samuel Ackerman a grandi à Muncacks et effectué ses études à l’Ecole d’art d’Oujhorod (précédemment nommée Ungvar, lorsqu’elle fit partie de la Hongrie jusqu’à la fin de la Première Guerre mondiale). Lieux situés à ce carrefour culturel de langues et civilisations et à ce carrefour naturel de composé de montagnes, forêts et lacs posés les uns sur les autres comme des couches de peinture sur un tableau et où le discernement de l’élément qui culmine peut s’avérer difficile.
Dans sa fameuse réplique d’Un Singe en Hiver à Jean-Paul Belmondo qui lui parle avec enthousiasme du Prado, Jean Gabin préfère voir le jardin qui entoure le bâtiment. L’école d’art d’Uzhhorod et les environnements culturels et naturels ne se (re)posèrent jamais. S’influencèrent et se répondirent. Et ce n’est pas un hasard si Samuel Ackerman, devint dans les années 1970s un des artistes israéliens les plus influents.
Poursuivant ces dialectiques entre art et nature, entre culture ancestrale et contemporaine, il déroula ses rouleaux, laissa s’échapper les créations de l’imaginaire de notre genizah intérieure pour fleurir les déserts. Le mouvement avant-gardiste Leviathan naquit ainsi, en compagnie d’Avraham Ofek et Mikhaïl Grobman.
En 1984, Samuel Ackerman s’installa avec sa famille à Paris où il devint une des figures de cette bohème d’artistes d’Europe de l’Est, magnifiée des caves de piano bar par Serge Gainsbourg aux plafonds de Marc Chagall. Rencontre avec Samuel Ackerman pour évoquer la ville de Munkacs et sa vie juive si particulière et inspirante. La galerie Le Minotaure a publié un recueil d’une grande partie de ses œuvres.
Jguideeurope : Votre famille est originaire de la région ?
Samuel Ackerman : En Transcarpatie, il y avait trois grandes villes : Moukatchevo, Oujhorod et Berehove. Une forte proportion de la population régionale était juive jusqu’à la Seconde Guerre mondiale et la déportation massive de 1944. Mon père, Meïr Ackerman, est originaire de Makarovo, un village situé entre Moukatchevo et Berehove. Pendant la guerre, il a été envoyé dans un camp de travail. Ma mère, Dora Gottesman, était originaire de Krytoïe, un village au nord de Moukatchevo. A 22 ans, elle a été déportée à Auschwitz. Son étonnante force lui permit de survivre. Son frère est également revenu d’un camp de travail, mais le reste de la famille fut assassiné à Auschwitz. Mes parents se sont rencontrés à Moukatchevo après la guerre. Ils ont d’abord habité à Makarovo, où je suis né, puis sont retournés à Moukatchevo. Si la population juive de cette ville était de près de 50 % avant-guerre, il n’y demeurait que quatre familles au lendemain de celle-ci.
J’ai été scolarisé à Moukatchevo, avant de poursuivre des études artistiques à l’Ecole des Beaux-Arts d’Oujhorod. Elle était rattachée à l’académie de Prague, ce qui nous a permis d’être en contact avec les œuvres de l’avant-garde européenne, au-delà des frontières Est-Ouest.
Qu’est-ce qui vous a motivé dans cette voie ?
Un professeur de dessin a repéré mon enthousiasme et mon potentiel, m’encourageant vivement. Il créa un petit musée au sein de l’école, mêlant l’art à la botanique et la zoologie. Il m’enseigna les techniques pour la gouache et l’aquarelle. Son enseignement, ainsi que la possibilité de le voir à l’œuvre m’ont donné confiance. La première fois que je suis sorti pour étudier les éléments naturels, c’était muni d’une boite de gouaches offerte par mon père. En cette saison, les cerisiers étaient habillés de fleurs blanches. J’ai voulu que chaque fleur soit présente sur mon dessin. Confronté à cette difficulté, j’ai plié ma feuille en deux et ce qui était peint sur un côté fut reproduit sur l’autre. Une expérience drôle mais qui me fit comprendre aussi que l’art requérait avant tout de la patience. Mon ami Alter Vogel a suivi les mêmes études quatre ans avant moi. C’est lui qui, par la suite, prendra les photos de mes performances artistiques avec les meguiloth dans le désert israélien. Une dizaine d’artistes juifs de cette époque suivirent cette même formation.
