Roumanie

Synagogue de Brasov © Wikimedia Commons (Gitanes232)

Il est difficile d’attester la présence de juifs sur les côtes de la mer Noire avant l’arrivée des légions romaines au début du IIe siècle de notre ère. Des vestiges, pièces de monnaies et inscriptions -conservées au musée de Bucarest- témoignent en revanche d’une présence juive dans la région tout au long du premier millénaire. Vers la fin du XIIIe siècle, la grand voyageur Benjamin de Tudela signalait déjà une présence juive au sud de la Valachie.

La Roumanie regroupe trois régions historiquement distinctes, débordant d’ailleurs en partie de ses frontières actuelles. La Valachie, située entre la partie méridionale des Carpates et le Danube, la Moldavie, enclavée entre les Carpates orientales et la rivière Pruth, la Transylvanie, voisine tout à la fois de l’Ukraine, de la Hongrie et, dans sa province méridionale (le Banat), de la Serbie.

Chacune de ces régions connut un destin différent au sein des trois empires défunts : ottoman, russe et austro-hongrois. Ce n’est qu’en 1859 que la Valachie et la Moldavie se réunirent au sein d’un petit royaume danubien. Après la Grande Guerre, les provinces austro-hongroises et russes, où les Roumains se trouvaient majoritaires, les rejoignirent. Parmi elles la Bucovine et la Bessarabie, qui fut le foyer d’un judaïsme roumain aujourd’hui disparu.

La treizième tribu ?

Avant et après le retrait de l’administration romaine, en 217, sous Aurélien, les Daces romanisés subirent, au nord du fleuve, le rouleau compresseur des grandes migrations. De là l’hypothèse audacieuse, restée jusqu’ici non vérifiée, avancée par Arthur Koestler dans son livre La Treizième Tribu : les Khazars dont l’empire s’étendait, du VIIIe siècle au Xe siècle, de la Volga aux Carpates, pourraient être les ancêtres des millions de juifs qui vivaient en Europe occidentale et centrale avant la Shoah.

Monument aux victimes des pogroms construit à côté de la synagogue de Iasi
Monument aux morts de Iasi. Photo de Cezar Suceveanu – Wikipedia

En effet, sur les 800000 juifs établis en Roumanie dans l’entre-deux-guerres -soit la troisième communauté juive par ordre d’importance après la Pologne et l’ex-URSS, il ne reste de nos jours qu’une douzaine de milliers d’entre eux. Rappelons qu’en 1940, suite au pacte germano-soviétique, l’URSS annexa la Bessarabie et la Bucovine alors que la Hongrie faisait main basse sur une bonne moitié de la Transylvanie. Environ 400000 juifs habitaient alors ces provinces avant leur liquidation massive, soit par l’armée roumaine alliée des nazis dans la guerre contre l’URSS (en Bessarabie, Bucovine et en Transnistrie), soit à Auschwitz, livrés par les autorités hongroises installées en Transylvanie occupée. Ceux qui habitaient les territoires restés roumains, spoliés de leurs biens et marginalisés, survécurent en grande majorité à la Shoah malgré les pogroms de Bucarest, de Dorohao et de Jassy. Au cours des décennies suivantes, ils émigrèrent vers Israël, les États-Unis ou l’Europe occidentale.