Comme l’indique fièrement les services culturels et municipaux, Worms est une ville centrale, et depuis bien longtemps, pour de nombreux courants religieux. Ainsi, dans un petit périmètre au cœur de sa vieille ville, on trouve l’impressionnante cathédrale, des églises, ainsi que les bâtiments municipaux et l’ancien quartier juif accueillant son musée et sa synagogue.

Histoire
La présence juive à Worms est très ancienne, datant de la moitié du 10e siècle. Il s’agissait essentiellement de marchands. Ils habitaient sur l’actuelle Judengasse, qui signifie « rue des Juifs ».

À proximité des enceintes de la ville, la première synagogue de Worms fut construite en 1034, grâce à un don de Jacob et Rachel Ben David. Ce qui facilita l’accueil des grands érudits européens, Worms devenant comme les autres villes du SChum, célèbre pour ses yeshivot et illustres étudiants et enseignants, parmi lesquels Rachi.

Ce fut à cette même période que les juifs obtinrent un terrain à l’autre bout de la ville pour y installer un cimetière. Le cimetière juif est la plus ancienne nécropole juive conservée en Europe. Des enterrements s’y déroulaient de manière ininterrompue jusqu’en 1911.
Le mikvé date probablement de la fin du 12e siècle. Construit par la communauté grâce aux dons d’un certain Joseph, il fut creusé à 7 mètres de profondeur afin d’atteindre l’eau de source. Il incluait une pièce pour se changer ainsi qu’une autre pour le nettoyage avant la plongée dans l’eau du mikvé.

La synagogue dut être reconstruite suite aux destructions occasionnées durant les croisades de 1096 et 1146. La réinauguration se déroula en 1175. Meir et Judith bar Joel firent un don en 1212 afin que soit construite une salle de prière pour les femmes, attenante à celles des hommes. Construite dans le même esprit qu’à Spire, la Frauenschul était connectée à la salle des hommes par une porte, ainsi que cinq petites fenêtres qui permirent aux prières d’être entendues par les femmes. Ce n’est qu’au 19e siècle que cet espace fut ouvert plus amplement afin de permettre une plus grande participation des femmes aux prières.
Lors des persécutions de 1349, l’année de la peste noire, plus de 400 Juifs furent assassinés, la Judengasse détruite et les biens spoliés. La synagogue fut reconstruite dans un style gothique. La communauté juive de Worms subit un déclin irrémédiable, notamment en matière de production intellectuelle et religieuse.

Un peu moins de 200 Juifs vivaient sur la Judengasse à la fin du 14e siècle. Quelques étudiants les rejoignirent et ainsi la communauté juive fut composée de près de 250 personnes en 1500.
Forcés à vivre dans le ghetto, le nombre de juifs augmenta néanmoins grâce au soutien de l’empereur Ferdinand Ier (1503-1564), qui empêcha la municipalité de les expulser. Ainsi, de la fin du 16e siècle à la fin du 18e siècle, entre 500 et 700 juifs habitaient sur la Judengasse. Néanmoins, les troupes de Louis XIV détruisirent la ville en 1689 lors de la guerre de la Succession palatine, notamment son quartier juif.
Comme dans divers autres villes européennes conquises par les troupes françaises au début du dix-neuvième siècle, les juifs obtinrent les mêmes droits que leurs concitoyens. Cette égalité enfin acquise, les Juifs participèrent grandement au développement économique, intellectuel et politique de Worms. Preuve de cette intégration réussie, Ferdinand Eberstadt (fils d’une famille établie à Worms depuis le 17e siècle) fut même maire de Worms de 1849 à 1852.

L’élan intellectuel du 19e siècle, encouragea également des transformations au sein de la communauté juive. Ainsi, la synagogue Levi fut construite en 1875, en face de l’autre, suite à des débats aussi riches que tendus entre traditionalistes et libéraux. Elle fut nommée en hommage à son fondateur, Leopold Levy.
La communauté juive de Worms comptait 1000 membres en 1933. Le 3 juin 1934 fut célébré à la synagogue son 900e anniversaire, malgré les craintes face à la prise de pouvoir par les nazis.
Lors de la Nuit de cristal du 9 au 10 novembre 1938, l’ancienne synagogue de Worms fut à nouveau détruite. Quant à la synagogue Levy, elle fut gravement endommagée cette nuit-là et subit plus de dégâts lors d’un bombardement allié sur la ville en 1945. Seuls quelques murs maintinrent les apparences, à tel point qu’il n’y avait plus de solution en 1947 que sa démolition.
En mars 1942, 75 juifs sont raflés et envoyés en déportation à Sobibor et Belzec. En septembre 1942, 93 autres sont envoyés à Theresienstadt et 5 à Treblinka. En tout, 460 juifs Worms seront assassinés pendant la Shoah.
La synagogue fut reconstruite, à nouveau, dans la période de 1959 à 1961. Un projet qui put voir le jour grâce au soutien de certains juifs qui avaient réussi à fuir pendant la guerre, ainsi que celui de la communauté actuelle de Mayence et Worms, la ville de Worms, l’État de la Rhénanie-Palatinat, ainsi que la République fédérale allemande.

Derrière cette synagogue se trouve un lieu d’étude surnommé la Yeshiva Rachi, le grand exégète ayant étudié à Worms. Ce bâtiment accueille depuis 1982 le musée juif de Worms, mais il ne s’agit pas du premier de ce genre. Le premier musée juif de Worms date de 1924. Il est le fruit du travail d’Isidor Kiefer (1871-1961), un membre actif de la communauté juive de Worms. Celui-ci s’exila en 1933 aux États-Unis, suite à l’accession au pouvoir par les nazis. Lors de la Nuit de cristal, le musée fut détruit pendant le pogrom. Seules quelques rares pièces du musée réussirent à être sauvées.
La petite dizaine de juifs résidant aujourd’hui à Worms sont rattachés à la vie communautaire de Mayence.
Itinéraire
En sortant de la gare de Worms, on prend à droite sur la Bahnhofstrasse, en longeant la rue jusqu’au bout.

Face au théâtre, qui accueille de nombreuses manifestations culturelles, on tourne à gauche afin d’arriver à l’ancien cimetière juif de Worms.

Le cimetière est composé de plusieurs sections, la principale se trouvant à l’entrée, les autres surplombant celle-ci, étant construites lors de l’agrandissement du cimetière.

L’ancien cimetière juif de Worms est probablement le plus ancien d’Europe. Datant du 11e siècle, 836 tombes ont été répertoriées. Certaines très anciennes et d’autres plus récentes, qui figurent sur le petit chemin en hauteur vous menant à ses différentes sections.

Suite à cette visite, on remonte vers la vieille ville, le long des remparts. On arrive à ses nombreux bâtiment religieux, cathédrale et églises de différents courants.

Afin d’atteindre à la Judengasse, on traverse le rue commerçante de la Kämmererstrasse, le long de ses fontaines : la Siegfriedbrunnen (en hommage à Siegfried, héros de la mythologie nordique),

la Winzerbrunnen (la Fontaine des vignerons rend hommage à la culture locale du vin, ainsi qu’à des personnages historiques associés à la viticulture)

et enfin la Ludwigsbrunnen (en hommage au Grand-duc Louis IV de Hesse et du Rhin), sur la place du même nom, célébrant la ville de Worms.

Au bout de cette rue, arrivant à la Martinspforte, on tourne à droite dans la Judengasse.

Au début on y aperçoit un jardin d’enfants nommé en hommage à Anne Frank. Cette partie de la rue est constituée d’anciens pavés, sur laquelle on trouve également d’autres types de pavés, des stolpersteine marquant les lieux où habitaient des Juifs ont été déportés pendant la Shoah.

La Judengasse mène donc à la la synagogue et au musée juif de Worms . En face de l’entrée de la synagogue se trouve une plaque commémorative sur un mur marquant l’endroit où était située la synagogue Levy de 1875 à 1947.

En entrant dans le musée, on est accueilli à droite par une vidéo qui raconte l’histoire de ce bâtiment et présente, de manière générale, les rites juifs.

A côté de cette vidéo, un Sefer Torah. Dans cette même salle, on découvre de très anciens objets et manuscrits protégés par des vitres.

Parmi ces documents importants, le célèbre Mahzor de Worms, rassemblant des textes liturgiques utilisés par le hazan de la synagogue. Ce mahzor a été écrit en 1272 par Simha Bar Judah. Sa version originale est conservée à la bibliothèque nationale de Jérusalem. Celui qui est présenté au musée est une reproduction datant de 1986.

Parmi les autres objets, des livres bien sûr, mais aussi des photos de classes d’enfants ou des photos de soldats juifs pendant la Première Guerre mondiale. Des portraits aussi de personnalités de communauté. Et même un ceintre du magasin Goldschmidt de Worms. C’était le magasin de textile le plus connu et le plus grand de Worms, installé avant-guerre sur la majeure partie des maisons entre Domgasse et Hofgasse.

La salle de gauche est essentiellement constituée de panneaux présentant des sujets très variés : l’histoire générale des juifs de la région de Schum, la création du premier musée juif par Isidor Kiefer, la célébration des 900 ans de la synagogue en 1934, la reconstruction de celle-ci après-guerre et un meuble en forme de buffet sur lequel est écrit le mot en hébreu « Zakhor » signifiant « se souvenir », dans les tiroirs duquel on peut lire la biographie de Juifs de Worms déportés pendant la Shoah.

En descendant au sous-sol du musée, on est accueilli à bras ouverts par une œuvre représentant le Golem, créée par l’artiste Joshua Abarbanel. Allongé les bras écartés avec la lettre hébraïque alef attachée au poignet, la première du mot « émet », « la vérité » qui donne sa force au Golem. En quête de vérité et de protection des juifs face aux menaces. Ce Golem composé de lettres fait penser au « Body of Knowledge » qui se trouve à l’université Goethe de Francfort, œuvre qui contient elle aussi quelques lettres hébraïques.

On y trouve également une présentation très intéressante des symboles posés sur les tombes, notamment les dessins d’animaux ou de fleurs, et ce que chacun de ces symboles signifie. Mais aussi un tableau mentionnant les villes françaises et allemandes liées à la pensée de Rachi.

Un plan de la Judengasse en 1760 a été reconstitué avec ses habitations, rappelant là aussi le musée juif de Francfort avec la présentation des histoires de personnes, de moments de vie qu’on (re)découvre et partage. Une tentative de réhumaniser cette vie juive, victime le long des siècles de massacres.

En sortant musée, vous trouverez les traces d’un ancien puit, avant de visiter la synagogue. Restaurée 1001 fois après avoir subi maintes destructions, elle accueille aujourd’hui les touristes.

La première salle rend hommage aux disparus et présente d’anciens objets. La seconde avec ses bancs, sa menorah, sa téva et son aron éclairés par les murs clairs, lustres et rayons de soleil s’invitant par la fenêtre, semblent attendre encore un éventuel retour des fidèles.

En sortant, à droite de la Judengasse, un peu plus loin se situe un autre puit, la rue menant aux très beaux vestiges des remparts de la ville, symbole d’une protection présente et future des juifs ?

Ancienne cité romaine, Mayence, Mainz en allemand, est connue pour son université, ses musées et lieux de culte, ses monuments parmi lesquels le château des Princes-électeurs, ses fêtes populaires… Et surtout en tant que ville natale de Johannes Gutenberg (1400-1468), l’homme qui révolutionna l’imprimerie.

Mayence célèbre de manière multiple et variée la présence et l’influence de Gutenberg. Qu’il s’agisse du musée qui lui est dédié, de statues, de places… Et les plus grandes pages de la Bible accrochées en haut de la cathédrale en 2025, mesurant 5 sur 7 mètres, en hommage au 625e anniversaire de la naissance de Gutenberg.

ShUM, le célèbre acronyme qui, en hébreu, reprend les premières lettres de 3 villes mythiques : Spire, Worms et Mayence. Trois villes qui, le long du Rhin, représentent le berceau de la pensée juive ashkénaze. À partir du 10e siècle, et cela pendant quelques-uns des siècles qui suivirent, cette région demeura un des centres, voire le plus grand, de la pensée juive médiévale. De par la présence des grands khakhamim qui y naquirent, y étudièrent et/ou y enseignèrent.

ShUM signifie « ail » en hébreu. Ce qui est sûr, c’est que les débats entre penseurs de la même génération, et surtout ensuite avec leurs disciples, furent très variés et très épicés. Cette curiosité, cette exigence héritée depuis la Bible d’achever les discussions par une question plutôt que par un point final ou un point d’exclamation, encouragèrent les débats, l’évolution de la pensée, son partage, sa générosité… une remise en question dans le sens noble du terme. Ce n’est donc pas par hasard que Rachi, l’exégète de la Bible le plus connu et le plus respecté dans le monde juif aujourd’hui, a étudié dans cette région.

Mayence a probablement le privilège d’être la plus ancienne de ces communautés juives. Elle date du 10e siècle, voire avant. En effet, les documents administratifs confirment la présence de juifs dès 906. Ils furent expulsés de la ville en 1012, mais autorisés ensuite à s’y réinstaller. Lors de la première croisade, en 1095-1099, plus de 1000 Juifs moururent, soit en étant assassinés, soit en se suicidant, refusant la conversion de force. Il y avait à cette époque une synagogue, mais celle-ci, comme le quartier juif, fut brûlée. Quelques années plus tard, l’empereur Henri IV (1050-1106) leur permit un retour et une vie pacifique.

Symbole de cette autorité spirituelle et intellectuelle, de nombreux synodes furent organisés à Mayence, notamment en 1150, 1223 et 1250. Les takanoth de ShUM furent respectées de par l’Europe. Parmi les grands noms de cette époque, il y a la famille Kalonymus, et bien sûr Rabbenou Guershom. Né à Metz en 960, il créa de nombreuses yeshivoth, aussi bien en France qu’en Allemagne. En l’an 1000, il réunit un synode où de grandes décisions furent prises, des takanoth qui révolutionnèrent le judaïsme. Parmi elles, l’interdiction de la polygamie et la nécessité d’obtenir l’accord de la femme pour entamer une procédure de divorce. Rabbenou Guershom mourut à Mayence en 1028.

Dans la période qui suivit, les juifs de Mayence furent tour à tour menacés et protégés, selon les dirigeants de l’époque. Ainsi, lors de la 2e croisade de 1146-1149, de nombreux juifs furent assassinés, mais lors de la 3e croisade, en 1189-1192, les juifs de Mayence bénéficièrent de la protection de Frédéric Ier (1122-1190), lequel marcha auprès du rabbin afin de montrer à la population qu’il s’opposerait à toute hostilité à leur égard.

Les 13e et 14e siècles furent particulièrement violents vis-à-vis des juifs de Mayence. Forcés de porter des signes distinctifs en 1259, leur synagogue fut à nouveau brûlée à la fin du 13e siècle. Suite à la peste noire de 1349, la majorité des juifs périrent sous les flammes. Si la fin du 14e siècle et le 15e siècle furent moins sanglants, les juifs furent victimes de fortes taxations et leur synagogue transformée en chapelle.

Très peu de Juifs vécurent encore à Mayence durant le 16e siècle. Ce n’est qu’à la fin de celui-ci que la communauté prit un peu de vigueur grâce à l’arrivée de Juifs de Francfort, de Worms et de Hanau. Ainsi, une nouvelle synagogue fut construite en 1639. Leur situation s’aggrava lors de l’occupation française de 1644 à 1648. Ce n’est qu’en raison de l’influence de la politique de tolérance de Joseph II et du souffle révolutionnaire français que leur situation s’améliorera à la fin du 18e siècle.
Au 19e siècle donc, le judaïsme de Mayence put enfin profiter d’une réelle renaissance. Certes, il ne s’agissait pas de l’âge d’or de ShUM, néanmoins de grands penseurs juifs et rabbins entamèrent des discussions très fructueuses, voire des débats vigoureux, qui donnèrent naissance à différents courants et écoles de pensée. La population juive de Mayence passa de 1620 en 1828 à 3104 en 1900.

Au début du 20e siècle, ce chiffre déclina graduellement. Il n’y avait, en 1933, lorsque les nazis accédèrent au pouvoir, que 2730 Juifs à Mayence. Durant la Nuit de cristal, les trois principales synagogues de la ville furent brûlées. Si près de la moitié des juifs réussirent à fuir avant les déportations, la majorité de ceux qui étaient restés furent assassinés pendant la Shoah.
Après la guerre, une petite communauté tenta de se réorganiser. Ils étaient 80 en 1948, guère un peu plus vingt ans plus tard, soit 122. La plupart étant des personnes âgées. Signe de l’évolution des relations, Mayence a été jumelée avec la ville israélienne de Haïfa en 1981.

Grâce à l’arrivée de juifs issus de l’ancienne Union soviétique, la communauté a pu se reconstituer, atteignant 1000 membres en 2005. Symbole de ce renouveau, la très étonnante nouvelle synagogue sur le plan et la réalisation architecturale, inaugurée en 2010.

La synagogue kedousha, qui abrite également un centre communautaire et une présentation de l’histoire des juifs de Mayence, est l’œuvre de l’architecte Manuel Herz.

Sa forme architecturale très complexe évoque le mot « kedousha », signifiant « la sainteté ».

Cette communauté juive renaissante au tournant du 21e siècle permit aux quelques juifs encore présents à Worms de s’y joindre lors des célébrations religieuses et festives.

À proximité du musée Gutenberg, un lycée a été nommé en hommage à Anne Frank, sur lequel figure une œuvre warholienne avec son portrait en plusieurs couleurs.


Des Stolpersteine ont également été posées dans la ville.

L’ancien cimetière juif de Mayence est, avec celui de Worms, un lieu très important dans l’héritage culturel. Ils représentent parmi les plus anciens cimetières juifs existants en Europe.

En effet, celui de Mayence servit à partir du 11e siècle et cela jusqu’au 19e. Il est constitué de plusieurs sections, une nouvelle ayant été construite au 17e siècle. Elle fut utilisée jusqu’en 1881, avant l’ouverture du nouveau cimetière central de la ville.
A l’image de l’opéra voisin du quartier d’affaires, Francfort est avant tout une ville de rencontres, d’échanges fructueux dans tous les domaines et entre différentes populations depuis le Moyen-Age, mais aussi le témoin et l’acteur d’une grande violence comme ce fut le cas pendant la Shoah.

De Goethe à l’Université de haut niveau qui porte son nom, de la rivière du Main qu’elle tutoie le long des musées et quartiers reconstruits, à son aéroport international, 4e plus grand dans le monde, même rang européen en matière de place financière, cette ville de moins d’un million d’habitants offre aux visiteurs (re)découvertes et inspiration, entre le passé et le futur, thème si cher à Hannah Arendt, comme cette vision artistique de David et Goliath posée en plein quartier de shopping…

Histoire
La présence juive à Francfort est très ancienne. Elle semble remonter au 12e siècle. Les plus anciennes résidences étaient situées au centre de celle-ci. Ville libre de l’Empire, Francfort accueille les juifs dès 1150, essentiellement des marchands originaires de Worms. Au fil du temps, ils furent victimes de pogroms, chassés et protégés selon les décisions politiques en cours.
En 1460, le Conseil municipal de Francfort décida d’établir un ghetto juif. Durant les deux années qui suivirent, la centaine de Juifs de Francfort furent obligés de déménager dans ce qui est connu aujourd’hui comme la Judengasse (« ruelle des Juifs »). Un secteur de la ville séparé du reste par des murs, où furent entassés jusqu’à 3000 personnes en 1610. Des grandes yeshivot s’y développèrent attirant, comme dans les villes du Rhin, des étudiants de toute l’Europe.
Malgré ces restrictions, les interactions entre Juifs et chrétiens furent nombreuses. Et dans divers domaines, qu’il s’agisse du travail, de l’artisanat, notamment la production d’objets rituels juifs par des artisans chrétiens. Mais également des rencontres d’ordre théologique entre penseurs juifs et chrétiens. Sans oublier les moments de célébration et de retrouvailles dans des établissements de la ville.
Forcée de vivre dans le ghetto, des institutions furent développées afin de gérer les affaires sociales, éducatives et religieuses. Dans le cadre de cette vie coupée par les portes du ghetto, les métiers se diversifièrent, que ce soit dans le commerce, l’artisanat, l’enseignement, les employés de maison… Bien qu’à partir du 17e siècle, de nombreux Juifs travaillaient comme marchands, notamment sur les foires, échangeant textile, épices et métaux.

Dans les années 1980, des documents anciens écrits en yiddish ont été retrouvés dans une geniza de la synagogue de Veitshöchheim. La production littéraire et musicale fut très riche pendant ces années de vie dans le ghetto.
Ce n’est qu’au tournant du dix-neuvième siècle que les juifs furent autorisés à quitter ce ghetto. Un siècle durant lequel Francfort devint un des lieux d’édition principaux d’Europe d’œuvres en yiddish. La continuité d’échanges et inspirations mutuelles entre populations juives et chrétiennes se poursuivit dans les domaines littéraires et musicaux. Ainsi, par exemple, des chants juifs étaient composés sur des mélodies de musique chrétienne et des contes chrétiens inspirés par des œuvres yiddish.
A cette époque, Mayer Amschel Rothschild (1744-1812), étudiant issu d’une famille modeste, s’intéressa aux mathématiques et à la finance. Il effectua un stage dans une banque de Hanovre. Devenant gérant de fortune au sein du ghetto de Francfort, il diversifia ses activités et se fit un nom dans le monde de la finance et au sein de la cour. Ses cinq fils s’installèrent à Londres (Nathan), Paris (James), Vienne (Salomon), Naples (Carl) et Francfort (Amschel) pour y développer la dynastie connue aussi bien pour sa réussite que pour sa générosité.

Officiellement autorisé à vivre dans d’autres quartiers que la Judengasse en 1811, les Juifs déménagèrent d’abord dans le quartier environnant de l’Ostend, puis un peu plus loin dans la ville. Ils prirent pleinement part au développement culturel, éducatif, associatif et économique de Francfort. Mais ce n’est qu’en 1864 qu’ils furent considérés comme des citoyens pleinement égaux.
Une évolution graduelle que l’on peut observer notamment dans les œuvres de Moritz Daniel Oppenheim (1800-1882), le premier peintre juif à obtenir une éducation artistique académique en Allemagne. On voit dans ses tableaux à la fois des scènes familiales, religieuses et des portraits. Mais aussi des personnages participant à la vie culturelle et littéraire, représentant la manière dont Oppenheim et de nombreux Juifs embrassèrent pleinement l’émancipation qui leur tendait enfin les bras. Dans cet esprit des rencontres, un tableau d’Oppenheim datant de 1864 présente la visite de Felix Mendelssohn Bartholdy à Goethe. Le musicien juif étant fier de jouer pour le prince des poètes.