Que reste-t-il de la vie juive de Moukatchevo ?
La soviétisation de la ville fut rapide après-guerre et les bâtiments et noms de rue changés, notamment en ce qui concerne le patrimoine culturel juif. Au centre-ville d’Oujhorod, dans un petit passage, se situait la seule synagogue active mais cachée pour les grandes fêtes. Pour les shabbatot et autres fêtes, les prières se déroulaient principalement dans l’appartement d’un fidèle. L’appartement se trouvait dans la rue Berehove, celle qui mène à cette ville. Mes parents et les autres habitants de la région étaient généralement assez pratiquants.
Assez pratiquants, ce qui n’empêchait pas une grande ouverture sur le monde dans ce carrefour de langues et civilisations. A l’image du Gymnasium Hébraïque du Moukatchevo.
Malheureusement cet établissement fut aussi réquisitionné après la guerre et transformé en caserne de l’Armée rouge. Mais la menorah qui figurait sur la palissade métallique ne fut pas retirée à cause de la solidité de cette construction. Ce lycée, ainsi que la synagogue de briques rouges et aux ornementations orientales d’Oujhorod furent financés par le président tchèque Tomáš Masaryk.
Quels éléments de votre vie en Transcarpatie souhaitiez-vous partager dans vos premières œuvres ?
En premier lieu, les bâtiments. Similaires aux édifices baroques bruxellois avec des masques sur les façades et d’autres éléments décoratifs invitant l’observateur à une scène de théâtre. J’ai reproduit cela sur un dessin avec une maison où l’on voit deux fenêtres et mon père. La très jolie forteresse proche de la ville fut aussi une source d’inspiration, ainsi que les rivières et montagnes traversées par les villages de la région. Toutes les grandes villes de Transcarpatie possédaient d’ailleurs une forteresse, construites à l’époque de l’empire austro-hongrois. L’été, on se baladait souvent pieds nus. Un contact direct avec la terre que je trouvais très agréable.
J’ai également été marqué par d’étonnants personnages régionaux. A l’image du sculpteur Tourski de Moukatchevo, qui créa des visages de gens blessés en terre rouge, lesquels ornaient son jardin. Une œuvre très sensible que j’ai mieux comprise avec le temps.
Tourski avait étudié à Léningrad mais rentra à Moukatchevo avant la fin de sa formation à cause de problèmes de santé. Dans ses bagages, le seul livre que ses maigres économies lui permettaient d’acheter : un recueil présentant les œuvres de Dali. Tourski était le seul en Transcarpatie à posséder ce beau livre consacré au peintre espagnol. Afin de pouvoir le consulter, les personnes intéressées devaient l’inviter à déjeuner. Puis, il les emmenait chez lui afin de présenter le livre rare et le commenter. En guise de conclusion de cette présentation, les personnes étaient conviées à l’inviter pour un repas supplémentaire. Mais un jour, tombant amoureux d’une femme, il lui confia le livre pour qu’elle le montre à quelqu’un. Elle disparut sans laisser de trace. Face à la détresse de mon ami, j’ai coordonné de vastes recherches régionales. C’est ainsi qu’on a retrouvé sa trace à Berehove et récupéré le livre qu’elle utilisait de la même façon…
Lors de votre service militaire vous avez travaillé pour le musée des Armées de la région.