La vie religieuse juive de Francfort fut marquée à l’époque par cette volonté d’initiative et de diversité. Ainsi, au 19e siècle, le Rabbin Léopold Stein introduisit des réformes libérales. Ce qui encouragea des débats théologiques passionnant avec Samson Raphael Hirsch, de tendance néo-orthodoxe. Différents courants et lieu d’études apparurent alors, dont la « Libre Maison d’étude juive » où enseigna Martin Buber (1878-1965), dirigée par Franz Rosenzweig.
Trois synagogues représentèrent alors cette confrontation intellectuelle foisonnante : la synagogue massorti de Börneplatz et son rabbin Nehemias Anton Nobel (1871-1922) inaugurée en 1882 ; et la synagogue Friedberger de tendance néo-orthodoxe du rabbin Salomon Breuer (1850-1926) inaugurée en 1907 ; et la synagogue libérale de Westend, au sein de laquelle le Rabbin Georg Salzberger (1882-1975) créa un centre d’éducation juif pour adultes, inaugurée en 1910. Lorsque fut déclenchée la Première Guerre mondiale, de nombreux juifs de Francfort combattirent sous les drapeaux.

Un grand bouleversement intellectuel émergea dans les années 1920 à l’Université de Francfort avec la rencontre au sein de l’Institut de recherche sociale de grands penseurs, en majorité juifs, dont les principaux sont Max Horkheimer, Theodor W. Adorno, Herbert Marcuse et Erich Fromm. Encourageant une approche pluridisciplinaire et une vision marxiste non dogmatique, ainsi que la prise en compte de l’évolution de la société et les chaos provoqués par les guerres, nait l’Ecole de Francfort, dont le plus célèbre disciple est aujourd’hui Jürgen Habermas.
Près de 30 000 Juifs vivaient à Francfort dans l’entre-deux-guerres. Lorsque les nazis arrivèrent au pouvoir en 1933, ils ne tardèrent pas à imposer des restrictions aux juifs, les excluant petit à petit de la société à laquelle ils avaient pourtant contribué avec tant d’enthousiasme et dans tant de domaines. Suivirent les pogroms de 1938 et les déportations à partir de 1941.
Seuls quelques centaines de juifs réussirent à se cacher, protégés par des Justes. Une partie des autres réussirent à fuir, mais plus de 10 000 furent assassinés dans les camps de concentration et d’extermination. Les synagogues de la Borneplatz et de Friedberg Anlange furent détruites lors de la Nuit de Cristal du 9 au 10 novembre 1938, ainsi que le musée des Antiquités juives, fondé en 1922. Bien qu’une grande partie de sa collection fût détruite par les nazis, près de 1000 objets ont pu être retrouvés et incorporés dans le musée actuel.
80% des immeubles de la ville de Francfort furent détruits ou très endommagés. L’Amérique joua un grand rôle dans la reconstruction de la ville, ainsi que dans la lutte contre l’antisémitisme. Un processus de dénazification entrepris à travers le pays.

La veille de Rosh Hashanah 1945, le Rabbin Leopold Neuhaus organisa les prières dans ce qu’il resta de la synagogue de Westend, dont l’intérieur fut détruit par le pogrom de 1938. Des prières qui se déroulèrent face à quelques survivants et des soldats juifs américains stationnés dans la ville. En 1948, la ville, ainsi que la région, s’engagèrent à subventionner les réparations. Elle fut donc reconstruite et réinaugurée en 1950. Elle accueille aujourd’hui un rite orthodoxe. Une salle se trouvant à l’intérieur du bâtiment accueille un rite libéral.
Le souci d’honorer la mémoire des nombreuses victimes de la Shoah, mais aussi de souligner l’importance de l’histoire juive de Francfort, motiva la création d’une commission qui enquêta sur cette histoire, avec l’aide de des autorités locales. Créée en 1961, cette commission inclut Max Horkheimer, le rabbin Kurt Wilhelm et le rabbin Georg Salzberger.

La vie juive renait à Francfort principalement dans les années 1980. Un des faits qui marqua cela fut la création d’un centre communautaire à quelques pas de la synagogue Westend . Comme à Vienne, on trouve à Francfort deux musées : le Judengasse , consacré à la vie juive médiévale et le Judisches , consacré à la vie juive contemporaine. Ce dernier, aménagé dans l’ancien Palais Rothschild, fut inauguré le 9 novembre 1988 en présence du chancelier allemand Helmut Kohl, marquant le 50e anniversaire du pogrom de 1938.
En 1987, lors de travaux d’aménagement effectués sur la Borneplatz de Francfort où se situait une des anciennes synagogues, 19 anciennes maisons de la Judengasse furent découvertes. Une opposition se manifesta entre la mairie, qui souhaitait y aménager un immeuble municipal, et des personnes désirant préserver ces rares traces de l’ancien ghetto juif. Un compromis fut trouvé et 5 de ces anciens maisons furent incluses dans le musée Judengasse qui ouvrit en 1992, des habitations qui constituent l’élément central du musée.

Suite à la fin de la guerre Froide, de nombreux juifs d’Europe de l’Est s’établirent à Francfort. On estime aujourd’hui à plus de 6000 le nombre de juifs vivant à Francfort.
En 2021, l’Université Goethe de Frankfort a inauguré un département d’études juives, nommé en hommage à Martin Buber et Franz Rosenzweig. Une inauguration qui s’est déroulée le jour du 143e anniversaire de Buber, lequel avait enseigné jadis dans cette université avant d’en être chassé par le régime nazi.
Comme ce fut le cas dans de nombreux autres lieux en Europe, les Juifs de Francfort subirent une montée de l’antisémitisme au tournant du 21e siècle. Un antisémitisme de plus en plus violent depuis le pogrom du 7 octobre 2023. Parmi les victimes régulières de ces attaques, l’équipe du Maccabi Francfort.
Le Musée Judengasse
Les portes franchies à l’entrée du musée et vous plingez dans l’histoire du lieu précis. Notamment le jour où la synagogue a été brûlée sur la Börneplatz. Puis, les débats concernant le réaménagement de cet espace. Une salle présente ensuite les évolutions du quartier au fil du temps. D’anciens objets sont présentés, notamment une menorah, une Megilat Esther et la Hagadah de Pessah afin d’expliquer les rituels juifs.

Des panneaux présentent les mesures de restriction immobilières et les fortes taxations imposées à la population juive lorsqu’elle vivait dans le ghetto. Des décrets témoignent de l’évolution du statut des Juifs de Francfort.
Élément très intéressant du musée, une table sur laquelle est dessiné l’ancien ghetto juif. Munis d’un casque, vous pouvez brancher la prise dans un des trous se référant aux différentes habitations, institutions et commerces. Des enregistrements racontent la vie au quotidien des Juifs de l’époque : les lieux, leurs fonctions, mais aussi certains personnages.

Le musée est sur 2 niveaux. Celui d’en dessous accueille les fondations d’anciennes bâtisses (maisons, puit, mikvé…) du ghetto et les raisons fondatrices de ce musée. Des petits livres posés à côté des sièges expliquent la vie des juifs d’antan, ainsi que certains rites, comme par exemple la préparation des matzots. Parmi les objets présentés à ce niveau, certains retrouvés lors des travaux d’aménagement du quartier, notamment un coussin de circoncision datant du 18e siècle.
Un espace est dédié à la littérature et à la musique avec la présentation de 13 anciens parchemins. Parmi eux, un livre du 18e siècle, retrouvé dans une gueniza, Avec un dessin pour illustrer le texte d’un personnage qui fait penser à un petit peu à un super héros de Marvel. Parmi les objets très précieux, mahzor du 14e siècle.

Le musée effectue ici un grand effort pour humaniser la vie ancienne des juifs du ghetto, racontant des histoires personnelles avec des objets qui le sont tout autant. Avec des cartes présentant les lieux où ils habitaient, dans cet effort de reconstitution. Ce qui permet de montrer que les traces du passé ne se limitent pas aux pierres. Dans les immeubles qu’elles constituaient et entre les murs se partagèrent des écrits, des histoires, des paroles… par des personnages tantôt en couleurs tantôt pastel, rassurés ou inquiets selon les époques.

En sortant de la salle, des panneaux racontent l’histoire des juifs de Francfort à travers les siècles, résumée à travers quelques photos de lieux et moments emblématiques. Et d’autres curiosités dans cette allée, comme ces tuyaux utilisés en guise de canalisations.

Une fois la visite du musée terminée, en prenant à droite, vous longez l’enceinte de l’ancien cimetière juif sur laquelle sont posées des pierres de souvenirs pour les victimes de la Shoah. Afin de visiter ce lieu, vous devez demander au musée une clé vous permettant d’y avoir accès. Comme dans l’ancien cimetière juif de Prague ou d’autres villes allemandes telle Worms, de très vieilles pierres tombales sont présentes.

Entre les deux musées juifs de la ville se trouve la « nouvelle vieille ville », restaurée après la guerre. N’hésitez pas à prendre le temps de vous y balader pour découvrir une forte densité de monuments : bâtiments officiels, lieux de culte et musées.

Notamment la très belle cathédrale impériale de Francfort avec ses impressionnants orgues.

Mais aussi le centre du marché historique de Römerberg avec ses attractions festives été comme hiver, le musée Historique de Francfort, le musée de la Caricature et le musée Goethe.

Une plaque de bronze conçue par le tailleur de pierre Uwe Risch, posée en 2000 au 22 Braubachstrasse commémore la persécution des Sinti et des Roms par les nazis.

Le musée Judisches
La visite débute au 3e étage, un nouvel étage consacré à la vie contemporaine juive de Francfort. On y est accueilli par un écran sur lequel on voit différents visages appartenant à différentes générations. Et puis, en entrant dans la pièce, est racontée l’histoire de ces personnages, avec d’anciennes photos et des objets personnels. Parmi ces photos émouvantes et étonnantes, celle de la visite de l’équipe de hockey sur glace d’Allemagne au Maccabiades de 2017. On les voit poser devant le Mur de Jérusalem en uniforme, dont certains mêmes avec les patins aux pieds !

On traverse le 20e siècle. En évoquant les discriminations, l’antisémitisme, la libération de Francfort par les soldats américains, leur travail pour dénazifier le pays et ses institutions. Mais aussi des histoires personnelles de gens qui ont réussi à survivre et ont eu confiance en un retour possible en Allemagne, dans le cadre d’une reconstruction éventuelle d’une vie juive à Francfort. Parmi les symboles contemporains de cette reconstruction, le Maccabi Francfort, avec ses heures de gloires, mais aussi les attaques antisémites dont il fut victime et continue de l’être régulièrement.
Autre thématique contemporaine complexe abordée : la restitution des œuvres d’art spoliées pendant la guerre. Le musée présente l’histoire d’un tableau de Matisse, volé et récupéré bien plus tard…
En sortant de la grande salle principale, on arrive sur une série de petites salles. La première desquelles raconte comment le bâtiment fut légué par la famille Rothschild afin de servir de musée juif. Ensuite sont présentés les tableaux du peintre Daniel Moritz Oppenheim. Des œuvres bibliques, dont un impressionnant Moïse, ainsi que celles racontant la vie juive de Francfort au 19e siècle et la grande rencontre entre Mendelssohn Bartholdy et Goethe.

Les grands esprits n’accouchant pas toujours de grandes idées. La salle suivante est dédiée aux phrases antisémites tristement célèbres de penseurs référentiels à travers le temps. Puis, on découvre des œuvres d’artistes locaux contemporains, ainsi que la vie d’habitants juif de Francfort au 20e siècle, à travers une série de cartes postales derrière lesquelles est racontée chaque histoire.

Le 2e étage du musée est consacré à la tradition juive et aux rituels : Un verre de kiddouch, un shofar, deux grandes menoroth et une parokhet. Une autre salle présente l’histoire de la pensée juive à Francfort qui, comme nous l’avons indiqué auparavant, fut assez riche. Et si vous avez toujours des doutes et des interrogations concernant les différents courants de pensée juive qui sont nés et qui ont se sont développés à Francfort, dans une belle harmonie, vous pouvez « poser une question à rabbin ». Mêlant pensée biblique et outils technologique, un dispositif vous permet de poser des questions à des rabbins de courants différents sur des thématiques qui le sont tout autant. Et ainsi écouter leurs paroles enregistrées sur ces thèmes-là, voire de les comparer et de vous nourrir de plusieurs interprétations.

La première pièce du premier étage est dédiée à la famille Senger. Des photos et témoignages ainsi que le livre Kaiserhofstrasse 12, racontant l’histoire de cette famille d’origine russe et ce qui leur arriva pendant la guerre.
Une autre salle présente brièvement l’histoire de la dynastie des Rothschild. Ses origines à Francfort et son développement en Europe, ainsi que toutes les activités dans lesquelles la famille s’est investie. Parmi ces activités, la principale étant probablement la tsedaka. Ce terme signifiant « justice » et non « charité », comme il est communément traduit. Justice de ceux qui ont la chance de réussir dans leur domaine, tout en étant généreux avec autrui par les dons financiers, celui de leur temps et/ou de leur talent. On y découvre donc l’histoire des cinq fils Rothschild, mais aussi des femmes de la famille qui ont joué un grand rôle.

La visite du musée se termine dans la salle dédiée à Anne Frank (1929-1945). À l’histoire de la jeune fille et à celle de son père qui, après-guerre, partagea les écrits de sa fille dans une démarche de Tikoun olam.
D’Est en Ouest
Lors de la tristement célèbre Nuit de cristal, du 9 au 10 novembre 1938, les nazis déclenchèrent des pogroms dans tout le pays et détruisirent de nombreuses synagogues, habitations et commerces appartenant à des juifs allemands. Parmi les synagogues détruites, celle de Friedberger Anlage . Sur les ruines de laquelle les autorités firent construire un bunker en 1942. Elle était située dans le quartier de l’Ostend, développé au milieu du 19e siècle afin d’accueillir des commerçants et artisans des classes moyennes et populaires.

De nombreux juifs s’y étaient installés dès le début du 19e siècle, lorsqu’ils furent autorisés à sortir du ghetto. Ainsi, vers 1895, les juifs constituèrent près d’un quart de la population du quartier.
Après la guerre, le bunker fut transformé en lieu de commémoration, avec un espace racontant l’histoire des juifs dans ce quartier du début du 19e siècle à la Seconde Guerre mondiale. Sur ses murs, des références aux kibbutzim victimes du pogrom du 7 octobre 2023.

Si les juifs retournèrent timidement dans l’Ostend après-guerre, ils choisirent plus souvent de s’installer dans le Westend. En effet, seules quelques institutions sociales demeurent dans l’Ostend, ainsi que la synagogue de Baumweg .

Cet ancien immeuble accueillant un jardin d’enfants juifs confisqué par les nazis, devint une synagogue à partir de 1945.

C’est donc le quartier de Westend qui regroupe la majorité des institutions contemporaines, comme le précise le site de la communauté juive de Francfort. La synagogue est indéniablement une des plus belles d’Europe, restaurée dans la magnificence de son origine quelques décennies plus tard.

A quelques centaines de mètres au-dessus de la synagogue se trouve le très beau campus de l’université Goethe de Francfort. Avec ses bâtiments, chacun dédié à une faculté et ses longues pelouses qui les dessinent, dans un esprit de légère insouciance. Un campus à l’américaine avec une pensée allemande profonde, qui rappelle le campus de Ramat Aviv et celui l’université Hébraïque de Jérusalem.

Sur la Theodor W. Adorno Platz , nommée en hommage à un des fondateurs de l’école de Francfort, se trouve un bureau, une chaise, une lampe et d’autres objets posés sur le bureau, le tout sous une cloche de verre. Une œuvre de l’artiste russe Vadim Zakharov, inaugurée en 2003 afin de marquer les 100 ans du penseur.

A une vingtaine de mètres, une autre œuvre intrigante et symbole de l’ouverture d’esprit et d’échange de la ville et en particulier de son université, le « Body of Knowledge », créé par l’artiste espagnol James Plensa en 2010, composée de lettres de différents alphabets.

En remontant la Theodor W. Adorno platz et la Max Horkheimer strasse, à deux kilomètres au nord, dans le quartier de Dornbusch, est situé le parc Sinaï. A 300 mètres duquel vous verrez, sur la Ganghoferstrasse, l’ancienne maison de la famille d’Anne Frank avant leur déménagement à Amsterdam en 1934.

Trois arrêts de tram séparent l’université Goethe de la maison d’Anne Frank, moyen de transport également pratique pour revenir au centre-ville.

Et qui sait, vous serez peut-être dans un tram portant les couleurs du Maccabi Francfort…
Cette petite ville possède le mikveh le plus profond d’Allemagne : soixante-douze marches creusées dans le basalte conduisent à un bassin d’eau vive situé à 25 m de profondeur.
Tout en bas, une stèle dédiée au constructeur de ce bain indique l’année de son inauguration : 1260.

Une ouverture octogonale dans la coupole gothique, unique source de lumière, donne l’illusion que la lune se reflète constamment dans l’eau sombre.
Autrefois, une communauté importante, elle a été décimée pendant la guerre. Parmi les personnalités nées dans la ville, on trouve l’entrepreneur Ernest Oppenheimer.


Redevenue la capitale de l’Allemagne unifiée, Berlin est aussi aujourd’hui la ville qui compte la plus importante communauté juive du pays (près de 11 000 personnes). On est loin, certes, des quelque 170 000 juifs qui y vivaient à la veille de la prise de pouvoir par Hitler en 1933, et on peut légitimement penser que les fantômes de l’histoire erreront encore longtemps dans cette ville qui fut jadis, avec Vienne, un centre majeur de la vie économique, intellectuelle et religieuse des juifs de langue allemande. Quelques monuments et des cimetières (notamment le Weissensee, l’un des plus grands cimetières juifs d’Europe) ont échappé aux destructions nazies et aux bombardements alliés de 1945.

La volonté de l’Allemagne nouvelle d’assumer la totalité de son héritage, y compris sa partie la plus sombre et la plus honteuse, et de faire son mea culpa pour les horreurs commises au nom du peuple allemand, a été à l’origine de l’édification ou de la réédification de synagogues, de centres communautaires, d’écoles et de monuments du souvenir dans tous les quartiers de la ville.
Berlin – Viens je t’emmène, Lise Gutmann
Le devoir de mémoire
En 1989, la chute du Mur a permis de reconstituer une partie de l’ancien quartier juif de l’Oranienburgerstrasse. Inauguré en 1999, le Musée juif de Berlin , a été conçu par l’architecte Daniel Libeskind.

Plus modestement, à Schöneberg, dans le « quartier bavarois » où vivaient jadis de nombreux juifs, quatre-vingts panneaux ont été accrochés aux lampadaires, sur lesquels sont rappelées les étapes de la persécution des juifs sous le nazisme, ou bien sont imprimés des extraits de lettres d’habitants du quartier ayant été déportés.
Dans toute la ville, des plaques commémoratives témoignent de cette vie juive disparue : à Steglitz, par exemple, sur un panneau-miroir de 3,80 m de haut et de 12 m de long, les noms des 3186 juifs habitant le quartier en 1933 ont été gravés.

Après de longs débats, le Parlement allemand a accepté, le 25 juin 1999, l’édification d’un monument du souvenir de l’Holocauste près de la porte de Brandebourg; la réalisation en a été confiée à l’architecte américain Eisenman : il se compose de 2700 piliers de béton de différentes hauteurs, et d’un centre d’information sur la persécution des juifs sous le national-socialisme.
En revanche, les traces de la présence ancienne des juifs à Berlin, attestée dès 1295, c’est-à-dire moins de soixante ans après la fondation de la ville, ont été effacées soit par les incendies qui ravagèrent ce gros village à ses débuts, soit à l’occasion des diverses expulsions que la communauté subit au cours des siècles, soit enfin dans la tourmente de la Seconde Guerre mondiale.

Sur les lieux où les principales institutions de l’appareil de terreur nazi (Gestapo, Reichsführung SS, Sicherheitsdienst) avaient leur siège central, a été installée la fondation Stiftung Topographie des Terrors . Cette institution, financée par le gouvernement fédéral et le Land de Berlin, se propose de faire connaître in situ le fonctionnement de l’État nazi. En attendant le bâtiment définitif, dont la conception a été confiée à l’architecte suisse Peter Zumthor, la fondation organise des expositions en plein air et des visites guidées du quartier.
Le Anne Frank Zentrum poursuit le même objectif pédagogique que la Maison d’Anne Frank d’Amsterdam avec une orientation plus marquée vers l’information en direction des adolescents, étudiants et lycéens.

Le centre de Berlin
Jusqu’en 1989, le cœur historique de Berlin était situé sur le territoire de la République démocratique allemande (RDA), séparée par un mur de la partie occidentale de la ville, depuis 1961. C’est là que Frédéric II le Grand fit construire son palais et que se concentra l’activité politique et économique de la capitale de la Prusse. C’est également dans ce quartier que fut édifiée, en 1714, la première synagogue de Berlin (sur la Heidereuterstrasse, aujourd’hui Rosenstrasse). Épargnée lors de la Nuit de cristal, car elle avait déjà été réquisitionnée par la poste allemande, elle a été complètement détruite par les bombardements de 1945.
L’Oranienburgerstrasse n’est pas à proprement parler un « quartier juif », dans la mesure où les juifs y vivant n’ont jamais dépassé 10 % de la population juive de la ville. Sous l’Empire et Weimar, cette rue du centre de Berlin et les artères avoisinantes étaient le point de ralliement des émigrants juifs de l’Est portant caftans, longues barbes et papillotes, et qui étaient donc plus « visibles» que leurs coreligionnaires allemands assimilés. La restauration de ce quartier, notamment de la Grande Synagogue, vient d’être achevée.