J’ai été chargé avec quatre autres personnes des rénovations du musée. Une expérience intéressante et dont une anecdote fut pour moi une grande source d’inspiration sur la comédie humaine. Un gâteau reçu par le Maréchal Gretchko, commandant de l’Armée soviétique qui dirigea l’invasion de la Tchécoslovaquie en 1968, y était conservé dans un mausolée de verre. Lors des rénovations, deux soldats kazakhs ont déplacé le mausolée et il se brisa, ainsi que le gâteau qu’il était supposé protéger. Les officiers craignaient que nous soyons tous envoyés en prison ! D’autant plus que nous attendions la visite d’un très haut gradé deux jours plus tard. J’ai dit au général que j’étais capable de réparer les dégâts. Pas en réassemblant le gâteau, ce qui était évidemment impossible, mais en le reproduisant en papier mâché. J’ai travaillé pendant 24 heures d’affilée, reproduisant le gâteau dans les moindres détails avec toutes sortes de collages et de couleurs. En fermant aussi définitivement l’emballage de verre qui le protégeait, afin que les hauts gradés ne se rendent pas compte du subterfuge. Une parabole sur la manière dont l’art peut réparer. Nous étions en 1971, trois ans après les événements de Prague, une période très tendue. Je faisais d’ailleurs partie d’un groupe d’artistes créant des œuvres contestataires inspirées par Guernica.
Vous avez quitté la région pour Israël où vous avez créé, avec d’autres artistes originaires d’Europe de l’Est, le mouvement Leviathan. Était-ce juste après votre service militaire ?
Pas tout à fait. J’ai d’abord travaillé un peu pour le théâtre de Moukatchevo, participant à un spectacle. Puis, nous avons obtenu l’autorisation de partir en Israël, suite à un premier refus. Nous avons créé Leviathan avec Avraham Ofek, né en Bulgarie, et Mikhaïl Grobman, originaire de Moscou. Grobman était un peu plus âgé et bénéficiait déjà d’une certaine notoriété à Moscou comme en Israël. Cette terre était pour moi comme un canevas vierge, avec ses fantaisies et nouvelles formes. Une expérience très enthousiasmante. Avec une liberté totale pour les artistes engagés, participant à cette époque aux débats de société parfois tendus. En découvrant l’œuvre d’Emmanuel Levinas, je me suis identifié à son approche. Son ouverture vers les autres croyances et la littérature, dont l’œuvre de Dostoïevski, fut déterminante. Il permit, avec d’autres tel Martin Buber, un grand renouvellement de la perspective juive.
Un autre grand intellectuel de cette époque cité dans le très beau livre que vous a consacré la galerie Le Minotaure est Gershom Scholem. Vous l’avez rencontré ?
Oui, en 1979. Il est venu assister à une exposition Leviathan à Jérusalem. Il appréciait beaucoup notre démarche. On y exposait des œuvres inspirées par Andreï Roublev, peintre du mysticisme orthodoxe. La lumière y traverse Jérusalem et ses bâtiments, rencontre entre deux mysticismes. Les confrontations entre mondes religieux et culturels dépassent souvent les perceptions premières, à l’image du travail important effectué par le directeur du musée de Tel Aviv, Mordechaï Omer, qui était quelqu’un de très pratiquant. Dans l’esprit du prophète Isaïe qui réunit les gens dans la paix par l’intermédiaire de la rencontre et de la création. Chaque migration enrichit cette terre. Ces dernières décennies, de grands artistes éthiopiens et nord-africains ont donné leurs lettres de noblesse aux arts israéliens.
Vous êtes retourné à Moukatchevo depuis ?
Oui en 2007, avec ma femme Galia. Mais nous avions visité d’autres villes d’Ukraine auparavant comme Lvov et Czernowitz. Puis, la région de Transcarpatie, avant de poursuivre le séjour en Pologne. Ce fut assez émouvant. Mais je n’ai jamais rompu le lien, restant en contact avec des artistes de Transcarpatie ici à Paris où je vis avec ma famille depuis près de quarante ans.