La Grande Synagogue , conçue par l’architecte Eduard Knoblauch dans le style mauresque, très prisé à l’époque, est inaugurée en 1866. Elle faisait la fierté de l’opulente communauté juive berlinoise avec sa coupole dorée de 50 m de haut et sa capacité à accueillir 1800 fidèles.
Lors de la Nuit de cristal, le 9 novembre 1938, elle ne fut pas dévastée grâce à l’action courageuse d’un brigadier de police, Wilhelm Krützfeld qui, avec quelques hommes, fit reculer les hordes de SA en prétendant que la synagogue avait été placée sous protection policière en raison des richesses artistiques qu’elle contenait. Fermée par les nazis en 1940, elle fut transformée en entrepôt, puis gravement endommagée par un bombardement en 1943.
À la fin des années 1980, la RDA, désireuse de modifier son image auprès des juifs et d’Israël, commença la rénovation de la synagogue et édifia un centre culturel juif à proximité. Autour de la synagogue, des cafés et des restaurants, sans être tous casher, servent les boissons et plats traditionnels des juifs de l’Est, auxquels s’ajoutent quelques fleurons de la gastronomie israélienne.

À la Jüdische Galerie sont exposés des tableaux de peintres juifs issus pour la plupart de l’ex-URSS, ainsi que des objets artisanaux relatifs au culte, neufs ou anciens.
Achevé en 1765, le palais Ephraïm appartenait au financier Veitel Heine Ephraïm (1703-1775), qui fut le banquier de Frédéric II le Grand. Démolie lors de grands travaux d’urbanisme de 1935, la façade rococo est démontée et mise à l’abri des bombardements. En 1987, elle est remontée dans le cadre des opérations de rénovation du centre de Berlin entreprises par le gouvernement de la RDA. Le palais abrite aujourd’hui une annexe du musée des Beaux-Arts, comprenant notamment une collection de monnaies anciennes.
Le Klezmer à Berlin
À Berlin-Est, avant la chute du Mur, quelques jeunes musiciens s’étaient mis, par provocation, à jouer de la musique klezmer, ce mélange de musique juive d’Europe centrale et de jazz américain, issu de la rencontre de ces deux styles dans les quartiers juifs de New York. Cette musique, souterraine du temps du communisme, est devenue très populaire à Berlin. Le Theater in den Hackeschen Höfen propose, presque tous les lundi et samedi soir, des concerts klezmer.
Charlottenburg – Wilmersdorf
On est ici au cœur de l’ancien Berlin-Ouest, dont l’artère principale est le Kurfürstendamm. Dans ce quartier, se trouve le Centre administratif de la communauté de Berlin , avec ses institutions sociales et culturelles.
La synagogue de la Pestalozzistrasse a été édifiée en 1912 à l’initiative de Betty Sophie Jacobson, une riche commerçante du quartier.

Le 9 novembre 1938, elle faillit disparaître dans un incendie, mais les pompiers éteignirent les flammes, craignant que le feu ne se propageât aux immeubles alentour.
L’intérieur de la synagogue n’a subi que de légers dommages, et elle a pu être rouverte dès 1946. On y célèbre aujourd’hui des offices selon le rite libéral, avec chœurs mixtes et musique d’orgue.
La synagogue de la Joachimstaler strasse est une ancienne salle de conférence du B’nai Brith. Des offices de rite orthodoxe y sont actuellement célébrés.

Le Musée juif de Berlin présente une exposition permanente sur l’histoire des juifs de Berlin, et abrite le fond d’objets d’art, religieux ou profanes, qui était conservé dans l’ancien Musée juif, une institution privée ouverte jusqu’en 1938. Ce musée est avant tout remarquable par l’architecture « métaphorique » de Daniel Libeskind, avec ses façades métalliques déchirées de fentes, évoquant un puissant ébranlement dont il aurait été victime.
Le cimetière de la Schönhauserallee , inauguré en 1827, renferme les tombes de personnalités qui animèrent la vie économique et culturelle du Berlin juif de la fin du XIXe et du début du XXe siècle, comme les banquiers Gerson von Bleichröder et Joseph Mendelssohn, le musicien Giacomo Meyerbeer, ou le peintre Max Liebermann.

Avec ses 40 hectares, le Weissensee est l’un des plus grands cimetières juifs d’Europe. Ouvert en 1880, dévasté pendant la Seconde Guerre mondiale, il fut rénové petit à petit par les autorités de la RDA. La réunification accéléra cette réhabilitation. Dans l’allée d’honneur, on trouve les tombes d’éminentes personnalités juives du Berlin d’avant-guerre: le philosophe Hermann Cohen, le théologien Léo Baeck, les patrons de presse Thedor Wolff et Rudolf Mosse, l’éditeur Samuel Fischer.
La Literaturhandlung est la plus importante librairie juive de tout l’espace germanophone (avec des succursales à Munich et à Vienne). On y trouve également des objets rituels (mezouzot, chandeliers, châles de prières…), ainsi que des cartes de vœux pour les fêtes juives. La galerie d’art Omanut est également un lieu culturel intéressant.
Les cafés et les restaurants ne manquent pas. Salomons Bagels est une minuscule échoppe vouée aux Bagels, cette « sagesse comestible » selon le patron des lieux, Andreas Pfeffer.
La communauté juive de Berlin compte en 2025 plus de 10 000 membres, ce qui en fait la plus nombreuse du pays. Signe de la renaissance et du développement du judaïsme berlinois, une synagogue est en reconstruction, sur les lieux où elle avait été détruite pendant la Shoah, dans le quartier de Kreuzberg. Elle devrait être inaugurée en 2026 par Beate Hammett, la fille d’Alexander Beer, l’architecte responsable de la construction de la synagogue originale.
Liège est une ville connue comme Gand pour sa grande population universitaire, mais aussi pour sa cathédrale, ses gaufres et ses cinéastes, en particulier les frères Dardenne. La présence juive liégeoise semble dater du Moyen Age. Des documents du 11e siècle attestent d’un conflit religieux local entre un évêque et un médecin juif. Le cas d’un prêtre guéri par un médecin juif est mentionné en 1138. Mais, au fil des siècles suivants, les principales mentions de présence juive sont liées à des conversions locales au christianisme.

Ce n’est qu’à partir de la présence française au 18e siècle que la population juive s’y établit durablement. Ainsi, on recense 24 juifs en 1811, puis une vingtaine de familles juives à la fin de ce siècle, principalement originaires des Pays-Bas, du Limbourg hollandais, d’Allemagne et d’Alsace-Lorraine. La plus ancienne tombe située dans le cimetière juif date de cette époque. La reconnaissance formelle de la communauté juive de Liège n’a lieu qu’en 1876.
Une nouvelle Synagogue de Liège , marquant cette reconnaissance et cette évolution démographique, est conçue dans un mélange de styles par l’architecte Joseph Rémont, et fut inaugurée en 1899. Située à proximité du Palais des Congrès, classée aujourd’hui comme monument historique par la Région wallonne.
La population juive liégeoise augmente au début du 20e siècle suite à l’arrivée de migrants d’Europe de l’Est travaillant dans le bassin industriel très prospère de l’époque. Mais aussi d’étudiants belges et français attirés par la qualité de son université et la vie liégeoise agréable. En 1914, la communauté, composée de Hollandais et d’Alsaciens, se voit renforcée par des juifs russes qui avaient été faits prisonniers par les Allemands. Certains d’entre eux s’installent à Liège dès 1917. La haute réputation internationale de l’École des mines attira de nombreux juifs d’Europe de l’Est entre les deux guerres.
À la veille de la Shoah, il y avait près de 3000 juifs liégeois. Près d’un tiers furent assassinés pendant la Shoah. À la Libération, il ne restait plus que 1200 juifs dans la ville. Des monuments de la synagogue commémorent les victimes de la Shoah et rendent aussi hommage aux résistants.
Un chiffre qui déclina au fil du temps, atteignant 594 en 1959. Un sursaut permit à la communauté d’atteindre 1500 personnes en 1968, mais déclina à nouveau vers 1000 au début des années 1980. La synagogue sert depuis également de lieu de rencontres culturelles.
En raison de l’insalubrité et de la vétusté des immeubles jouxtant Foyer culturel juif et d’un projet de construction, celui-ci est fermé temporairement depuis 2022.
Des petites communautés existèrent également dans les villes environnantes de Seraing et Spa. La première en raison des travailleurs du bassin industriel qui s’y établirent au début du 20e siècle et la seconde dans le cadre des séjours balnéaires de cette ville connue pour son eau.
Sources, Musée juif de Belgique, Consistoire, Encyclopaedia Judaica, Politique et Religion : le Consistoire Central de Belgique au XIXe siècle
Michel Kichka a dédié son plus bel album à son père, Henri Kichka, à ce témoignage si lourd à partager de la Shoah et à la (re)construction d’une famille juive de la région liégeoise. Ces dernières années, Henri Kichka était devenu un inlassable combattant pour le partage du témoignage de cette expérience auprès de nombreux lycéens belges.

Jguideeurope : Vous avez partagé votre histoire dans la bande dessinée Deuxième génération. Avec ses moments de bonheur et ses moments sombres liés à la guerre. Qu’est-ce qui motiva l’installation de votre famille à Seraing ?
Michel Kichka : Mon grand-père maternel s’y est installé avant la guerre, y a ouvert un commerce de confection, persuadé qu’il y avait de bonnes opportunités dans ce cœur économique de la Wallonie. Sa famille a pu se réfugier en Suisse sous l’occupation, puis est retournée à Seraing après un crochet par Bruxelles. Mon père et ma mère ont tenu une boutique de fringues à Seraing de 1952 ou 53 jusqu’à 1986.
Quels furent les lieux importants qui, pour vos parents, puis pour vous, évoquaient la culture juive à Liège et dans la région ?
Le Foyer juif de Liège (aujourd’hui, on dirait centre communautaire) où la communauté se retrouvait pour des célébrations et pour des rencontres était un lieu important. La synagogue de Liège aussi, il n’y en avait qu’une. On y célébrait les fêtes, les mariages et les bar et bat mitsva mixtes. Et puis, le Ken (local) de l’Hachomer Hatzaïr, situé aux étages du Foyer.
La communauté était très homogène, majoritairement ashkénaze, composée de la génération de mes parents et grands-parents ayant survécu à la Shoah. La plupart des magasins de mode, hommes et femmes, étaient tenus par des familles juives en plein cœur de la ville qui, à l’époque de ma jeunesse, portait bien son nom : la Cité ardente !

Que reste-t-il aujourd’hui de cette histoire ?
Un de mes amis d’enfance, Thierry Rozenblum, a publié un livre à ce sujet, Une cité si ardente : les Juifs de Liège sous l’Occupation (Éditions Luc Pire, 2010). Il travaille en ce moment sur un second. Au fil du temps, la majorité des familles s’est installée à Bruxelles.
Michel Kichka, Deuxième génération : ce que je n’ai pas dit à mon père. Éditions Dargaud, 2012.
Charleroi est une ville connue pour avoir été un bassin houiller très important, mais aussi en tant que centre industriel. Depuis le déclin de ces industries, la ville a investi massivement dans le développement culturel et est notamment appréciée en tant que centre historique de la bande dessinée, l’imprimeur marcinellois Jean Dupuis créant en 1938 le magazine Spirou.

La présence juive y est relativement récente, une communauté s’y constituant au lendemain de la Première Guerre mondiale. Des juifs venus en majorité d’Europe de l’Est pour travailler dans les mines de charbon de la région, à l’image d’autres arrivants de cette région ou d’Italie à l’époque.
Dans la génération suivante, les juifs s’intègrent à la ville et à la diversification des métiers, notamment dans l’artisanat, atteignant le nombre de 600 familles à la fin des années 1930. Une synagogue et des lieux socio-culturels sont ouverts à cette époque. La Shoah décimera une grande partie des juifs carolingiens.
Au lendemain de la Seconde Guerre mondiale, une petite communauté se reconstitue, laquelle inaugure une synagogue en 1963, située à la rue Pige-au-Croly. Le bâtiment sert également de centre communautaire. Par la suite, le bâtiment a accueilli un musée de la Mémoire des Justes. Lequel organise des visites pour des groupes scolaires afin de lutter contre la haine et l’oubli.
Une parcelle de cimetière juif est située au cimetière de Marcinelle , où l’on trouve aussi deux monuments en hommage aux victimes de la Shoah.
En novembre 2023, dans le cadre d’une très forte recrudescence des actes antisémites, quatre-vingt-neuf tombes situées dans le carré israélite du cimetière de Marcinelle ont été dégradées. De nombreuses étoiles de David ont été arrachées sur des tombes et jetées dans un coin du cimetière.
Sources : Consistoire de Belgique
Ostende est une ville balnéaire qui fut très appréciée des vacanciers britanniques depuis plusieurs siècles, comme en témoigne par exemple James Joyce. Mais aussi des milieux populaires belges. Le peintre ostendais James Ensor présente dans son œuvre les personnages et les paysages de la ville. Ce fut également le lieu de naissance du chanteur belge Arno.
Dans cette belle ville côtière, la synagogue est très fréquentée l’été. Elle a été édifiée en partie grâce à de riches financiers. Jusqu’à 300 familles venaient y prier. De célèbres personnalités juives firent des séjours à Ostende, dont Marc Chagall, Albert Einstein…

La présence juive ostendaise est notée depuis le 16e siècle, mais se consolide surtout au tournant du 19e. Les autorités belges accordent rapidement après l’indépendance du pays la reconnaissance des communautés juives, dès 1831. Néanmoins, celle d’Ostende ne bénéficiera pas de cette reconnaissance, probablement à cause de sa petite taille.
La ville côtière attire de nombreux touristes, ainsi que des Belges cherchant une vie plus agréable, ce qui motive aussi parmi eux certains juifs. Ainsi, à la fin du 19e siècle, quelque 300 familles juives y séjournent pendant la période estivale. Une centaine de juifs y habitent alors. Le 10 décembre 1910, la communauté juive ostendaise, reconnue comme telle par les autorités depuis 1904, obtient le permis de construire une synagogue. Elle est conçue par l’architecte Joseph De Lange et inaugurée le 29 aout 1911. De style roman, inspirée par les synagogues de Francfort, Stuttgart et Strasbourg, elle est située place Philippe de Maastricht. Elle peut accueillir jusqu’à 600 personnes. Cette synagogue a la particularité d’être peu fréquentée par les juifs. Elle est devenue le lieu de visite favori des touristes, du fait de sa beauté et de ses proportions. Elle est d’ailleurs soutenue par des cotisations de non-juifs. C’est la seule synagogue de Flandre occidentale à posséder une façade sur rue.
La population juive d’Ostende double durant l’entre-deux-guerres. La Shoah fera de nombreuses victimes parmi les juifs ostendais. Néanmoins, la communauté sera reconstruite après-guerre et la synagogue toujours maintenue en activité.
Sources : Consistoire, Politique et Religion : le Consistoire Central de Belgique au XIXe siècle
Dernier véritable shtetl d’Europe occidentale, cette ville se caractérise par l’orthodoxie et l’industrie diamantaire. Environ 80 % des juifs anversois vivaient, il y a 20 ans encore, de l’industrie du diamant, à une époque où plus de la moitié de la production mondiale transitait par les quelques rues à proximité de la gare centrale.

L’histoire des juifs d’Anvers constitue un grand roman du XXe siècle. Avec ses moments forts, ses âges d’or, mais aussi la guerre et les crises économiques et politiques.
Surnommée la « Jérusalem du Nord » pour ses synagogues et yeshivoth ashkénazes, Anvers a pourtant été d’abord une communauté sépharade, fondée en 1526 par des juifs marranes issus du Portugal. La Belgique subissant depuis longtemps les conflits des grandes puissances voisines, le sort des juifs évolua selon les empires entre tolérance, expulsion, droits civiques accordés… Le rattachement de la Flandre à la Hollande avant l’indépendance de la Belgique en 1830, ainsi que le développement des ports, favorisa un rapprochement avec la communauté ashkénaze d’Amsterdam.
De 151 juifs en 1829, Anvers en compta 35 000 un siècle plus tard. Cela, principalement suite à la venue de juifs d’Europe de l’Est. Ils prirent une grande part au développement local de l’industrie du diamant. Cette évolution est principalement due à l’arrivée de juifs d’Europe de l’Est qui, en se rendant au port d’Anvers dans l’espoir d’embarquer, ont découvert les joies de la vie belge et la plupart d’entre eux ont décidé de rester. Le musée de la Red Star Line raconte l’histoire des deux millions de personnes d’origines et motivations diverses qui ont embarqué pour traverser l’océan Atlantique.
Les Juifs ont joué un rôle important dans l’essor de l’industrie du diamant au cours du 20e siècle, en participant à tous les aspects du commerce, en tant qu’ouvriers, vendeurs, inventeurs, bijoutiers… A tel point, que durant la Seconde Guerre mondiale, Cuba accueillit des juifs réfugiés tailleurs de diamants pour développer ce secteur sur l’île.

Le documentaire Cuba’s Forgotten Jewels réalisé par Judy Kreith et Robin Truesdale raconte cette fabuleuse histoire de centaines de juifs anversois autorisés à s’installer à La Havane pour y créer une taillerie de diamants. Mais, avant cela, ils doivent déjouer les pièges sur le chemin de l’exode, à travers la France, l’Espagne et le Portugal pour embarquer.
Les âges d’or, puisqu’on peut dire que deux générations en bénéficièrent, dans les années 1950 puis 1970, témoignèrent d’un formidable développement de la vie juive à Anvers. Anvers comptait d’ailleurs pendant ces décennies le plus grand nombre d’enfants en école juive au monde, en dehors d’Israël bien entendu. Des écoles qui n’étaient pas que des yeshivot. Au contraire, à l’image de la Tachkemoni, il s’agissait principalement d’écoles sous contrat avec l’Etat. En plus du curriculum classique, les études juives y étaient très poussées. La Tachkemoni accueillit jusqu’à 1000 élèves. Depuis quelques années, Jan Maes, un de ses anciens directeurs, effectue un travail remarquable pour retrouver les noms de victimes de la Shoah et les inscrire dans l’histoire collective belge. Un monument a d’ailleurs été érigé en souvenir des victimes de la Shoah.

En dehors des grandes fêtes et du secteur diamantaire, les juifs d’Anvers ont longtemps vécu en deux groupes : d’un côté les communautés orthodoxes et de l’autre, le reste des juifs qui se fréquentaient, allant des athées jusqu’aux disciples du Rav Kook. Ainsi, les jeunes qui fréquentaient les mouvements de jeunesse Hachomer Hatzaïr, Hanoar Hatzioni et Bné Akiva, se retrouvaient aussi aux clubs de sport Maccabi.
Le Maccabi qui eut son heure de gloire avec sa grande équipe du water-polo dans les années 50-60, son équipe de foot aux victoires marquantes dans les années 30 et qui encore dans les années 80 atteignit la 4e division belge (un de ses joueurs avait d’ailleurs pour surnom Arsenal, en hommage à son amour pour le foot anglais) et son club de tennis, dont fut issu deux champions nationaux dans les années 80.
Le centre Romi Goldmuntz, situé à la Nerviersstraat, était également un espace social et culturel important, parmi de nombreux lieux et associations dans la ville. Les mariages, bar et bat mitsvoth y étaient souvent célébrés dans sa grande salle jusqu’aux années 90. Cet immeuble, de par la diversité des activités a accueilli toutes les générations. La salle de soirée, où se déroulaient également des galas et défilés se trouvait au rez-de-chaussée, derrière un café-bar et une salle où était donnés des cours de bridge, une des activités préférées de la communauté juive d’Anvers. Au 1e étage, un restaurant qui accueillait notamment de nombreux écoliers à midi et une salle omnisport où étaient dressés les tables de ping pong à midi en guise de divertissement après le repas et avant la reprise des cours. Et à côté une salle pour les cours de karaté et judo. Aux étages supérieurs, une salle de jeux pour enfants, un théâtre, une bibliothèque et une salle d’expo. Et même au sous-sol une boite de nuit qui servait également pour les ados y célébrant leur bat-mitsva et bar mitsva dans un cadre moins formel que la grande salle.
Depuis 20 ans, l’évolution du secteur diamantaire, avec la disparition des tailleries et le déplacement du centre de gravité du marché, motiva un choix plus varié professionnellement pour la plupart des juifs anversois et géographiquement pour ceux qui voulaient tout de même rester dans le secteur.

Si le centre Romi Goldmuntz n’est plus en activité et d’autres lieux comme la librairie de Monsieur Kahane qu’un lointain souvenir, la communauté juive est encore assez présente de par ses écoles et mouvements de jeunesse. Elle a quitté le centre-ville et a offert de grands noms au théâtre national.
Il y a six synagogues de rite ashkénaze à Anvers. La plus grande est la Romi Goldmuntz .
La synagogue Shomrei haDas (« des Gardiens de la Loi»), avec plus de 6000 membres, et l’Israelitische Gemeente Van Antwerpen, fondée en 1904, représentent la communauté de la ville.
Viennent ensuite les communautés plus orthodoxes, regroupées dans l’organisation Mahzikai . On y trouve tous les courants du mouvement hassidique, dont les Satmar, les Gourer, les Sanzer, etc. En Europe, seule Londres présente encore une telle diversité, à Stamford Hill.

Les séfarades se réunissent dans leur synagogue, à côté de à la Bourse du diamant : la synagogue de la communauté israélite de rite portugais d’Anvers compte environ 300 familles et s’est agrandie avec l’arrivée de nombreux Israéliens. Une plaque apposée sur un mur extérieur commémore les victimes de l’attentat terroriste de 1981, revendiqué par un groupe palestinien.
La Yiddish Town, encore appelée « Pelikaan », du nom de l’une de ses principales artères, se trouve autour de la gare centrale. On y trouve divers restaurants-traiteurs dont le nom est généralement celui de la famille. Ils sont installés à l’arrière des maisons, ou situés dans une galerie.

À première vue, le promeneur non initié ne se doute pas qu’il faut pénétrer dans la boucherie pour accéder au Dresdner . Il parcourt ensuite l’arrière-cour en forme de galerie avant de se retrouver dans un petit restaurant moderne. Le vestiaire, avec ses longues redingotes traditionnelles, ses chapeaux noirs, les livres de prières déposés à côté des tables, témoignent de la grande orthodoxie du lieu.
Et bien sûr la célèbre delicatessen anversoise, Hoffy’s , ouvert en 1986, proposant les saveurs ashkénazes typiques. Et si vous avez le plaisir de visiter la Bourse, vous pourrez y déguster de très savoureux plats dans son restaurant, véritable institution fondée par le traiteur Sam qui décora de ses plats les banquets de toutes les fêtes pendant des décennies.
Signalons également l’excellent Blue Lagoon , situé dans le quartier diamantaire : c’est le seul établissement sino-casher du Benelux.
Anvers compte un nombre important de boucheries, de boulangeries et de magasins spécialisés en produits typiquement juifs. N’hésitez pas à faire vos provisions de gâteaux et pâtisseries chez Kleinblatt et chez Steinmetz .
Autre référence culinaire proche de la Tachkemoni : Beni falafel , où les jeunes écoliers se ruent depuis des générations pour y goûter les falafels dont les nostalgiques parlent encore, en particulier les pitoth gonflées au fer à repasser. Le décès de son fondateur en 2024 marqua profondément la communauté.

En dehors de ce quartier une autre étape s’impose. Une promenade dans le quartier du somptueux Musée Royal des Beaux-Arts vous permettra aussi de découvrir la sublime Synagogue hollandaise . Construite par l’architecte Joseph Hertogs en 1893, elle accueille souvent de grandes cérémonies. Fermées pendant huit ans pour causes de travaux, elle a accueille à nouveau les fidèles depuis l’automne 2022.
Si la population orthodoxe habite surtout ce quartier, les autres juifs ont migré depuis ces mêmes années vers les quartiers sud de Berchem, Wilrijk et surtout Edegem. Ce dernier accueille le Chai Center abritant une synagogue et un centre culturel très actif.

Bruxelles, capitale des institutions européennes, lieu de fête apprécié des touristes, mais aussi une ville immortalisée par les nombreuses bandes dessinées y naissent, demeure une ville étonnante. Par la cohabitation d’une magnifique ancienne ville, de tours de bureaux, de multiples bars où l’on retrouve l’esprit belge chaleureux. Mais aussi un radicalisme inquiétant et ses dérives, comme l’illustra l’attentat terroriste au musée juif de Belgique en 2014.
La présence juive bruxelloise date au moins du 13e siècle. La première preuve écrite de cette présence est représentée par un rouleau de Torah datant de 1310. Suite à la Peste noire et aux accusations antisémites en vigueur à l’époque, les juifs furent pointés du doigt et massacrés au milieu du 14e siècle. Leur réinstallation fut très courte, les juifs subissant un nouveau pogrom en 1370, basé sur des accusations mensongères de profanation d’hosties. Conséquemment, ils ne purent revenir que lors du règne espagnol sur la région. Seules quelques familles de Marranes y vécurent en attendant.
La renaissance juive bruxelloise se déroula sous le règne autrichien au début du 18e siècle. La plupart des juifs bruxellois, constituant une soixantaine de personnes, étaient originaires des Pays-Bas. Les conquêtes française et hollandaise qui suivirent n’entravèrent pas la réinstallation des juifs, ceux-ci furent autorisés de s’y établir librement. Signe de cette évolution, la création de l’école primaire israélite en 1817 par des intellectuels bruxellois.
Suite à l’indépendance de la Belgique en 1830 et la Constitution de 1831 garantissant une liberté de culte, Bruxelles devint le centre des Consistoires du pays. Eliakim Carmoly fut le premier Grand rabbin de Belgique, élu en 1832. La communauté fut alors composée de juifs originaires des Pays-Bas, d’Allemagne, puis de Pologne et de Russie à la fin du siècle, suite aux menaces et pogroms dans ces pays.
Le régime consistorial permit d’établir des demandes d’accès à un lieu de culte, afin de marquer l’enracinement juif bruxellois de cette époque. Au début du 19e siècle, des maisons, située d’abord rue aux Choux, puis une rue de la Blanchisserie, servirent de lieux transitoires. Un projet de synagogue rue de Berlaimont, inspirée par celle de Francfort, vit le jour en 1832 lorsque le Consistoire le présenta au ministre en charge de ces dossiers. La synagogue fut finalement inaugurée sur la place de Bavière.
En raison de la vétusté de l’immeuble de la place de Bavière et de l’augmentation rapide de la population juive dans les années 1830, un autre lieu fut envisagé. Des divergences immobilières et géographiques entre les représentants du Consistoire et les autorités locales retardèrent ce projet.
En 1868, le Consistoire lança un concours de projet pour la construction d’une nouvelle synagogue . Il fut remporté par l’architecte Désiré De Keyser. Une longue étude basée sur les synagogues européennes, permit à De Keyser de voir sa proposition d’une synagogue dans un style roman approuvée par le Consistoire en 1873. Un style marquant notamment la bonne intégration des juifs bruxellois. Son lieu aussi, rue de la Régence, dans la vieille ville.
Les juifs habitaient pourtant en grande partie les quartiers populaires situés à côté de la gare du Midi, à Anderlecht et Saint-Gilles. La bonne intégration leur permit toutefois de vivre graduellement dans des quartiers différents de la ville et la centralité de cette synagogue semblait alors logique plutôt que de l’installer dans un quartier éloigné des autres.
La synagogue de la Régence fut inaugurée le 20 septembre 1878. De style romano-byzantin, inspiré par les synagogues de Lyon et Stockholm. A l’extérieur, on aperçoit deux tourelles et au centre en hauteur de l’édifice, les Tables de la Loi. Autour de la rosace sont gravées les noms des douze tribus d’Israël. Le temple a une nef de 25 m de hauteur. On peut y admirer également vingt-cinq vitraux.
A la veille de la Seconde Guerre mondiale, 30 000 juifs bruxellois vivaient dans la capitale. A l’image des autres communautés occidentales, celle-ci fut traversée par des différences d’appréciation, voire de vies entre ses différentes composantes : occidentalisées depuis longtemps pour certaines et d’autres migrations plus récentes. Ces dernières étant plus traditionnelles ou à l’inverse, inspirées par les révolutions d’Europe de l’Est, marquées notamment par le développement et le succès jusqu’à aujourd’hui du mouvement de jeunesse Hashomer Hatzair. Le secteur d’activité principal fut celui de l’industrie du textile.

De nombreux juifs s’engagèrent sous les drapeaux belges lors de la Première Guerre mondiale, simples soldats ou officiers comme le général Louis Bernheim, le capitaine Ernest Wiener ou le capitaine Robert Goldschmidt. Autre symbole fort de ce courage, en 1936, 200 juifs de Belgique s’enrôleront dans les Brigades Internationales lors de la guerre d’Espagne.
La concentration démographique a malheureusement facilité le travail des nazis lors de leurs rafles. Au croisement de la rue Émile Carpentier et de la rue des Goujons, se trouve le Monument national aux martyrs juifs de Belgique. Les noms de 23838 victimes sont gravés dans la pierre. La place sur laquelle il se trouve a été rebaptisée Square des Martyrs Juifs.
Au lendemain de la guerre, la population juive bruxelloise déclina, avec le nombre de victimes de la Shoah, mais aussi des départs vers l’Amérique du Nord et Israël. La ville accueillit quelques milliers de réfugiés juifs d’Europe de l’Est. Au début des années 1960, suite à l’indépendance du Congo, des juifs qui résidaient dans cette ancienne colonie belge s’établir également en Belgique, principalement à Bruxelles.
A l’image de la pluralité des courants juifs bruxellois, le Centre communautaire laïc juif , demeure une des institutions juives majeures aujourd’hui. Il fut fondé en 1959 par des survivants de la Shoah désirant transmettre une identité juive démarquée des structures religieuses. De nombreux événements culturels y sont organisés, dans un esprit d’ouverture et de partage. Mais aussi des programmes éducatifs afin de lutter contre le racisme et le regain de l’antisémitisme. Notamment en sensibilisant le public aux autres génocides du siècle dernier, en Arménie et au Rwanda. Le CCLJ-David Susskind est connu pour son magazine « Regards », fondé en 1965, par Victor Cygelman, Albert Szyper, Jojo Lewkowicz et surtout David Susskind, grande figure de la gauche belge et militant du rapprochement israélo-arabe.
La Maison de la Culture Juive organise également de nombreux événements dans un espace convivial de conversation, de création, de renouveau et de transmission de la mémoire culturelle juive. Cela, dans le cadre de conférences, études, expos, concerts et ateliers. Mais aussi des cours de langues yiddish et judéo-espagnol. Sans oublier sa célèbre fête des musiques juives chaque année. Vous pouvez également vous inscrire à leurs visites thématiques dans les quartiers de Bruxelles. La ville compte deux écoles juives, Maimonide (créée en 1946) et Ganénou (1961).
Signe de la diversité de la communauté juive bruxelloise, de nouvelles synagogues furent inaugurées après-guerre en différents quartiers. Parmi celles-ci les synagogues du quartier populaire de Schaerbeek. De nombreux juifs y vécurent depuis l’entre-deux-guerres, priant dans de petits oratoires. La synagogue séfarade Simon et Lina Haim fut inaugurée en 1970, au 47 rue des Pavillons, accueillant des populations originaires d’Afrique du Nord et des anciennes communautés de Rhodes. Une synagogue orthodoxe fut inaugurée en 1979, située au 126-128 rue Rogier. Malheureusement, ces deux synagogues furent mises en vente en 2016. Les juifs anglophones, pour la plupart liés aux institutions européennes, forment un cinquième de la communauté juive de Belgique. Avec les juifs libéraux francophones, ils assistent aux services de shabbat. La synagogue Beth Hillel est très fréquentée pendant les fêtes juives.
La bonne intégration bruxelloise des juifs, mais aussi les attaques antisémites motivèrent des départs vers des quartiers plus surs, comme au sud de la ville à Uccle, privilégiant la sécurité au nombre de mètres carrés. Ainsi, la synagogue séfarade Etz-Hayim fut fondée en 1992. Égyptiens, Marocains, Syriens et Irakiens se réunissent dans ce lieu convivial. C’est dans la commune d’Uccle que se situe le cimetière de Dieweg , qui accueille un cimetière juif.
Sous la direction de Michel Dratwa, grand érudit du monde juif, le Musée juif de Belgique réunit une collection importante de documents anciens et modernes illustrant la vie juive. Le musée fut ouvert en 1990, avenue de Stalingrad. C’est déjà en 1932 qu’une première tentative non fructueuse dans ce sens fut effectuée par Daniel Van Damme, conservateur du musée d’Erasme à Anderlecht. En 1938, la Galerie de la Reine présenta la première exposition consacrée aux Juifs de Belgique, organisée par Dode Trocki.

Le projet fut relancé en 1979, lorsqu’une proposition est faite à Jean Bloch, président du Consistoire, d’organiser une exposition sur l’art et l’histoire du judaïsme belge, dans le cadre des 150 ans de l’indépendance du pays. Des démarches furent ainsi entreprises pour pérenniser ce projet et trouver un lieu qui présenterait au grand public cette histoire. Des locaux temporaires furent trouvés au 74 avenue de Stalingrad, où la première expo fut inaugurée le 25 octobre 1990.
Le musée déménagea en 2005 rue des Minimes, dans un lieu plus favorable à l’accueil du public. Un mécénat permit d’acquérir de nombreux objets, notamment par le Fonds Jacob Salik. Le musée possède diverses archives et une bibliothèque, ayant intégré les fonds des familles Kahlenberg, Misrahi, Souweine, Lévy, Cuckier, Schneebalg-Perelman, Galler-Kozlowitz, Broder, Jospa, Albert, Schnek, Bernheim et Lounsky-Katz. Philippe Blondin est le président du musée juif de Belgique depuis 2007.
Le musée est actuellement fermé et rouvrira en 2028, suite à de longs travaux. Néanmoins, en attendant, voici comment se présente la visite du musée que nous avons effectué en 2023.

Au début de l’expo permanente consacrée à l’histoire des juifs de Belgique, on aperçoit des photos historiques, de visites royales mais aussi de donateurs importants tel le baron Lambert qui finança l’ouverture d’une maternité en 1932. Cette grande famille créera la Banque Bruxelles Lambert et aidera de nombreuses œuvres caritatives, sociales et culturelles, de ses fondateurs au début du 19e siècle à ses descendants Philippe et Marion Lambert.
Les premières salles permettent au public de se familiariser avec les coutumes juives grâce à ce genre d’anciennes photos. Mais aussi d’œuvres artistiques comme ces centaines de verres de vin accrochés au plafond tels des lustres témoins de tous ces moments de célébration. On y montre des parcours, comme celui de la famille Kilimnik, juifs originaires de Podolie, installés à Molenbeek en 1921.
Situé à Bruxelles, le musée met à l’honneur la vie juive de la capitale, de la grande communauté d’Anvers, mais aussi des autres villes, racontant l’histoire, photos à l’appui des communautés de Liège, Gand, Namur, Ostende, Arlon. Des histoires illustrées par exemple avec une vieille carte postale de la synagogue d’Arlon ou de sa très belle parokhet, offerte par les dames de la communauté en 1874. De belles photos d’anciennes synagogues du pays sont présentées, ainsi qu’une maquette de celle de la synagogue portugaise d’Anvers.

Les fêtes juives sont expliquées et illustrées sur les murs du musée, avec de nombreux objets. Sans oublier la magnifique meguilat Esther de l’artiste Gérard Garouste et la mosaique de Pourim d’Eddy Zucker. Des fêtes basées sur des résistances historiques et parfois célébrées dans un esprit de Résistance comme cette menorah fabriquée par Alexandre Gourary dans le camp de détention de la Caserne Dossin.
En prenant les escaliers, on aperçoit une photo émouvante de juifs orthodoxes dans un parc d’Anvers, promenant leurs enfants sur des luges. Les escaliers mènent à l’étage où se trouve à l’entrée de deux salles le buste de la baronne Clara de Hirsch, une grande philanthrope belge.
La première salle présente la période de la Shoah en Belgique. L’histoire de la persécution des juifs décrite au-dessus de deux valises de déportés. Des photos, étoiles jaunes et documents administratifs y figurent. On aperçoit ensuite un mur avec 227 photos des 236 déportés qui s’échappèrent d’un train, le 20e convoi, qui partit de Malines à Auschwitz en avril 1943. Un documentaire réalisé par Sarah Timperman et Stéphanie Perrin est projeté au fond de la salle et raconte, à l’aide de témoignages notamment de Félix Lipszyc, Abraham de Groot, Simon Gronowski et Robert Maistriau, l’héroïque sauvetage du 20e convoi.

La deuxième salle accueille les œuvres d’artistes juifs contemporains tels Arié Mandelbaum, Sarah Kaliski, Kurt Lewy, Felix Nussbaum, Arno Stern et Kurt Peiser. Des expositions temporaires sont également présentées, comme celle récemment dédiée aux femmes marocaines à l’étage au-dessus, ou à l’entrée du musée avec celle de photos de Jo Struyven et Luc Tuymans des lieux où s’échappèrent les déportés du 20e convoi.
Dans la cour intérieure du musée, se trouve une plaque en hommage aux victimes de l’attentat terroriste du 24 mai 2014 qui fit quatre victimes : Alexandre Strens (un employé du musée), Dominique Sabrier (une bénévole du musée) et Emmanuel et Myriam Riva (un couple de touristes israéliens). En mai 2024, dix ans après l’attentat, se déroula une cérémonie en hommage aux quatre victimes.

Si tous les chemins mènent à Rome, l’un des plus beaux chemins bruxellois mène par Paris. Près de l’allée Chantal Akerman, dans le 20e arrondissement de Paris, résidait depuis ses 18 ans une des plus grandes cinéastes de tous les temps. « Ma fille de Ménilmontant » comme elle est surnommée par sa mère Natalia dans « Une Famille à Bruxelles », dialogue des mémoires, récits et silences. Bruxelles et Paris lui ont consacré en 2024-5 une belle expo et ses films peuplent encore régulièrement les salles de par le monde.
Comme Albert Cohen, elle est l’auteure de chefs-d’œuvre de genres bien différents. Avec cette différence peut-être, qu’elle n’a pas eu besoin de réaliser le Film de ma mère sur le tard, puisque Natalia Akerman est à l’honneur dès le début dans l’œuvre de sa fille.
Survivante d’Auschwitz, Natalia, n’en parle pas, partagée entre le besoin imminent de tenir et de se reconstruire et cette résilience juive consistant à promettre une meilleure aube pour la génération suivante. Tout en transmettant force et dignité à ses filles Chantal et Sylviane.
De son père Jacob, elles héritent de l’humour, le travail consciencieux et la volonté de danser la vie pour virevolter autour des ennuis. Jacob Akerman est commerçant, possédant une fabrique de vêtements dans le quartier du Triangle et un magasin dans la galerie de la Toison d’Or.
Quant à Bruxelles, elle partage avec les deux jeunes femmes nées au lendemain de la guerre, son esprit belge bon vivant aux personnages bd, verres et histoires tout en rondeur rondeurs facilitant les embarcations débordantes de plaisir, inspirant à sa manière tant d’histoires aux bières joyeusement renversées.
L’arrière-grand-père maternel Polonais de Chantal était en route vers les Etats-Unis, tentant de rejoindre le port d’Anvers pour y embarquer. Mais comme pour tant de juifs il réalisa à quel point on peut être heureux comme un juif en Belgique.

Chantal Akerman nait à Bruxelles en 1950. A 15 ans, elle va voir « Pierrot le fou » au cinéma avec son amie et future productrice Marilyn Watelet, amusées par le titre du film. C’est une révélation et désormais la naissance d’une ambition.
Elle réalise à 18 ans le court-métrage « Saute ma ville », soutenue par André Delvaux et Eric de Kuyper. L’histoire d’une ado qui s’enferme dans la cuisine et agit de manière de plus en plus incohérente, en jetant tout et cirant ses chaussures puis ses jambes à côté d’une boite Manischewitz.
Chantal déménage à Paris après le tournage, espérant y trouver l’inspiration, celle-ci ne lâchant plus Chantal à Paris, New York, Bruxelles, Tel Aviv, en Allemagne, en Europe de l’Est et même sur la frontière mexicano-américaine.
A 23 ans, elle réalise « Je, tu, il, elle » avec Niels Arestrup et Claire Wauthion, entre inquiétudes, errance et retrouvailles d’opéra des corps. Deux ans plus tard, Chantal entre déjà et définitivement dans la cour des très grands avec « Jeanne Dilman, 23 quai du Commerce, 1080 Bruxelles ». Delphine Seyrig mène une vie ultra ordonnée pour tenir, pour couvrir les silences et blessures, élevant seule son fils. Une vie sans plaisir jusqu’à ce qu’advienne un dérèglement très inattendu. Une adresse et surtout une œuvre élue en 2022 meilleur film de tous les temps dans le classement décennal établi par « Sight and Sound », la revue du British Film Institute.
Dans « Pierrot le fou », Jean-Paul Belmondo demande à Samuel Fuller de lui définir le cinéma. Le réalisateur répond qu’il s’agit d’un champ de bataille émotionnel. C’est peut-être pour cette raison que Chantal Akerman est une des plus grandes cinéastes de tous les temps. Sa caméra présente amour et humour, chants et silences, pensées profondes et inquiétudes lancinantes grâce à son regard malicieux et doux à la fois. En avance sur son temps, sur notre temps aussi, entre la reconstruction d’une génération et la quête du plaisir et de l’affirmation de soi de leurs enfants, lesquels craignent le retour des temps sombres. Sylviane Akerman, la sœur de Chantal, préserve aujourd’hui sa mémoire, notamment à travers une fondation.
En 2023, une fresque à l’effigie de Jeanne Dielman, personnage principal du film « Jeanne Dielman, 23, quai du commerce, 1080 Bruxelles » a été dévoilée à Bruxelles en hommage à Chantal Akerman. La fresque a été réalisée par l’artiste Alba Fabre Sacristán et se trouve sur la façade d’une maison située à l’angle du quai aux Barques et de la rue Saint-André, près du quai du Commerce.
Sources : Encyclopaedia Judaica, Politique et Religion : le Consistoire Central de Belgique au XIXe siècle, Les Juifs de Belgique : de l’immigration au génocide (1925-1945), MuseOn, RTBF

La monumentale synagogue ashkénaze a été vendue à la municipalité qui l’a mise à la disposition d’une congrégation turque musulmane ; elle est devenue la mosquée Al-Aqsa.
La communauté ashkénaze avait ensuite fait l’acquisition à La Haye d’une ancienne église protestante dans le quartier de Bezuidenhout et l’avait transformée en synagogue, ainsi qu’en centre communautaire.
Comme son entretien coûtait trop cher, elle fut transformée en immeuble d’habitation, dont le rez-de-chaussée seulement sert aujourd’hui de synagogue et de centre communautaire .

Le cimetière de Scheveningseweg où ont été célébrés les premiers enterrements juifs vers 1700, a été restauré.
Une statue de Spinoza a été érigée en face de la maison où il a passé la dernière partie de sa vie et écrit ses principales œuvres philosophiques, après avoir été banni de la communauté juive pour ses « opinions hérétiques ».
En 1673, il se vit offrir la chaire de philosophie de l’université d’Heidelberg, mais en devant respecter la condition de cesser ses attaques contre la religion, mais il déclina l’offre et préféra continuer à étudier dans sa retraite.
Rencontre avec Marie-Thérèse Daniëls-Dirven, directrice de la Maison Spinoza à La Haye.
Jguideeurope : D’où viennent la plupart des visiteurs? Avez-vous été témoin de quêtes différentes selon le pays d’origine?
Marie-Thérèse Daniëls-Dirven : Depuis juillet 2018, Domus Spinozana est ouvert le lundi après-midi. La plupart des visiteurs viennent d’un intérêt antérieur pour Spinoza. Certains sont des étudiants étrangers résidant à La Haye ou des étudiants étrangers. Mais il y a aussi des touristes de passage, jeunes et vieux, qui planifient leur voyage aux Pays-Bas longtemps à l’avance. Ils veulent voir tout ce qui concerne Spinoza. Pour ces visiteurs, nous sommes heureux de prendre rendez-vous un autre jour que le lundi si cela leur convient mieux. Des visiteurs venant d’aussi loin que la Corée, le Japon et la Chine…
Il est difficile de dire si les motivations varient selon le pays d’origine. Ce que l’on peut dire avec certitude, c’est que la grande diversité des visiteurs montre comment Spinoza, avec son encouragement à penser par soi-même et son plaidoyer pour une liberté d’expression illimitée inspire des personnes de toutes nationalités.

Comment le patrimoine de Spinoza est-il conservé et restauré ?
La maison de Spinoza, connue sous le nom de Domus Spinozana, a été construite en 1646 par Jan van Goyen, un peintre paysagiste bien connu de l’époque. Quelques années plus tard, la maison était occupée par Jan Steen et son épouse Grietje, la fille de Jan van Goyen. Hendrick van der Spyck était le propriétaire de Spinoza.
Spinoza a vécu dans le grenier de la maison pendant les 7 dernières années de sa vie et y est mort le 21 février 1677, à l’âge de 44 ans. C’est dans cette maison que Spinoza a achevé son texte Ethique en 1675, qui a été publié après sa mort.
Actuellement, seule la salle de lecture du rez-de-chaussée est ouverte au public les lundis après-midi de 14h à 16h. L’espace est conçu pour les universitaires et les étudiants. Ici, on peut consulter un livre, parler au gardien ou simplement respirer l’atmosphère de ce bâtiment historique.
Notre site Web, www.spinozahuis.nl comprend une visite virtuelle de lieux liés à Spinoza de La Haye.

Amsterdam a beaucoup apporté aux juifs, et réciproquement. La ville a ainsi conservé dans son langage, sa gastronomie et son humour des traits typiquement juifs. C’est ainsi que mazel (« bonne chance ») ou meshuga (« fou») font désormais partie de son dialecte, de même qu’elle a adopté le hareng et les oignons au vinaigre, le saucisson de bœuf et le fromage blanc…

À lui seul, le Musée historique juif nécessite quasiment une demi- journée. Depuis 1987, ce musée, qui permet d’explorer les coutumes juives, les fondements religieux du judaïsme et du sionisme, ainsi que la vie des séfarades et des ashkénazes hollandais aux siècles passés, se trouve dans l’enceinte d’un complexe formé par quatre synagogues, qui servirent au culte jusqu’en 1943 et furent vendues à la municipalité d’Amsterdam en 1955.

Notez que le musée organise des visites guidées de la ville et de son passé juif.
En 1943, les propriétés de ce musée furent acheminées à Offenbach, en Allemagne. Moins de 20 % des biens volés furent récupérés après la guerre par le gouvernement néerlandais.
L’assemblage de ces quatre vieilles synagogues à l’aide de constructions de verre et de métal est d’ailleurs destiné à rappeler cette rupture dans l’histoire juive et dans celle d’Amsterdam, avec le massacre de la majorité des habitants juifs de la ville pendant la Seconde Guerre mondiale.

La Grande Synagogue fut inaugurée en mars 1671 par la communauté ashkénaze, qui venait de renoncer aux fallacieux espoirs suscités par le faux messie Sabbataï Zevi. À la place initiale de la bimah, s’élèvent aujourd’hui des vitrines contenant des objets rituels en argent. L’arche d’alliance, tout en marbre, a été restaurée, de même que les tribunes réservées aux femmes ou aux hommes et le mikveh. Par manque de place, trois autres synagogues furent ensuite construites à côté : Obbene Sjoel (1685), Dritt Sjoel (1700) et la Nouvelle Synagogue (1752).
Outre l’exposition de nombreux objets de culte et d’œuvres d’art, le musée présente également des documents retraçant l’histoire des deux communautés juives et des personnages qui les ont marquées, tel Jonas Daniël Meijer (1780-1834), qui fit carrière comme avocat et haut fonctionnaire, et tenta d’améliorer le sort des juifs pauvres à Amsterdam. À l’issue de cette visite, explorez l’ancien quartier juif, en suivant l’itinéraire ci-après, qui reprend en grande partie celui que propose le musée.

Après avoir traversé la Mr Visserplein , du nom de Liuis Ernest Visser, président de la Haute Cour en 1939 qui s’employa activement à défendre les droits des juifs pendant l’Occupation, vous passerez devant l’église catholique Moïse et Aaron (qui doit son nom aux petites statues qui ornaient sa façade et qui se trouvent désormais sur le mur arrière). À gauche, pénétrez dans la Jodenbreestraat . Du XVIIIe siècle à la Seconde Guerre mondiale, la Grand’rue des Juifs fut l’artère principale du quartier juif. En 1965, la partie nord fut détruite et la rue défigurée.
Au n° 4-6 de la Jodenbreestraat, se dresse la maison de Rembrandt. Le célèbre peintre n’était pas juif, mais il travailla et habita dans cette maison du quartier juif de 1639 à 1658. Il logeait au rez-de-chaussée avec sa femme Saskia Van Uylenburg, qui y mourut, puis avec Hendrickje Stoffels, son second grand amour. Le peintre réalisa dans l’atelier du premier étage la plupart de ses tableaux. Ses cours se tenaient au grenier.

La maison de Rembrandt , restaurée de 1907 à 1911 et décorée de meubles et d’objets du XVIIe siècle, présente de nombreux dessins et la quasi-totalité des eaux fortes de l’artiste (250 sur les 300 qu’il a exécutées), dont des autoportraits, des études de nus, de vagabonds et des scènes de famille.

L’influence de son environnement juif est visible dans son œuvre. Rembrandt demandait souvent à des habitants du quartier de poser pour ses scènes bibliques. Plusieurs riches juifs lui demandèrent également de faire leur portrait. Vous admirerez un portrait de Menasseh ben Israel, rabbin et écrivain qui habita longtemps en face du peintre. Celui-ci illustra aussi plusieurs de ses livres.

Parmi les scènes bibliques, sont exposées des gravures comme Le Sacrifice d’Abraham (1635), Jacob et Benjamin (1637), Le Triomphe de Mordecaï (1641), Abraham et Isaac (1645) et David et Goliath (1655).
Le Rijksmuseum qui se situe dans un autre quartier, à Stadhouderskade, présente également, outre la célèbre Ronde de nuit, un nombre significatif de peintures de Rembrandt inspirées par la culture juive, dont La Mariée juive et Les Lamentations de Jeremiah. On y trouve par ailleurs Une synagogue portugaise d’Emmanuel de Witte et Mariage juif de Kosf Israels.

En sortant de la maison de Rembrandt, traversez le St. Antonibrug, petit pont donnant sur la St. Antoniebreestraat, qui offre un très beau panorama d’Amsterdam. Vous apercevrez au loin la tour Montelbaan et son clocher décoratif en bois. C’est ici que débarquèrent, dit-on, les premiers réfugiés juifs en provenance d’Espagne et du Portugal.
Au 69 de la St. Antoniebreestraat , se trouve la maison qu’un riche marchand juif portugais, Isaac de Pinto, acheta en 1651 pour la somme considérable de 30000 florins. Il la fit remanier en 1680 selon les plans d’Elias Bouman, dans le style Renaissance italienne, avec une façade crème comportant six pilastres imposants, coiffés par une balustrade aveugle qui cache le toit. Cette demeure, sans doute la plus belle du quartier, est à l’origine de l’expression « aussi riche que de Pinto ». En partie détruite pendant l’Occupation, tandis que la plupart de ses occupants périssaient dans l’Holocauste, elle fut restaurée en 1975. Sauvée de la démolition grâce à une campagne de protestation qui permit de réhabiliter tout le quartier, désormais résidentiel, elle abrite aujourd’hui une bibliothèque publique. Pénétrez à l’intérieur pour admirer les oiseaux et angelots des peintures de son plafond d’origine.
Revenez en arrière vers le St. Antonibrug, tournez à droite avant d’être à la hauteur de la maison de Rembrandt : vous arrivez au marché aux puces de Waterlooplein . À cet endroit, se trouvait le marché du quartier juif à compter de 1886. Le comblement de deux canaux permit de créer, au cœur du Jodenbuurt, cette grande place qui s’étend sur le site d’une ancienne île artificielle, entre l’actuel hôtel de ville et l’opéra. À l’origine, les juifs n’avaient pas le droit de tenir des commerces de détail, ils achetaient et vendaient donc dans la rue. Le marché avait lieu tous les jours sauf le samedi. Beau- coup moins pittoresque aujourd’hui, il regroupe surtout des marchands de vêtements d’occasion, de tissus africains et de bijoux indonésiens.
En continuant tout droit, avec le canal à main droite, vous rencontrez un mémorial en marbre noir, de 1988, commémorant la résistance juive durant la Seconde Guerre mondiale.

Tournez sur votre gauche et suivez sur 200 m la rivière Amstel : juste avant le pont Blauwbrug, un coup d’œil sur la gauche vous permettra de voir le tracé d’une maison devant le Musiektheater. C’était là, qu’avant guerre, se trouvait l’orphelinat de garçons, Megadlei Yetomim, qui prit en charge les orphelins de la communauté ashkénaze à partir de 1738. En mars 1943, les enfants qui s’y trouvaient furent déportés au camp de concentration de Sobibór.
Traversez la rue à cet endroit et continuez le long de la rivière, à votre droite. Tournez à gauche juste avant le pont de bois (Walter Süsskindbrug) pour atteindre le Nieuwe Herengracht. Pendant la guerre, Walter Süsskind se servit de sa situation de membre du Conseil juif pour sauver un grand nombre d’enfants de la déportation. Une plaque commémorative à son nom est placée de l’autre côté du pont.
Marchez jusqu’au bout du Nieuwe Herengracht, habité par des juifs aisés au XIXe siècle, puis tournez à droite pour traverser le Vaz Diasbrug, pont qui porte le nom d’un célèbre journaliste d’origine juive portugaise. Vous êtes sur la Weesperstraat. À une cinquantaine de mètres de là, se trouve un petit square avec un monument à la mémoire de « ceux qui protégèrent les juifs hollandais durant les années d’Occupation ». Conçu par le sculpteur J. Wertheim, il fut inauguré en 1947.
Tournez à droite au pont suivant pour arriver au Nieuwe Kaisersgracht. Pendant la guerre, les juifs le surnommaient « le canal des nouveaux martyrs ». C’est au n° 58 que se trouvait le siège du Conseil juif : pas plus que dans les autres pays occupés, cette assemblée imposée par les nazis ne parvint à ralentir la mise en œuvre de la Solution finale, quoi qu’aient pu en penser les notables juifs qui acceptèrent d’en faire partie.
Revenez dans la Weersperstraat, tournez à droite et suivez cette rue jusqu’au début de la Nieuwe Kerkstraat. Là, tournez à gauche. Anciennement habitée par des juifs portugais, elle était également connue sous le nom de « Rue juive de l’église ». Au n° 127, où est actuellement installé un commerce de vin et de limonade, se trouvait la morgue (Metaarhuis) rattachée à l’hôpital du Nieuwe Kaisersgracht. Les corps y étaient nettoyés selon les rituels juifs. On disait à l’époque : « On entre par Kaisersgracht et on sort par Kerkstraat.»
Un peu plus loin, au n° 149, se trouvait une synagogue fondée par des juifs russes, la shoul russe. Vous distinguerez, sur la façade de l’immeuble, une vitre ronde en verre teinté avec une étoile de David. Juste à côté se trouvait la synagogue des Marins, sans doute ainsi nommée parce que bon nombre de juifs hollandais durent aller travailler en mer pendant la récession économique de la fin du XVIIIe siècle.
Traversez le pont au bout de la Nieuwe Kerkstraat (à gauche). Vous vous tenez à présent sur le Lau Mazirelbrug, du nom d’un avocat qui s’opposa au recensement obligatoire des juifs pendant la guerre et participa à l’attaque des bureaux où se trouvaient les registres contenant le nom de tous les juifs.
Vous pénétrez maintenant dans le quartier de Plantage, qui était un lieu de détente à l’extérieur de la ville. Cafés, salons de thé, théâtres, foisonnaient dans cette périphérie où s’installèrent de nombreux juifs aisés. En 1924, près de la moitié des habitants de Plantage étaient juifs.
Descendez la Plantage Kerklaan jusqu’aux feux de signalisation et tournez à gauche dans la Plantage Middenlaan. Immédiatement à votre gauche se trouve l’ancien théâtre Hollandsche Shouwburg, l’un des plus importants mémoriaux consacrés aux victimes juives de la Seconde Guerre mondiale en Hollande.

Le théâtre Hollandsche Schouwburg où se produisaient avant guerre des comédiens hollandais connus comme Esther de Boer Van Rijk, Louis de Vries et sa compagnie, ou encore Herman Heyermans, fut réquisitionné en 1942 par les Allemands. Ils y parquèrent les juifs qui devaient être déportés dans un premier temps vers le camp de transit de Westerbork, puis vers des camps de concentration. Depuis 1962, ce bâtiment sert de mémorial. On peut y lire gravés les noms des 7 600 familles auxquelles appartenaient les 104 000 juifs qui ne revinrent pas des camps. Y sont présentés des documents, des photographies et des films montrant les mesures d’isolement prises graduellement contre les juifs pendant l’occupation du pays.
Pour tenter d’amener « en douceur » les Hollandais à considérer les juifs comme des êtres différents, les exclusions se firent progressivement, allant de l’interdiction de rouler à bicyclette (un mode de vie typique- ment hollandais) ou d’aller à la pêche, jusqu’à celle de pénétrer dans n’importe quel lieu public. Les Hollandais furent priés de déclarer qu’ils étaient totalement aryens et, dans le cas contraire, furent licenciés de leur emploi et durent envoyer leurs enfants dans des écoles pour juifs. Les premières déportations intervinrent en mai 1942, et furent présentées comme des départs vers des « camps de travail » en Europe de l’Est. Les juifs, qui s’étaient laissés recenser, étaient convoqués par ordre alphabétique et regroupés ici. Les Allemands prenaient également la peine d’effectuer des « descentes» dans les quartiers à forte concentration juive pour amener de force les récalcitrants. En l’espace d’un an, plus de 60 000 juifs furent entassés dans ce théâtre dont on avait enlevé tous les fauteuils et qui, au cours des tout premiers temps de l’Occupation, avait été réservé à un public juif et à des acteurs juifs qui n’avaient pas le droit de se produire sur une autre scène.
En sortant, revenez vers les feux de signalisation et tournez à gauche dans la Plantage Kerklaan. L’immeuble situé au n° 36 était le siège des registres de la ville pendant la guerre. La plaque qui s’y trouve commémore l’attaque des bureaux, le 27 mars 1943, par un groupe de résistants qui tenta de détruire les registres. Cette initiative échoua car les dossiers étaient trop denses et trop bien ficelés pour brûler rapidement. Douze membres du groupe, dont plusieurs étaient juifs, furent pris et exécutés.
Un peu plus loin dans la rue, se trouve l’un des plus vieux zoos du monde, Artis, qui fit pendant plus de 125 ans les délices des habitants du quartier, notamment les jours de shabbat (les visiteurs ne payaient que le lendemain quand ils n’avaient pas une carte forfaitaire).
Plus avant, au n° 61, se situe Plancius, un immeuble de 1876 à la façade artistiquement décorée, qui fut le siège de groupes musicaux et de compagnies théâtrales. Il fut établi à l’initiative d’une chorale juive, Oefening Baart Kunst (« De la pratique naît l’art »). Une étoile de David sur son fronton rappelle les origines culturelles de cet édifice. À la fin du XIXe siècle, alors que le socialisme gagnait du terrain chez les juifs, il devint également un lieu de réunion, où le grand leader juif, fondateur du syndicat des ouvriers du diamant, Henri Polak, prit notamment la parole.
C’est au rez-de-chaussée de cet immeuble que s’est installé, depuis 1999, le musée de la Résistance hollandaise. Ce Verzetsmuseum est un musée qu’il faut absolument visiter.

Le Verzetsmuseum propose une exposition permanente d’une richesse exceptionnelle, ainsi que d’autres temporaires. Il permet de prendre conscience des choix et des dilemmes auxquels fut confronté l’ensemble des citoyens hollandais sous l’occupation nazie. Qui fit vraiment de la résistance ? De quelle façon ? L’exposition relate les grèves et les actions allant de l’espionnage au sabotage, en passant par la confection de tracts et journaux clandestins. Les photos sur les murs recréent le climat de l’époque, de même que les objets (bicyclettes, postes de radio, téléphones, imprimerie…) datant de la guerre. Des lettres et des films authentiques permettent de suivre la vie quotidienne de ceux qui furent envoyés dans le camp de Westerbork. Des témoignages audios donnent la parole aux Hollandais qui aidèrent des juifs à se cacher, mais aussi à ceux qui n’en eurent pas le courage. Très impressionnant, un petit film de 1942 montre la vie à l’intérieur du camp de transit de Westerbork, administré par les juifs eux-mêmes (travail, sport, administration), et les départs de ce camp vers Auschwitz, avec des prisonniers entassés dans des wagons sur lesquels on peut lire en toutes lettres « Westerbork-Auschwitz », une ligne de chemin de fer en quelque sorte « régulière ». D’ailleurs, le musée a conservé plusieurs de ces plaques.
Revenez ensuite sur vos pas et tournez à droite dans la Henri Polaklaan. Cette rue porte le nom du fondateur du Syndicat général des Travailleurs hollandais du diamant (ANDB). Fondée en 1894, l’ANDB fut le premier syndicat moderne des Pays-Bas. Auparavant, il y avait des associations de travailleurs du diamant mais chaque corporation (tailleurs, polisseurs…) était indépendante et ne regroupait pas plus de 200 membres. En outre, juifs et non-juifs se réunis- saient séparément. En 1894, une grande grève éclata dans cette industrie et ses dirigeants, Henri Polak et Jan Van Zutphen, remportèrent une grande victoire en obtenant une augmentation de salaire de 35 % pour la corporation. À partir de cette date, un seul syndicat réunissant l’ensemble des ouvriers de la profession vit le jour. En 1910, ils obtinrent une semaine de congés sans solde, qui serait payée deux ans plus tard. En 1911, l’ANDB fut le premier syndicat au monde à obtenir la journée de huit heures. Après la Seconde Guerre mondiale, une inscription a été gravée sur le côté droit du hall : « Souviens-toi, visiteur, des deux milliers de nos membres qui furent déportés pendant l’Occupation et qui ne revinrent jamais. »
Prenez à droite au bout de la Henri Polaklaan, traversez la Plantage Parklaan et suivez la route qui conduit sur la gauche à la Anne Frankstraat. Traversez le Nieuwe Herengracht et tournez à gauche, dans la Rapenburgerstraat. Le n° 109 fut le siège du beth midrash Etz-Haïm, maison fondée en 1883 pour l’étude de la Torah, comme l’indique la date inscrite sur la façade. L’immeuble héberge aujourd’hui le siège de l’hebdomadaire juif hollandais, le NIW.
Le café De Vlooienmarkt, au n° 169-171, était, avant guerre, un orphelinat pour jeunes filles géré par la communauté ashkénaze. Il y avait une synagogue au n° 173, qui devint plus tard le siège du rabbinat en chef hollandais. Vous distinguerez l’empreinte de la mezouzah à l’entrée de cette ancienne shoul.

Au bout de la Rapenburgerstraat, traversez la Mr Visserplein : la Synagogue portugaise est sur la gauche. Lorsqu’elle fut achevée en 1675 par Elias Bouman, cette synagogue était la plus grande du monde. Sur le portique, on peut lire la date 1672 (date prévue initialement) en additionnant la valeur des lettres étoilées du texte du psaume 5, verset 8. On peut aussi noter le nom Aboab (formé par les deux derniers mots), qui fut celui du rabbin initiateur de sa construction. L’extérieur et l’intérieur sont restés quasiment inchangés depuis l’époque de Spinoza, qui vivait à deux pas. L’édifice repose sur des pilotis immergés que l’on inspecte régulière- ment en barque pour vérifier le niveau d’eau. Les bâtiments alentours abritent la synagogue d’hiver, le secrétariat, les archives, les logements des fonctionnaires, le bureau du rabbin, la morgue, ainsi que la bibliothèque Etz-Haïm, mondialement connue.
L’architecte s’est inspiré du plan du Temple de Jérusalem. Cet énorme cube en brique a été miraculeuse- ment épargné par la guerre et par les nazis. Il comprend soixante-douze fenêtres et, lors des grandes cérémonies, les 1000 bougies des lustres en cuivre éclairent l’intérieur où quatre hautes colonnes ioniques soutiennent les huit voûtes en bois du plafond. L’arche, dont l’intérieur est recouvert de cuir doré, occupe le coin sud-est en direction de Jérusalem, et la tévah se trouve en face. On peut contempler un hekhal monumental, ainsi qu’un exemplaire de L’Histoire sainte de Menasseh ben Israel, illustré par Rembrandt. L’un des rouleaux de la Loi a été rapporté en 1602 d’Emden en Allemagne par l’imprimeur juif Uri Halevi Phoebus. Le mobilier date de 1639.
Une vidéo raconte l’histoire de la synagogue et celles des trois communautés séfarades du pays, qui avaient chacune leur synagogue avant de s’unir en 1639 dans le Talmud Torah. Aujourd’hui, on ne compte guère plus de 600 juifs d’origine séfarade aux Pays-Bas. À peine quelques dizaines d’entre eux assistent aux offices des principales fêtes religieuses dans cette synagogue. La majorité habite en dehors du centre- ville, comme d’ailleurs la plupart des ashkénazes.
À la sortie de la Synagogue portugaise, sur la Jonas Daniël Meijerplein, se trouve la statue d’un robuste docker, célébrant la grève que les ouvriers du port d’Amsterdam menèrent en février 1941 pour s’opposer aux mesures antijuives des Allemands. Ce mouvement, qui n’eut aucun équivalent dans le reste du monde, fut durement réprimé par l’occupant. Tous les 25 février a lieu, à cet endroit, une commémoration en leur honneur.
Traversez à nouveau la Mr Visserplein, reprenez la Jodenbreestraat, puis tournez à droite dans Uilenburgersteeg. On arrive dans la Nieuwe Uilenburgerstraat : la superbetaillerie de diamants de Samuel Gassan se trouve à droite, au n° 173-175, dans un immense bâtiment en brique de 1879. À l’époque, c’était le plus grand producteur de diamants d’Europe.

En 1812, le patriarche, Marcus Abraham Boas, habitait dans la Rapenburgerstraat et vendait des vêtements d’occasion. Son fils, Juda Boas, devint cordonnier et eut sept enfants, dont trois fils qui s’associèrent pour monter cette fabrique après avoir étudié le commerce du diamant à Paris. Le bâtiment fut réquisitionné par les nazis pendant la guerre. Marcus Boas et sa famille s’enfuirent aux États-Unis juste à temps. Bertha Boas partit avec son fils pour l’Angleterre, tandis que Bernard émigrait en Suisse. Martha, Julius et Elisabeth moururent dans des camps de concentration.
Aujourd’hui, la Gassan Diamonds, société fondée en octobre 1945 par Samuel Gassan (qui avait appris le métier en tant qu’ouvrier dans cette même taillerie), et reprise par ses deux petits-fils, comprend plusieurs fabriques à Amsterdam et de nombreux points de ventes dans le monde entier.
Le bâtiment comporte quatre étages, de grandes fenêtres en verre qui permettaient aux ouvriers de travailler à la seule lumière du jour, ainsi qu’une école de taille du diamant. L’arrière donne sur un canal et les bateaux- mouches, qui organisent cette visite dans leur programme, accostent là directement.
Vous pourrez assister à la taille et au polissage d’un diamant, et apprendre à reconnaître les différents types et qualités de pierres. Il vous sera même possible d’acheter un diamant à prix d’usine, le faire monter dans l’heure, et vous faire délivrer un certificat.
Avant de repartir vers le métro de Waterlooplein ou de rejoindre à pied le centre-ville, qui n’est pas loin, vous pourrez admirer, à quelques mètres de là, sur le même trottoir, au n° 91, la belle façade de l’ancienne synagogue de Uilenburg , construite en 1724. Si la grille est ouverte, il vous sera même possible d’entrer pour admirer l’intérieur totalement restauré.

La maison d’Anne Frank ne se trouve pas dans le quartier juif, mais dans celui de Joordan, au nord-ouest d’Amsterdam, tout près de la gare centrale.
C’est dans cette maison que se cachèrent Anne Frank et sa famille de juillet 1942 à août 1944, avant d’être découverts et emmenés par les nazis. Après l’invasion de l’armée allemande en mai 1940, Otto Frank, qui tenait une pharmacie, en aménagea l’arrière. La famille et les employés, également juifs, au total huit personnes, y vécurent cloitrés. Anne Frank, âgée de treize ans, note chaque jour les détails de sa vie sur un cahier que les Allemands ont laissé tomber au moment de leur descente et de leur fouille. Anne et Margot seront déportées à Bergen-Belsen, tandis que le reste de la famille est expédié à Auschwitz. Un seul survivra aux camps, Otto, auquel son assistante remettra, à son retour, le journal écrit par sa fille Anne.
La visite commence au rez-de-chaussée et se poursuit au deuxième étage par une bande vidéo, puis conduit dans l’annexe dont une bibliothèque pivotante cachait l’entrée. Dans les différentes pièces vides, on peut encore voir une carte de Normandie permettant de suivre la progression des Alliés, les marques de l’évolution de la taille des enfants, des photos de vedettes de cinéma qu’Anne Frank découpait pour décorer sa chambre.
La présence juive à Belfast semble dater de la moitié du 19e siècle, avec l’arrivée de marchands juifs allemands. La première synagogue de Belfast fut construite en 1871 sur Great Victoria Street. Une deuxième synagogue fut construite en 1904 sur Annesley Street. Daniel Joseph Jaffe, le fondateur de cette communauté, a été honoré par l’attribution de son nom à une fontaine. Son fils, Otto Jaffe, fut maire de Belfast. La communauté juive de Belfast est composée aujourd’hui d’une centaine de personnes.
La synagogue de Belfast tient des offices réguliers le vendredi soir.

Le cimetière de Fall Road, situé à quelques kilomètres au nord de Belfast, abrite les plus vieilles tombes juives d’Irlande du Nord, mais il est très négligé et subit de nombreux actes de vandalisme. Un grand obélisque de granite érigé en mémoire de Daniel Joseph Jaffe a été couvert de graffiti.
La petite communauté (170 juifs) de Limerick a disparu en 1904, à la suite du seul pogrom qu’ait connu l’Irlande, pogrom qui ne fit aucune victime. Le petit cimetière juif de Kilmurray, à Newcastle dans le comté de Limerick, a été restauré et les six pierres tombales qui s’y trouvent sont en parfait état de conservation.


La présence juive à Cork semble dater du 18e siècle. Néanmoins, la communauté s’y forma surtout à la fin du 19e siècle, notamment avec l’arrivée de juifs lituaniens. Elle était constituée de près de 500 personnes au début du siècle suivant. Suite au déclin de cette communauté, la synagogue ferma ses portes en 2016. Une nouvelle congrégation a vu le jour récemment.
Le Shalom Park a été ouvert en 1989 à l’endroit qui portait le nom de Jewstown (« ville des juifs »). Le père de James Joyce était d’ailleurs né dans ce quartier. La ville accueillait jusqu’il y a peu des offices dans une synagogue. Désormais, ils se tiennent à Dublin.

C’est à la fin du XIXe siècle que la communauté juive de Dublin a atteint son apogée. Elle était installée autour de la South Circular Road – Warren Street, Martin Street et St Kevin’s Parade – que les Dublinois surnommaient d’ailleurs « La Petite Jérusalem ».

Le Musée juif irlandais occupe la synagogue de Walworth Road, qui abritait le centre de la vie juive de la capitale. Les départs vers les faubourgs, ainsi que la décroissance graduelle de la communauté, ont conduit à la fermeture de ce lieu de culte dans les années 1970.
En 1985, Chaïm Herzog, l’ancien président de l’État d’Israël originaire d’Irlande, prononçait le discours d’inauguration de ce nouveau musée. On y trouve des archives, des objets et des explications sur ce qui faisait la particularité de cette communauté. On peut admirer, au rez-de-chaussée, une cuisine mettant en scène un shabbat typique de la fin du XIXe début du XXe siècle. Au premier étage, la synagogue a été très bien conservée.

Au 52 Upper Clanbrassil Street, Dublin 8, se trouve le lieu de naissance de Leopold Bloom, l’un des deux protagonistes du chef-d’œuvre de James Joyce (1880-1941), Ulysse, publié en 1922. Leopold Bloom est le fils d’un juif hongrois ayant émigré à Dublin et changé de nom. On peut aujourd’hui voir une plaque sur le mur de cette maison. Ulysse mentionne aussi Emorville Square, Lombard Street West et St. Kevin’s Parade. Le personnage de Bloom a tant marqué les esprits que le principal festival littéraire d’Irlande porte son nom (Bloomsday); il se tient tous les ans au mois de juin.
Ulysse
Moi, Rudolph Virag, résidant actuellement au numéro 52 Clanbrassil Street, Dublin, précédemment à Szombathely, Royaume de Hongrie, par la présente informe que j’entends dorénavant, en tout temps et toutes occasions, être connu sous le nom que j’ai assumé de Rudolph Bloom.
James Joyce, Ulysse, Paris, NRF, Gallimard, 1937.
La synagogue d’Adelaide Road , consacrée en 1892, a fermé ses portes en juin 1999. Celle de Greenville Hall , construite en 1920, abrite désormais les bureaux d’une société de haute technologie. On peut toujours admirer sur sa façade les colonnes grecques et les étoiles de David qui la décoraient à l’époque.

Il reste deux synagogues en activité. Parmi elles, la Dublin Hebrew Congegration , construite en 1935. Synagogue historique, le bâtiment est affiché en vente en 2023 à cause du déclin de la population juive locale, qui cherche un nouveau lieu d’accueil plus modeste. L’autre synagogue est la Dublin Jewish Progressive Congregarion (DJPC), de tendance libérale inclusive ouverte en 1946. Elle accueille les fidèles de la ville mais aussi régulièrement les touristes. N’affichant pas publiquement une adresse, elle peut être contactée par mail pour une visite.
Les juifs de Dublin sont enterrés au cimetière de Dolphins Barn, non loin du pont de Donore Avenue, sur le Grand canal.
Personne n’a été enterré au cimetière de Ballybough depuis 1908 mais la communauté juive maintient depuis lors un gardien chargé de la préservation du site.
Sur la petite maison de ce dernier, située à l’entrée du cimetière, on peut lire « construit en l’an 5618 ».
Interview d’Yvonne Altman O’Connor, directrice du Musée Juif Irlandais.
Jguideeurope : Pouvez-vous nous parler de quelques objets du musée retraçant la vie juive des communautés irlandaises et leur contribution à l’Irlande d’aujourd’hui ?
Yvonne Altman O’Connor : Le musée est situé dans la dernière synagogue d’époque, laquelle est préservée dans son état comme au début du XXe siècle. Nous disposons de nombreux objets de collection liés à l’histoire sociale de la communauté.
Parmi eux, des photos, lettres, documents et objets anciens reflétant les activités sportives, artistiques et sociales des membres de cette communauté. Nous avons également une cuisine cachère originale et une présentation de livres par et eu sujet d’auteurs juifs irlandais ou de thèmes liés.
Quel lieu rattaché au patrimoine juif de Dublin a une importance pour les visiteurs ?
Le Musée juif est la source principale concernant toute recherche liée au patrimoine juif. Les deux cimetières de la ville sont également des lieux visités régulièrement.
Vous avez récemment organisé un événement sur le personnage Leopold Bloom. Comment la perception du personnage de Joyce a-t-elle évolué dans l’imaginaire et quels furent les axes choisis ?
Nous avons présenté le contexte juif de l’histoire et du personnage de Leopold Bloom soulignant les questions liées à l’antisémitisme et au sionisme en Irlande à l’époque.
De plus amples recherches ont permises de révéler et de mettre en lumière des informations personnelles au sujet de Joyce et de son approche des personnages juifs aussi bien que celle du judaïsme.
Quelle est votre prochaine exposition ?
Nous avons actuellement une présentation consacrée au textile et une exposition en cours qui retrace la longue histoire de la diaspora.
Pour vous rendre au Musée, cliquez sur ce lien
Comme dans le reste du pays, la capitale écossaise n’a accueilli quasiment aucun juif avant le 18e siècle. On retrouve la trace administrative d’une demande d’installation d’un certain David Brown en 1691.

La première demande d’achat d’une tombe par un juif fut celle de Herman Lyon, un dentiste originaire d’Allemagne qui s’installa dans la ville en 1788.
Une vingtaine de familles fondèrent une communauté juive à Édimbourg en 1816. Son premier dirigeant fut Moses Joel of London. Il resta à ce poste près d’un demi-siècle. En 1825, la communauté acheta un local à Richmond Court pour y installer une synagogue. Il fut utilisé pendant quarante-trois ans.
Grâce à l’arrivée d’exilés de Russie et de Pologne fuyant les pogroms d’Europe de l’Est, la communauté s’agrandit. Ce qui motiva l’achat d’un lieu sur Graham Street pour y créer une synagogue. Le rabbin principal fut Salis Daiches, depuis 1918.
Il dirigea la communauté pendant 27 ans, unifiant les citoyens en construisant des ponts de l’amitié judéo-chrétienne. Et faisant face à la résurgence de l’antisémitisme qui sévissait au Royaume-Uni pendant l’entre-deux-guerres.

Il publia des livres parmi lesquels Aspects of Judaism (1928). Son frère Samuel Daiches fut un célèbre rabbin et auteur, également très engagé dans la vie institutionnelle.
Le renforcement de l’amitié judéo-chrétienne fut poursuivi par ses successeurs : Isaac Cohen et Jacob Weinberg. Ce dernier enseigna à l’Université d’Edimbourg, introduisant le patrimoine culturel juif à tous les Écossais à travers les Psaumes, les manuscrits de la mer Morte et les œuvres d’auteurs tels Maimonide et Agnon.
Le Edinburgh Hebrew Congregation accueille aujourd’hui la synagogue orthodoxe de la ville. Construite en 1932 pour accueillir 1000 personnes, elle a été reconstruite en 1980 et peut désormais accueillir 500 fidèles.

Il n’y a pas de commerce de bouche casher mais de nombreux produits peuvent être commandés dans les grandes chaines telles Sainsbury’s, Tescos et Morrisons. De la nourriture importée de Glasgow, Manchester et Londres.
La Edinburgh Hebrew Congregation organise régulièrement des déjeuners, principalement pour les retraités. Ce centre communautaire participe également aux festivités de la ville et organise des événements aux périodes de fêtes juives. Le nombre de juifs passa de 1 100 en 1968 à 763 en 2001.

Les synagogues de Glasgow sont principalement situées dans les faubourgs, où vit aujourd’hui la grande majorité des 6 500 juifs de la ville. La synagogue de Garnethill , datant de 1879, est la plus ancienne.
Comme dans le reste du pays, les premiers juifs à s’installer à Glasgow le firent principalement entre la fin du 18e siècle et le début du 19e. En 1831, on comptabilise 47 juifs à Glasgow, la plupart étant originaires d’Europe de l’Est.
A partir de 1833, Moses Lisenheim, le shohet de la ville, accueillit en sa demeure ce qui faisait office de synagogue. Deux ans plus tard, les juifs firent l’achat d’une parcelle pour y enterrer les morts.
Au milieu du 19e siècle, 200 juifs habitaient à Glasgow. La Glasgow Hebrew Congregation fut construite en 1858. Cela inaugura la construction d’autres synagogues dans la ville, principalement celle de Garnethill. Un développement parallèle à l’intégration de milliers de réfugiés juifs d’Europe de l’Est, fuyant les pogroms. Une partie d’entre eux poursuivit sa route vers l’Amérique du Nord et le reste s’installa à Glasgow. La population évolua à cette époque vers 4 000 juifs en 1897 et 6 500 en 1902.

Glasgow connut pendant les six premières décennies du 20e siècle un grand développement de sa vie juive. Et se différencia des autres villes écossaises par la présence d’une yeshiva et d’une école juive, La Glasgow University enseignant aussi les études bibliques et l’hébreu moderne. Parmi les grands professeurs universitaires, on peut citer Noah Morris, Michael Samuel et David Daiches Raphael. A noter aussi la présence du journal The Jewish Echo, un hebdomadaire fondé en 1928, rejoint en 1965 par The Jewish Times.
Si 13 400 juifs habitaient à Glasgow en 1969, ce chiffre tomba à 6 700 en 1995, puis 4 224 en 2001. Il y a aujourd’hui six synagogues à Glasgow. La Garnethill est la plus ancienne de Glasgow en activité. Elle a été construite par l’architecte John McLeod. Si vous souhaitez en savoir plus sur l’histoire des juifs d’Ecosse, vous pouvez adresser une demande au Scottish Jewish Archives Centre qui se trouve dans la synagogue de Garnethill. Créé en 1987, il abrite de nombreux objets retraçant les 200 ans de la vie juive écossaise. Parmi eux, plus de 6 000 photos et de nombreux manuscrits anciens, mais aussi des journées, des plaques, des tableaux et des sculptures. Le lieu est ouvert à tous, accueillant régulièrement des étudiants et des chercheurs.

La deuxième synagogue construite et encore en activité est Or Hadash . Datant de 1931, elle rencontre un succès grandissant depuis quelques décennies. Il s’agit de la seule synagogue libérale d’Écosse. Les quatre autres synagogues sont celle de Giffnock (construite en 1938), puis celles de Netherlee, Langside et la Shul in The Park.
Il y a plusieurs lieux où se restaurer. En particulier Mark’s Deli qui regorge de nombreux produits, mais aussi le restaurant L’Chaim et le café Sora’s qui jouxtent la synagogue Giffnock.
Interview avec Kerry Patterson au sujet de la synagogue de Garnethill et des Journées Européennes de la Culture Juive.
Jguideeurope : Pouvez-vous nous en dire un peu plus sur l’histoire de Garnethill ?
Kerry Patterson : La première communauté juive organisée à Glasgow remonte au début des années 1820, dans la High Street. Cinquante ans plus tard, la communauté, qui comptait alors environ 1000 personnes, avait dépassé les limites de ses différents locaux et cherchait à construire un foyer permanent. La décision de construire une synagogue à l’angle de Garnet Street et Hill Street a été prise en 1875, et de nombreux membres de la communauté se sont alors installés dans ce quartier en plein essor.
Benjamin Simon, l’un des administrateurs de la synagogue, pose la première pierre en 1877. Conçue par John McLeod et Nathan Solomon Joseph, la première synagogue spécialement construite en Écosse a été inaugurée en 1879 et est rapidement devenue un exemple architectural emblématique du style victorien.

Organisez-vous cette année un événement ou une exposition pour promouvoir le patrimoine juif ?
Le 27 juillet, nous avons lancé le Centre du patrimoine juif écossais, dans la synagogue de Garnethill. Le centre facilite le partage d’informations sur le bâtiment classé catégorie A, sur les collections uniques du centre d’archives juives écossaises et sur les aspects de l’histoire et de la culture juives écossaises. Une expérience permettant aux visiteurs de découvrir nos 200 ans d’expérience de la vie juive écossaise. Le centre est un projet de partenariat entre le Scottish Jewish Archives Centre (SJAC), le Garnethill Synagogue Preservation Trust (GSPT) et la Garnethill Hebrew Congregation, tous basés dans la synagogue Garnethill.
Des fonds importants nous ont permis de mettre en place de nouvelles expositions d’interprétation, une salle d’étude abritant une bibliothèque de référence spécialisée dans l’époque de l’Holocauste, des ressources de recherche numériques et une installation pour les visites scolaires. Parallèlement, d’importants travaux de restauration et de rénovation du bâtiment au niveau inférieur de la synagogue ont permis d’améliorer l’accès du public à des espaces sous-utilisés. Les nouvelles expositions aident les visiteurs à comprendre la période compliquée de 1933 à 1950, lorsque l’Écosse a accueilli des réfugiés fuyant les persécutions nazies en Europe.
Plus important encore, le partage de ce patrimoine avec les générations futures. Les élèves des écoles en visite pourront utiliser des kits d’apprentissage interactifs, basés sur les collections de réfugiés de l’époque de l’Holocauste conservées dans nos archives. Parmi ces ressources disponibles, les expériences poignantes des réfugiés Dorrith Sim, Ernst Marchand et Hilda Goldwag qui ont fui l’Europe et ont trouvé un refuge sûr ici, en Écosse. Les élèves pourront réfléchir à des questions plus larges de citoyenneté, de démocratie, de persécution et d’appartenance, à travers les expériences des réfugiés.
Pour en savoir plus, consultez le site www.sjhc.org.uk
La communauté juive de cette petite ville a connu les conséquences les plus sanglantes de l’antisémitisme du XIIe siècle.

Les juifs y étaient bien implantés, parmi les bourgeois auxquels ils rendaient des services financiers. Mais la mort du roi Henri II, protecteur des juifs, et le couronnement de Richard Ier, dit Richard Cœur de Lion, provoquèrent des émeutes antijuives.
Le massacre de Clifford’s Tower
Et c’est lors de l’absence du roi, parti en croisade, le 16 mars 1190, que les barons, débiteurs des usuriers juifs, décidèrent d’assiéger le château (Clifford’s Tower) où ils s’étaient réfugiés. Acculés, certains se suicidèrent ; les autres furent massacrés.
Aujourd’hui, un édifice en pierre se dresse sur le site de l’ancien château en bois et les visiteurs du monument peuvent en apprendre davantage sur ce terrible massacre.
La synagogue Aldwark a été au service de la communauté juive de York de 1886 à 1975. Cependant, avec le déclin de la communauté, celle-ci s’est vue affiliée à la communauté de Leeds United Hebrew Congregation pour les services religieux et les inhumations. Selon le recensement de 2001, la population juive de York s’élève à près de 200 membres. Une nouvelle communauté libérale a été établie en 2014.
Ces dernières années, Leeds, un des centres économiques principaux en Angleterre après Londres et un lieu offrant une vie culturelle très riche, a attiré de nombreuses familles, également grâce à une vie agréable et relativement plus sécurisée que dans de nombreuses villes. Un nouveau souffle incarné notamment par le très actif centre communautaire MAZCC. Lequel réunit les différentes générations autour de services sociaux et éducatifs et d’événements familiaux et culturels. Avec une place particulière accordée aux programmes pour la jeunesse, notamment la formation des futurs cadres associatifs.
Moins de 10 000 Juifs vivent encore aujourd’hui dans cette ville du Yorkshire. Ils s’y installent vers 1840, puis de plus en plus après les persécutions en Russie entre 1881 et 1905. L’industrie de la laine prend un essor très important et cette ville est témoin de la première grève organisée spontanément par des ouvriers juifs en 1885. Les habitants des quartiers de Chapeltown et de Leylands ont migré vers des zones plus aérées, comme Moortown, au nord de Leeds. On y trouve plusieurs synagogues – dont la plus fréquentée est celle de Beth Hamedrash –, des restaurants, des boucheries et quelques librairies spécialisées.

Les origines de Marks & Spencer
La présence juive à Leeds semble dater de la fin du 18e siècle. Néanmoins, la première synagogue ne fut construite qu’au milieu du 19e siècle et inaugurée en 1860, les juifs utilisant une pièce faisant office avant cela. Une centaine de familles juives habitaient alors Leeds.
Les réfugiés juifs d’Europe de l’Est s’installant à Leeds s’intégrèrent largement dans la classe ouvrière de l’industrie de la confection. Parmi ceux qui participèrent à son développement, Montague Burton et Michael Marks. C’est à Leeds, en 1884, que ce dernier fonda avec Thomas Spencer la chaine Marks & Spencer.
Ainsi, lors de son âge d’or, la communauté juive comptait 25 000 personnes dans les années 1920. Au début des années 1970, la ville comptait 18 000 Juifs sur un peu plus de 500 000 habitants. Ce qui en fit la troisième communauté juive anglaise, après Londres et Manchester.
La 3e communauté juive anglaise
Le Leeds Jewish Representative Council, créé en 1938, rassemble la majorité des synagogues de la ville. Parmi les personnalités de la ville, Hyman Morris et J.S. Walsh, anciens maires de Leeds et l’universitaire Shimon Rawidowicz.

À la fin des années 1970, la population juive commença à décliner, arrivant à 9 000 au milieu des années 1990 et un peu plus de 8 000 en 2001. À l’image de ce déclin, des commerces cashers fermèrent leur porte au début du 21e siècle dans le quartier de Moortown. Les synagogues tentent de se regrouper afin de pouvoir continuer à fonctionner. Néanmoins, la communauté multiplie les efforts pour motiver les jeunes à s’investir et à maintenir le fonctionnement des institutions. Ces efforts, auxquels s’ajoute la flambée du cout de la vie à Londres, motivent d’ailleurs des jeunes à revenir. Les initiatives sociales et culturelles ont été amplifiées pendant la crise du Covid.
Déclin de la présence juive dans la région
En 2025, il y aurait entre 6 000 et 10 000 juifs à Leeds. Les petites villes aux alentours de Leeds où il y avait également une forte présence juive sont encore plus marquées proportionnellement par ce déclin. La synagogue Beth Hamidrash Hagadol , inaugurée en 1937, est aujourd’hui la plus grande de Leeds. La United Hebrew Congegration réunit plusieurs anciennes synagogues depuis 1930. Il y a également d’autres courants juifs présents par l’intermédiaire de la Reform Sinai Synagogue , la Conservative Leeds Masorti , ainsi que le Lubavitch Centre .
Il y a plusieurs cimetières juifs à Leeds. Parmi eux, le BHH cemetery , le New Farnley Cemetery , le Sinai Section of the Harehills Cemetery et le UHC Cemetery .
Située sur les rives de la Mersey, Liverpool peut s’enorgueillir d’avoir accueilli, au XIXe siècle, la communauté la plus importante du nord de l’Angleterre. Aujourd’hui, celle-ci se rassemble autour de Dunbabin Road, sur laquelle est située Harold House, le centre de la culture juive de la ville.
La magnifique synagogue Princes Road
L’une des plus belles synagogues d’Angleterre se trouve à Liverpool : la synagogue de Princes Road , consacrée le 3 septembre 1874, dans laquelle on admirera particulièrement un intérieur de style victorien tardif. Il est nécessaire de téléphoner avant.

Les juifs se sont probablement installés à Liverpool au début du XVIIIe siècle. 20 y vivaient en 1790. En 1860, leur nombre s’élevait à 3000. À la fin du XIXe siècle, une partie des réfugiés russes et polonais, en route pour les États-Unis, s’y installèrent. Une communauté sépharade du Levant s’y installa à cette période aussi. La synagogue libérale date de 1928. Celle de Greenbank Drive est également considérée comme importante dans le patrimoine juif de Liverpool. Au début du XXe siècle, une yeshiva, une école et des services sociaux se créèrent.
Les projets de transformation, depuis sa fermeture en 2008, de la synagogue de Greenbank en immeuble d’appartements gardant la structure originale semblent prendre beaucoup de temps à se concrétiser.
Elle a été construite en 1936 par l’architecte Ernest Alfred Shennan, pouvant accueillir jusqu’à 700 personnes. À son apogée dans les années 1950, près de 600 fidèles en étaient membres. Le déclin de la communauté juive de Liverpool, avec seulement une centaine de fidèles dans cette synagogue au tournant du 21e siècle, força la vente de la synagogue.
Les seules synagogues actives de Liverpool sont Childwall et Princess Road, cette dernière étant surtout utilisée pour les grands événements tels bar et bat mitsvah et mariages.
En janvier 2025, l’équipe des moins de 18 ans de Liverpool a effectué une visite au musée juif Manchester, dans le cadre des 80 ans de la libération d’Auschwitz. Cela afin de permettre aux jeunes de mieux connaitre le judaïsme et l’histoire de la Shoah, ainsi que de lutter contre les préjugés.
En septembre 2024, la synagogue de Princess Road célébra ses 150 ans. De nombreux événements furent organisés : concerts, conférences, visites guidées, cérémonies…
Il y aurait, en 2025, environ 2 000 juifs à Liverpool.
Participation des juifs au rayonnement de la ville
Les liens de la population juive avec la ville sont très forts depuis le début. Reconnaissants pour l’accueil et l’accès à tous les niveaux de la société, bien plus que dans la majorité des autres villes anglaises, les réfugiés juifs encouragèrent vivement leurs enfants à s’intégrer, en premier lieu à l’école, et à participer au rayonnement de la ville.

D’où le grand nombre de personnalités locales, hommes politiques (parmi eux plusieurs maires et cela depuis la fin du XIXe siècle), avocats. Également deux familles importantes. Tout d’abord les Lewis, fondateurs du grand magasin Lewis ouvert de 1856 à 2010 (sur lequel se trouve la célèbre statue de Jacob Epstein rendant hommage à la renaissance de Liverpool après la Seconde Guerre mondiale).

Brian Epstein, le manager des Beatles
Puis, la famille Cohen, dont la bibliothèque de l’université de Liverpool porte aujourd’hui le nom. Ces deux familles ont d’ailleurs financé de nombreuses institutions locales et participé activement au rayonnement de la ville depuis bien longtemps.
Parmi les personnalités juives de la ville, on peut mentionner le dirigeant sioniste Samuel Jacob Rabinowitz, le futur Grand rabbin d’Israël Isser Yehudah Unterman et bien sûr Brian Epstein, le manager des Beatles qui découvrit le groupe dans une salle obscure et l’accompagna dans son fabuleux parcours.
Cynthia Lennon, la première femme de John, déclara même que « Brian a été effacé de la mémoire collective concernant les Beatles, que sans lui ils n’auraient jamais été propulsés ». Quant à Sir Paul McCartney il estime que si une personne devait être considérée comme le cinquième Beatles ce serait Brian Epstein.
Interview de Howard M Winik, ancien directeur du Merseyside Jewish Representative Council
Jguideeurope: Quel est le rôle du MJRC et quels sont ses futurs défis ?
Howard M Winik : Le MJRC est l’organisation-cadre de la communauté qui fournit le leadership pour les juifs de toute obédience de Liverpool, Wirral, Southport et Chester, qu’ils soient orthodoxes, libéraux, massortis ou non affiliés. Nous comptons actuellement environ 3000 membres, ainsi qu’une infrastructure bien en place qui inclut une synagogue, des écoles, un organisme d’aide sociale et un foyer d’accueil. Il y a plusieurs universités locales et nous proposons des activités pour chaque groupe d’âge.
Le nombre de membres reflète l’évolution de la vie active des 20 à 30 années passées, lorsque beaucoup de jeunes sont partis à Londres et ailleurs afin de trouver du travail. Néanmoins, notre région a connu récemment une régénération significative de la population en général, ce qui explique une stabilisation du nombre de juifs.
Un phénomène encouragé par des investissements régionaux considérables dans la science et les secteurs de la biotechnologie qui attirent des jeunes. Nous sommes donc assez optimistes concernant l’avenir. Cela dit, nous sommes entièrement autonomes financièrement et notre défi principal est de trouver des ressources pour financer les services que nous fournissons.

Comment est partagé le patrimoine juif à Liverpool ?
Nous encourageons les gens à visiter nos musées. Le Musée de Liverpool (proche du port de croisière) dispose d’une excellente section qui décrit l’histoire de la communauté juive, qui fut assez grande et vécut principalement au centre-ville. Les touristes peuvent réserver des visites dans nos synagogues locales. Parmi elles, la Liverpool Old Hebrew Congregation, située à Princes Road, présente fièrement un immeuble magnifique inscrit au patrimoine local, décoré dans un style baroque, un des plus raffinés qui soit. Elle se trouve à côté du Pier Head et du centre-ville. Des cimetières juifs locaux sont également ouverts aux visites. Celui de Deane Road a été entièrement restauré et représente un certain intérêt historique national (vous pouvez contacter la synagogue de Princes Road pour ces visites). Liverpool a également un centre Chabad et une chapellenie d’étudiants active. Nous avons partagé avec la ville de Liverpool un grand nombre d’archives historiques. Des requêtes particulières peuvent être réalisées auprès des responsables des archives, des musées ou de notre bureau au centre communautaire Shifrin.

Le Musée des Beatles consacre-t-il une part importante à l’influence de leur manager Brian Epstein ?
On y trouve un grand nombre d’informations sur les Beatles, la famille Epstein et l’histoire de la musique pop, dans ce musée et ailleurs. Brian Epstein est enterré au Long Lane cemetery, proche de la Greenbank Synagogue au nord de Liverpool. Dans ce cas également, les visites se font par réservation. Et bien entendu, nous encourageons les touristes à prendre un des bus spécialisés qui font visiter le patrimoine des Beatles lié à la ville.
Avec près de 30 000 juifs, cette ville comprend la communauté juive la plus importante de Grande-Bretagne après Londres.
La présence juive mancunienne semble dater de la fin du 18e siècle, une bonne partie d’entre eux étant originaires de Liverpool. Sa première synagogue fut construite à cette époque, sous l’impulsion des frères Lemon et Jacob Nathan. Elle s’installa à Garden Street en 1794, puis à Ainsworth Court en 1806, à Halliwell Street en 1825 et enfin à Cheetham Hill en 1856, terminant jusqu’à la fin des années 1970 ce long cycle nomade. Un terrain permettant de servir de cimetière juif fut acquis en 1794.

Le développement du judaïsme mancunien
En 1856, une synagogue libérale vit le jour. En ces temps arrivèrent également des juifs d’Europe de l’Est fuyant les persécutions. En 1871, des juifs d’Afrique du Nord et du Moyen-Orient s’installèrent à Manchester. Et à la fin du 19e siècle, suite aux événements politiques d’Europe de l’Est, d’autres réfugiés juifs traversèrent la Manche. Suite à ces arrivées, deux nouvelles synagogues furent construites en 1871. La première sur Oxford Road pour les juifs habitant au sud de la ville. La seconde sur York Street est de rite sépharade.
Petit à petit, les juifs mancuniens quittèrent le centre-ville pour la banlieue et les petites villes environnantes. À Salford, Prestwich et Whitefield au nord. A Cheshire au sud. Ils travaillèrent en grande partie dans les artisanats et l’industrie du tissu. Le développement éducatif et culturel se développa aussi avec, par exemple, la création du journal Jewish Telegraph.
En 1910, la ville comptait en son âge d’or près de 70 synagogues pour 35 000 juifs. Parmi les personnalités juives de Manchester, le dirigeant travailliste Harold Laski, l’auteur Louis Golding, l’homme d’affaires Harry Sacher et un des dirigeants historiques de Marks & Spencer Israel Seiff, mais aussi Chaim Weizmann, le futur premier président israélien qui y vécut de 1904 à 1916. Israel Seiff rassembla d’autres hommes d’affaires pour récolter les fonds qui permirent la création de l’Institut Weizmann en Israël.
Pendant la Seconde Guerre mondiale, Manchester accueillit des réfugiés juifs. La communauté fut alors très active pour participer à l’effort de guerre britannique.
Déclin et renaissance de la vie juive au tournant du siècle
La population juive de Manchester commença à décliner à partir des années 1970. Ainsi, vingt ans plus tard, ils étaient 27 000, puis moins de 22 000 en 2001. Avec à l’époque 32 synagogues, dont une immense majorité étant de courant orthodoxe. La plupart des juifs mancuniens habitèrent dans les banlieues de Bury et Salford.

En 2011, la population juive augmenta pour représenter 25 000 Mancuniens, puis en 2025 près de 30 000. Néanmoins, les juifs mancuniens furent victimes de nombreuses attaques antisémites depuis une dizaine d’années. Attaques régulières sur personnes et sur le cimetière juif, lorsqu’en 2018 des dizaines de stèles furent détruites. Une étude détermina en cette même année une augmentation de ces attaques de 25 %.
Parmi les synagogues actives aujourd’hui, la Bowdon Shul inaugurée en 1873 et qui est la plus ancienne congrégation du sud de Manchester, la Mead Hill Shul datant de 1904, la Heaton Park Hebrew Congregation de courant orthodoxe et fondée en 1935 et la Menorah Synagogue membre du mouvement réformé et servant également de centre culturel juif pour les habitants du sud de Manchester.
Parmi les cimetières juifs de Manchester, à noter ceux de Whitefield , Urmston , Southern , Pendleton , Rainsough et Prestwich Village .
Rénovation et agrandissement du Musée juif de Manchester
Le Le Musée juif de Manchester a été créé en 1984 afin de partager l’histoire de leur présence dans la ville ainsi que leur contribution à son évolution. Il est situé dans l’ancienne synagogue espagnole et portugaise de Cheetham Hill construite en 1874. Derrière sa façade de briques rouges, l’architecture du musée mêle les styles victorien et mauresque.
Le musée a été rénové et modernisé. Sa réouverture et son extension en mai 2021 permirent au public de découvrir les travaux entrepris. Parmi les objets présentés, ceux ayant appartenu à la réfugiée juive Helen Taichner racontent son périple et sa joie et son soulagement d’avoir pu obtenir un visa pour l’Angleterre et s’installer à Manchester. Dans le même esprit sont présentées les différentes venues de juifs des trois continents et leur participation active au développement de Manchester.
La ville a souffert de nombreuses attaques antisémites, montant en flèche depuis le pogrom du 7 octobre 2023 en Israël. Ne manquant malheureusement pas d’imagination, l’antisémitisme s’attaque à toutes sortes de cibles. Ce fut le cas fin 2024 lorsque les deux bustes de Chaïm Weizmann furent dérobés à l’Université de Manchester. Celui qui fut le premier président de l’État d’Israël enseigna dans cette même université au début du 20e siècle.
En janvier 2025, l’équipe des moins de 18 ans de Liverpool a effectué une visite au musée juif Manchester, dans le cadre des 80 ans de la libération d’Auschwitz. Cela afin de permettre aux jeunes de mieux connaitre le judaïsme et l’histoire de la Shoah, ainsi que de lutter contre les préjugés.

Une ancienne synagogue d’Oxford a été transformée en taverne, puis englobée dans un des plus vieux collèges de l’université : Christ Church. Il en existe cependant une nouvelle, construite en 1974, sur l’endroit où se trouvait une synagogue construite en 1880. Seul un mur de l’ancien édifice subsiste.
Les communautés juives de Londres sont diverses, tant par leur implantation géographique que par leurs origines ou leurs rites. La présence juive à Londres est attestée à partir du 11e siècle. Sous le règne de William II (1087-1100), qui semble avoir favorisé leur venue, afin de contribuer notamment au développement économique de la région. Parmi les œuvres importantes de l’époque, celles d’Abraham ben Meir Ibn Ezra, Iggeret Hashabbat et Yessod Mora, écrites à Londres au milieu du 12e siècle.
Situation des juifs fluctuante selon les rois
Sous Henry II (1154-1189), de nombreux juifs s’installèrent dans la ville. Néanmoins, sous Richard I (1189-1199) qui lui succéda, une vague antisémite apparut, notamment dès le couronnement du nouveau roi avec l’attaque du quartier juif, lors de laquelle trente personnes furent assassinées, parmi lesquelles le tossafiste Jacob d’Orléans.

Si la situation des juifs londoniens se stabilisa à nouveau lors du 13e siècle, ils furent soumis à des impôts très élevés par la couronne. Des accusations antisémites de crimes rituels permirent aux autorités de justifier des taxations supplémentaires, lorsque les caisses du royaume se vidèrent ou lors des conflits entre nobles. Dans les années 1260, ces injustices résultèrent aussi dans une série de meurtres de juifs.
Sous Edward I (1274-1307), les juifs londoniens furent interdits de certaines activités économiques. En 1283, l’évêque de Londres ordonna la fermeture des synagogues. Sept ans plus tard, en 1290, l’Angleterre expulsa les juifs du royaume. Parmi les figures emblématiques qui marquèrent cette époque, on peut noter Jacob ben Judah, auteur du Etz Hayim, Joseph ben Jacob et le rabbin Moses of London.
Un très petit nombre de juifs tentèrent de se réinstaller au fil des trois siècles qui suivirent, mais les conditions furent assez rudes et le résultat final souvent l’expulsion. Au 17e siècle, les juifs purent à nouveau s’y installer. Une partie venant de France et d’autres issus des pays où sévissait encore l’Inquisition.
La synagogue historique de Bevis Marks
Sous Oliver Cromwell (1653-1658), la communauté fut entendue concernant les difficultés et menaces endurées. En 1656, une synagogue put voir officiellement le jour sur Creechurch Lane. En 1701, fut construite la toujours célèbre synagogue de Bevis Marks. Parmi les érudits de cette époque, on note David Nieto, Jacob Abendana et Joshua da Silva. Suite à l’accession au pouvoir de Guillaume d’Orange, des juifs du royaume de Hollande s’installèrent à Londres. Suivis par des juifs de Hambourg.

Les différentes communautés se développèrent au long du 18e siècle. En 1722 fut construite la synagogue de Duke’s Place. Quatre ans plus tard, ce fut le tour de la Hambro Synagogue. En 1761 fut inaugurée à Westminster, la première synagogue (commune actuellement sous le nom de la Western Synagogue) située en dehors du quartier de la City.
Si le 18e siècle fut celui de l’officialisation de la présence juive et la reconnaissance de ses institutions religieuses et associatives, le 19e permit aux juifs d’accéder aux mêmes activités économiques et fonctions politiques que les autres citoyens londoniens. Ainsi, David Salomons devint le premier maire juif de la ville en 1855. Le courant libéral vit également le jour à cette époque, preuve supplémentaire de la diversité culturelle et religieuse de la communauté juive de Londres.
Intégration des juifs d’Europe de l’Est
À la fin du 19e siècle, suite aux pogroms en Europe de l’Est, de nombreux juifs de cette région s’installèrent également à Londres. Il y avait alors ainsi près de 150 000 juifs londoniens, dont 100 000 habitaient dans le East End. Parmi eux, de nombreux tailleurs, une dizaine de milliers. Ils firent grève en 1889 contre les conditions très dures de ce métier et l’exploitation discriminatoire par les employeurs de leur statut d’immigrants.
Au début du 20e siècle, l’immigration des juifs fut ralentie par la politique migratoire votée en 1905, mais une partie de réfugiés réussirent à s’y installer, notamment à l’approche de la Seconde Guerre mondiale, tandis que ceux qui y vivaient déjà virent l’ascension d’un mouvement fasciste. À cette époque, les juifs londoniens se concentrèrent moins dans le East End, choisissant notamment les quartiers nord de Golders Green et Stamford Hill.
Evolution contemporaine du judaïsme londonien
Cette évolution géographique se poursuivit après la guerre. Notamment dans les quartiers de Harrow, Wembley, Edgware, Stanmore, Finchley, Ilford et Palmers Green. À la fin des années 1970, il y avait 280 000 Juifs londoniens. Néanmoins, ce chiffre est en baisse depuis. Il est passé à 210 000 en 1988, 195 000 en 2002 et en 2025 à 160 000.
Les communautés orthodoxes et hassidiques se trouvent principalement dans le nord de la ville (Stamford Hill). Pour tout renseignement concernant les offices, s’adresser au très aimable Board of Deputies of British Jews .

Pour une première découverte, on peut effectuer une visite guidée de la Londres juive. Pour ce faire, s’adresser aux Stepping out Walking Tours organisés par des guides professionnels de la City of London ou des Blue Badge Guides. En outre, le Musée juif propose de nombreux tours de l’East End, incluant la visite de certaines synagogues normalement fermées au public.
Une visite au British Museum s’impose. On y trouve, dans le cadre de la bibliothèque hébraïque, une impressionnante collection de manuscrits (3000 pièces) qui représente l’une des plus importantes du monde de bibles, de talmuds, de kabbales et de haggadot. Souvent enluminés, ils viennent de toute l’Europe et certains datent de plus de 1000 ans. On y trouvera aussi l’original de la déclaration Balfour de 1917.
Enfin, une visite à la Guildhall Library , spécialisée dans l’histoire de la ville de Londres, permettra de consulter de nombreux documents concernant l’implantation juive dans la capitale britannique.
Dans les caves des masures de la vieille ville se déroule, durant trois siècles, une histoire juive clandestine. Venus d’Espagne, des conversos s’installent à Bordeaux dès 1474. Habitués à cacher leur foi en Espagne, ces « nouveaux chrétiens » continuent à pratiquer secrètement leur religion d’origine en France.

D’anciens textes inscrivent la présence des juifs à Bordeaux dès le 6e siècle. Un document datant de 1072 évoque un « Mont-Judaïque » qui se serait trouvé aux abords de l’ancienne ville de Bordeaux, où se situent actuellement les rues Mériadec et Dauphine. C’est d’ailleurs dans ce secteur de la ville que se trouvait le cimetière juif.
Lorsque la ville de Bordeaux fut sous domination anglaise (de 1154 à 1453), les juifs durent faire face aux menaces d’expulsion et de taxation élevées imposées par les Britanniques ainsi que par les régents. Les juifs de Bordeaux étaient alors organisés sous la bannière de « Communauté des juifs de Gascogne ».

L’Inquisition provoqua le départ de nombreux juifs d’Espagne et du Portugal. Une partie de ceux-ci arrivèrent à Bordeaux. Ainsi, de nombreux Marranes s’établirent dans la ville au milieu du 16e siècle. Néanmoins, cette acceptabilité sous-tendait une vie chrétienne de ces juifs portugais qui ne purent reprendre leurs rites anciens. Un décret municipal souligna en 1734 que la pratique de la religion juive était interdite. Un rapport établi en 1753 s’offusqua du fait que cette religion fut pratiquée dans sept lieux désignés comme des synagogues alors qu’il s’agissait en fait de lieux de prières privés en appartement.
En 1725, les juifs portugais achetèrent un terrain qui leur permit de disposer d’un cimetière . Il fut utilisé jusqu’à la Révolution française et fut définitivement fermé en 1911. Les juifs avignonnais achetèrent un cimetière en 1728 qui fut en service jusqu’en 1805. Un troisième cimetière fut ouvert en 1764 qui fut utilisé par l’ensemble de la communauté juive de Bordeaux.

Le nombre de juifs à Bordeaux était encore relativement peu élevé au début du 18e siècle. En effet, la communauté de Bordeaux et les juifs avignonnais totalisèrent moins de 1800 personnes. Cela n’empêcha pas les menaces d’expulsion durant ce siècle.
À la veille de la Révolution française, les juifs de Bordeaux envoyèrent deux représentants aux réunions organisées par Chrétien-Guillaume de Lamoignon Malesherbes, conseiller de Louis XVI, pour débattre de la condition juive en France. Lorsque cette assemblée décida au bout du compte de reporter une décision sur le statut des juifs et leurs droits à l’égalité en tant que citoyens, sept représentants de la communauté de Bordeaux plaidèrent leur cause face aux autorités parisiennes. En attendant, la Déclaration des droits de l’Homme adoptée le 26 août 1789 met un terme à toute discrimination vis-à-vis des citoyens. Néanmoins, les Constituants ne s’accordent pas sur le statut des juifs. Cela aboutit à un décret partiel datant du 28 janvier 1790 qui stipulait que les juifs portugais devenaient les premiers citoyens actifs. L’émancipation de tous les juifs de France sera réalisée un an plus tard, le 27 septembre 1791.
Lorsqu’en 1806 un recensement fut présenté, on dénombra 2131 juifs à Bordeaux. Parmi eux, 1651 originaires d’Espagne ou du Portugal, 336 d’origine hollandaise, allemande ou polonaise et 144 avignonnais. Abraham Furtado, qui avait participé à la Commission Malesherbes, est également présent à l’Assemblée de 106 notables réunie par Napoléon où il représente la Gironde. Il sera d’ailleurs membre de la municipalité de Bordeaux et deviendra maire-adjoint. Suite aux sessions du Grand Sanhedrin qui se déroulèrent un an plus tard, le Consistoire de Bordeaux eut la charge de dix départements.
Abraham Andrade fut nommé Grand rabbin. La Grande synagogue de la rue Causserouge fut ouverte en 1809, permettant aux juifs de Bordeaux de quitter les salles de prières recluses. Elle fut dessinée par l’architecte Armand Corcelles, dans un style oriental.

Durant ces années, une école juive et un talmud torah furent ouverts. L’égalité des droits et des devoirs motiva également une participation à la fonction publique et à la vie politique. Ainsi, des juifs bordelais participèrent aux conseils municipaux et des personnalités comme Salomon Camille Lopès-Dubec, Joseph Rodrigues et Adrien Léon furent élus à l’Assemblée nationale.
La Grande synagogue de Bordeaux fut détruite par un incendie en 1873. Ce qui motiva la communauté à confier le projet de réalisation d’une nouvelle synagogue aux architectes Paul Abadie et Charles Durand. La synagogue de Bordeaux fut inaugurée en 1882. L’inspiration architecturale s’inspira d’un style mélangeant le gothique et l’oriental. La décoration intérieure est d’inspiration syrienne, ottomane, égyptienne et mauresque. Le tout donnant un bâtiment majestueux et très original.
Durant la Seconde Guerre mondiale, l’occupation à Bordeaux fut très brutale. 1600 juifs furent déportés grâce au zèle de la Collaboration et de ses dirigeants. Parmi eux, Maurice Papon, le sous-préfet en charge des réquisitions allemandes, du service de l’occupation et du bureau des questions juives. En 1998, il fut condamné à dix ans de réclusion criminelle. Un monument a depuis été érigé en leur mémoire.

La grande synagogue fut pillée pendant la Shoah et transformée en lieu de rassemblement précédant les déportations. Après la guerre, la synagogue fut restaurée, devenant la plus grande synagogue de rite sépharade de France.
Depuis, la communauté juive de Bordeaux s’est agrandie avec l’arrivée d’une nouvelle congrégation ashkénaze et la venue juifs d’Afrique du Nord dans les années 1960.
Parmi les lieux de vie culturelle juive, on trouve le Centre Yavné , ouvert en 2000, suite à la fermeture du Centre communautaire de Bordeaux de la place Charles Gruet. La ville bénéficie d’un Beth Halimoud créé il y a une dizaine d’années par Sébastien Allali.
Autre lieu important de la ville à visiter, le Centre national Jean Moulin de Bordeaux , nommé en hommage au grand résistant. Créé à l’instigation de Jacques Chaban-Delmas en 1967, ce musée et centre de documentation sur la Seconde Guerre mondiale présente des collections consacrées à la Résistance, à la Déportation et aux Forces Françaises Libres.
Le cimetière juif établi en 1764 est aujourd’hui le seul en activité. Les tombes du 18e siècle sont de simples dalles rectangulaires. Au siècle suivant, cippes, sarcophages, cénotaphes et stèles en forme de tables de la loi sont utilisés.
Le 10 janvier 2024, la communauté juive a marqué les 80 ans de la rafle des Juifs de Bordeaux. L’hommage s’est déroulé dans la synagogue bordelaise, où les noms des 365 personnes arrêtées les 10 et 11 janvier 1944 puis emmenées à Drancy ont été lus. Parmi la cinquantaine d’enfants présents enfermés dans la synagogue, se trouvait Boris Cyrulnik, âgé à l’époque de six ans. L’auteur, qui a survécu à la rafle en se cachant dans l’édifice, a participé à cette cérémonie. Une cérémonie soulignant l’importance de la transmission de la mémoire et la lutte contre la résurgence accrue de l’antisémitisme depuis deux décennies et en particulier depuis le 7 octobre 2023.
Le jour de Ticha Beav – commémoration de la destruction du Temple de Jérusalem –, ces mots espagnols résonnent dans la vieille synagogue : « Hemos perdido Sion pero tambien hemos perdido España tierra de consolacion » (« Nous avons perdu Sion, mais nous avons perdu aussi l’Espagne terre de consolation »).

La synagogue de Bayonne a été construite en 1837, mais son arche sainte, souvenir de l’ancien lieu de culte, remonte au règne de Louis XVI. On dit même que certains rouleaux de Torah proviendraient de l’Espagne d’avant l’expulsion de 1492 et auraient été rapportés par les marranes fuyant les persécutions.
Les travaux de restauration du cimetière juif de Bayonne ont débuté en 2010 à l’initiative du Musée juif de Bruxelles. À l’origine du chantier, les deux chercheurs Olivier Hottois et Philippe Pierret, soutenus par la Direction régionale des affaires culturelles (Drac) d’Aquitaine, la mairie de Bayonne et l’Association cultuelle israélite de Bayonne-Biarritz, s’appuient aussi sur un réseau de jeunes bénévoles européens, notamment issus de l’Aktion Sühnezeichen Friedensdienste, association allemande créée après la Seconde Guerre mondiale pour éveiller le peuple allemand à sa responsabilité dans la barbarie nazie.
Le chocolat à Saint-Esprit les Israélites
Au XVIIe siècle, les juifs venus d’Espagne furent chassés de Bayonne et s’installèrent dans le faubourg de Saint-Esprit qui devint alors, dans le langage populaire, Saint-Esprit-les-Israélites, car la population juive y était majoritaire, fait rarissime en France. C’est un juif originaire d’Espagne, Gaspar Dacosta, qui introduisit à Saint-Esprit et dans la France du XVIIe siècle l’art du chocolat !
Le musée du Judaïsme bayonnais Suzanne et Marcel Suarès , inauguré le 2 novembre 2022, rend en particulier hommage aux Marranes, Juifs espagnols et portugais, retraçant l’histoire du judaïsme régional. Il est situé rue Maubec, à proximité de la synagogue de la ville. Le musée retrace ainsi leur parcours et présente cette communauté. L’endroit a notamment pour ambition de montrer l’apport des juifs bayonnais à la ville.
Le musée d’Art et d’Histoire de Narbonne conserve la plus ancienne inscription se rapportant à la présence juive en France. Il s’agit d’une épitaphe pour les trois enfants de Paragorus: Justus, trente ans, Matrona, vingt ans, et Dulciorella, neuf ans. La preuve absolue de la judéité de l’inscription est donnée par la présence d’un chandelier à sept branches ainsi que par le petit texte en hébreu : « Paix sur Israël ». Ce même musée conserve une autre inscription funéraire.

La présence juive à Narbonne semble dater au moins du 5e siècle comme le confirment des lettres écrites en 470 et 473. Au 7e siècle, des pierres retrouvées avec des inscriptions en hébreu et en latin attestent de cette présence. Comme l’affirme le hors-série du Midi Libre consacré aux Juifs d’Occitanie, selon une légende Charlemagne aurait octroyé de nombreux privilèges aux juifs suite à sa conquête de Narbonne. Parmi eux, la possibilité d’avoir un « roi », un représentant important de la communauté.
Dans ses Carnets de voyage, Benjamin de Tudèle indique que Narbonne est connue pour ses prouesses scientifiques et désormais bibliques, grâce à l’apport des juifs notamment.
Parmi les grands savants, il mentionne le rabbin Kalonymos. Il eut d’ailleurs le privilège de pouvoir sceller des actes publics d’un sceau sur lequel figurait le lion de Juda. Et aussi Jaccaben Jekar, un des maitres de Rachi.

A partir du 12e siècle, la population juive narbonnaise de cette ville florissante du Moyen Age augmente, principalement suite à la venue de juifs andalous.
Parmi eux, de grands chercheurs scientifiques, littéraires et talmudistes. Qui partagent ces savoirs en différentes langues, qu’il s’agisse de l’espagnol, de l’arabe, langues d’origines, et de l’hébreu et du français, langue du pays d’accueil. David Kimchi, un de ces grands chercheurs et fils d’un exilé, est l’auteur du Sefer Hashorashim.
La communauté juive de Narbonne contribue à l’essor de la ville et profite d’une grande liberté accordée par les autorités locales, qu’elles soient politiques ou religieuses. Il semble d’ailleurs que les mesures discriminantes du Concile de Latran soient peu suivies.

Par contre, le meurtre d’un pêcheur en 1236 suscite des émeutes locales de la population, entrainant violences et pillages. Juste avant la grande expulsion de 1306, la ville compte 825 juifs, ce qui constitue près de 4 % de la population totale.
Une vingtaine de familles juives habitent actuellement à Narbonne, en partie issues de l’arrivée des juifs d’Afrique du Nord dans les années 1960. Une synagogue accueille les fidèles.
En septembre 2024, l’association Culture et patrimoine juif de Narbonne participa aux Journées européennes du patrimoine. Avec l’aide de guides, le public découvrit la longue histoire juive narbonnaise.
La présence juive est attestée à Béziers depuis l’époque romaine, mais l’âge d’or des juifs biterrois est sans conteste le Moyen Âge classique, époque à laquelle la ville était surnommée la « Petite Jérusalem », tant en raison de l’importance de sa communauté que de la vue que l’on avait depuis la plaine de l’Orb et qui ressemblait à celle de Jérusalem.

Son école rabbinique est renommée, et Benjamin de Tudèle, dans son carnet de voyages, évoquera une ville « où les sages abondent ». Plusieurs rabbins et savants adoptèrent le surnom « Beders » (Béziers en hébreu), en l’honneur de leur ville, notamment le poète Abraham Bedersi et son fils Jedaiah.
La situation des Juifs biterrois était bien plus enviable que celle de leurs coreligionnaires languedociens, grâce à la protection des vicomtes de Trencavel, et notamment Raymond Roger, vicomte de Béziers et de Carcassonne qui nomme des baillis juifs pour gouverner la ville. Cet âge d’or prend fin brutalement en 1209 lors de la croisade des albigeois déclenchée par le pape Innocent III.
Béziers puis Carcassonne tombent aux mains des croisés. 200 juifs périssent lors du sac de Béziers, les 200 restants avaient déjà quitté la cité sous la protection du vicomte.

À la chute de Carcassonne, les juifs de Béziers se réfugient en Catalogne et refondent une communauté dans la petite ville d’Olot. Ils gravent la dédicace de leur nouvelle synagogue dans une pierre, en y inscrivant la douleur de l’exil, et la perte de leur ville. Le toponyme est celui de Béziers en hébreu, « Beders », et la guerre à laquelle il est fait allusion est datée de l’an 4969, ce qui correspond à l’an 1209 de l’ère commune. Il est donc bien question de la croisade des Albigeois.
Cette pierre a été retrouvée dans les années 1940, dans les ruines de la chapelle du cimetière d’Olot, incendiée au début de la guerre civile espagnole. Elle est actuellement exposée au musée-trésor de l’église Sant Estève d’Olot.
Quelques années plus tard, les juifs réfugiés à Olot, ou une partie d’entre eux, reviennent à Béziers. Ils érigent une nouvelle synagogue. La dédicace est datée de l’an 4900 … 4. Le millésime est manquant, en raison d’une cassure de la pierre, mais des recherches ont permis de déduire qu’il s’agirait de l’année 1214.
Comme la pierre d’Olot, elle évoque l’exil, la destruction du temple lors du sac de la cité et sa réédification, dans un poème de 12 lignes constitué de « centons » bibliques. C’est la plus grande et la plus importante inscription hébraïque de toutes celles du Moyen Âge juif. Elle est actuellement exposée au musée du Biterrois . Dans ce même musée, vous verrez également la dalle funéraire de « Daniel, fils de rabbi Paregores », ainsi que la maquette de Béziers au Moyen Âge, localisant la synagogue de l’époque.

Vous pourrez également voir un étonnant « diorama de Hanouka » au musée juif. Ce panorama met en situation une scène de vie à Jérusalem lors de la réinauguration du temple en 140 avant JC, évènement qui est à l’origine de la fête de Hanouka. Après avoir été exposé à la mairie de Béziers durant les 8 jours de la fête en 2020, il fait désormais partie des collections permanentes du musée. Il permettra de présenter l’histoire du peuple juif : création puis destruction des deux temples, diaspora et évocation de l’arrivée des juifs en terre occitane. Ce diorama a été conçu et réalisé par les deux cofondateurs de l’association Mémoire Juive de Béziers : Chantal Viotte-Rabinovitch et Paul Benzimra.
Sur la façade occidentale de la cathédrale Saint Nazaire deux statues allégoriques représentant, l’une la « synagoga » privée de ses attributs et les yeux bandés, l’autre « l’ecclésia » triomphante. A l’intérieur de la cathédrale, vous retrouverez à deux endroits les lettres hébraïques du tétragramme divin.
Enfin, si vous vous promenez dans Béziers, certaines rues font écho au passé juif de la ville. Au 28 rue du 4 septembre se trouve l’emplacement de l’ancienne synagogue royale, où a été trouvée scellée la pierre hébraïque de Béziers. La rue de la petite Jérusalem mène à l’ancienne juiverie épiscopale, située dans l’actuelle rue Boudard. Les rues Capus et du Soleil sont les vestiges d’un ancien quartier juif cerné par les 2 branches du « U » dessiné par la rue du Capus, et dont le porche roman qui commande l’entrée de la rue du Soleil était la porte d’accès. Des événements réguliers sont organisés dans la ville. Pour plus d’informations sur les événements à venir, vous pouvez consulter le site www.memoirejuive-beziers.org
La synagogue de Béziers accueille depuis l’été 2020 un musée juif retraçant l’histoire des juifs biterrois et présentant une copie de la pierre hébraïque du 13e siècle.
La restauration de la synagogue biterroise s’est terminée en 2024. Elle a été effectuée par des artisans du Biterrois, travaillant sur les dorures, tapisseries, l’éclairage. Un événement célébré lors de la réinauguration de la synagogue par Maurice Abitbol, le président de l’Association cultuelle israélite de Béziers (Acib). Dans l’appartement où vivait le rabbin, logeant actuellement ailleurs, le musée juif a été étendu sur une surface de 150 m2. Dans la salle à manger est dressée une table reprenant les décorations tout le long de l’année, évoquant ainsi les différentes fêtes juives. Deux autres espaces retracent l’histoire des juifs d’Europe de l’Est et des juifs sépharades.
Source et crédit photo : Association Mémoire juive de Béziers
C’est vers 1298 que les Juifs s’établissent à Pézenas, venant d’Espagne, du Portugal et d’Italie. Au commerce d’habits et de bestiaux, ils ajoutèrent l’activité de la vente de laine et de draps. En 1332, une loi imposait aux Juifs traversant Pézenas ou venant y vendre un droit de « leude » (un octroi, ou un péage). Les familles juives disparurent de la ville en 1394, lors de l’expulsion de la communauté du royaume de France.

À Pézenas, le quartier juif médiéval piscénois est circonscrit aux rue de la Juiverie et rue des Litanies. On a également retrouvé une cuve en terre formant un petit bassin dans le sous-sol d’une maison qui pourrait correspondre à un mikveh.
Le voyageur Benjamin de Tudèle visita Montpellier en 1165. Dans ses Carnets de voyage, il nota l’existence de Batey midrashot kevouot le-Talmud dans la ville. Outre ces activités intellectuelles citées dans une source hébraïque, des documents latins relatent la présence de juifs dans les échanges commerciaux entre Agde, Narbonne et Montpellier. Ils ont le monopole des soieries et des étoffes. Les représentants de la loi mosaïque sont également impliqués dans l’effort de protection de la cité.

L’actuelle rue de la Barralerie est l’ancienne rue centrale du quartier juif dans le fief seigneurial des Guilhem. L’ensemble cultuel regroupe un lieu dit synagogal, une maison de l’aumône (domus helemosine), une maison d’études, et le mikvé médiéval , qui a été retrouvé et restauré, toutes composantes de la Schola Judeorum; il peut se visiter au n°1 de la rue. On y voit le bain du XIIe siècle ayant échappé aux rugosités du temps, la salle déshabilloir, ainsi que le bassin avec ses sept marches subaquatiques et son orifice mural ornementé d’une gargouille (les deux premières au plus profond sont d’époque médiévale). Joyau de l’art roman, réalisé par des architectes chrétiens à la demande la collectivité juive, c’est l’un des deux plus anciens monuments religieux de la ville.
Visitable avec l’Office de Tourisme de Montpellier, ce haut-lieu de la mémoire montpelliéraine s’intègre dans un Ensemble synagogal médiéval exceptionnel qui a fait l’objet de fouilles archéologiques approfondies menées par Christian Markiewicz, membre associé au LA3M (Laboratoire d’Archéologie Médiéval et Moderne en Méditerranée) et la Ville de Montpellier. Philippe Saurel, Maire et Président de Montpellier Méditerranée Métropole a été très impliqué dans ces investigations archéologiques, ayant abouti à la mise à jour récente de bassins supplémentaires, dallages et espaces attenants au Bain rituel juif du XIIe siècle.
Un quartier juif ouvert à l’habitat judéo-chrétien mêlé se développe au 13e siècle, autour de la rue de la Barralerie, avec le mikveh, qui fut, rappelons-le, redécouvert au début des années 1980, restauré, puis inauguré en 1985, lors du millénaire de la ville par Georges Frêche, à l’occasion de l’organisation par Carol Iancu, professeur à l’Université Paul Valéry Montpellier 3, d’un colloque scientifique international sur « Les Juifs à Montpellier et dans le Languedoc ».

Le XIVe siècle est le siècle de l’expulsion des Juifs de France, marqué des renvois (1306 notamment, puis 1322 et 1394) et des rappels successifs (1315; 1359) des monarques français. Les juifs s’installent lors de la dernière période autorisée (1359-1394), rue de la Vieille Intendance tout près de l’ancien habitat. Montpellier aura été le théâtre de célèbres controverses maïmonidiennes: une première fois en 1230, autour des écrits du RAMBAM: une copie du Guide des Perplexes, aurait été selon Hillel de Vérone, détruit en place publique; une deuxième fois autour des années 1300 contre la philosophie. Athènes et Jérusalem: doit-on comprendre la loi mosaïque à la lumière de la sophia grecque ? Lecture fidéiste ou lecture étayée par la raison ? Effervescence intellectuelle en tous cas. Peu fortuit que cela ait lieu à Montpellier, lieu de foisonnement intellectuel et théologique, et au sein du monde juif.
Au 17e siècle, des juifs du Comtat Venaissin ont des autorisations temporaires pour commercer à Montpellier. A partir de 1714, neuf juifs s’installent dans la ville. D’autres suivent cette démarche. Au début du 19e siècle, la communauté juive compte une centaine de personnes. Elle est alors dirigée par Moïse Milhau, qui représente le département du Vaucluse auprès du Grand Sanhedrin.
Environ 60 familles composaient la communauté juive montpelliéraine à la veille de la deuxième guerre mondiale, soient 300 individus, participant à la célébration des temps shabbatiques et festifs ; des étudiants juifs étrangers (nombreux en médecine) pouvaient se joindre à eux. En 1940-41, et même dès 1933 avec la montée du nazisme, l’installation de l’antisémitisme et l’instauration du numerus clausus dans les pays de l’Est (Allemagne, Hongrie, Pologne, Roumanie), leur nombre s’est accru de juifs réfugiés : 150 foyers regroupant 750 personnes, se manifestant par leurs cotisations, et adhésions tangibles. Une proportion est à cet égard révélatrice, avec en 1933, sur 800 étudiants français et étrangers inscrits en médecine, le dixième d’étudiants juifs roumains se chiffrant à 80 !

Le lieu de culte situé d’abord rue du jeu de l’Arc, prit place rue des Augustins (devenu aujourd’hui temple protestant). César Uziel, d’origine ottomane, parvenu à Montpellier en 1933, eut d’abord la charge de ministre officiant, puis celle de président de la communauté, succédant à Léon Brunschwig (mort en 1934). Après lui, c’est Louis Kahn qui officiera cinq années durant.
A l’été 1940, parviennent massivement à Montpellier des réfugiés de Belgique, de Hollande, du Luxembourg, surtout de Pologne, mais aussi d’Alsace-Lorraine et de Paris. En dépit de quelques réticences, un élan de solidarité s’opère.
Avec le soutien précieux (obtention de fausses cartes d’identité) du préfet Benedetti, et du secrétaire général de la préfecture de l’Hérault Camille Ernst (auquel la Ville a rendu récemment hommage), César Uziel (1892-1983) prit soin d’un premier groupe de 250 étrangers, répartis à Montpellier, vers les villages avoisinants et l’arrière-pays. Le gros de cette première vague fut dirigé vers la Lozère (Lancogne) pour une halte provisoire.
Cela n’exclut pas tout l’appareil de déportations, spoliations (que j’ai largement traité ailleurs, ouvrages en 2000 et 2007), avec son lot malfaisant de dénonciations, de lâchetés, un antisémitisme érigé en doctrine d’Etat, les rafles du fatidique été 42, et les internements dans les camps de Rivesaltes, et – pour l’aire géographique héraultaise – dans celui d’Agde.
Faits héroïques porteurs d’espoir: située en zone libre, Montpellier a servi de refuge à au moins quinze nationalités différentes, en majorité polonaises (la moitié). La Faculté des Lettres a accueilli – en dépit du faux pas du doyen maréchaliste Augustin Fliche (contrairement à l’attitude généreuse de Pierre Jourda) – le grand médiéviste Marc Bloch avant qu’il ne soit fusillé à Lyon pour faits de résistance (1944) ; la Faculté de médecine a été exemplaire, grâce à l’action remarquable du doyen Giraud (1888-1975) et du professeur Balmès (1904-1986) envers les étudiants juifs cachés, défendus en dépit des iniques lois raciales du gouvernement de Vichy, et autorisés (« sous le manteau ») à suivre les cours et passer les examens.
Tout au long de ces années sinistres, sont à relever des actes de bravoure et d’abnégation d’hommes et de femmes lumineux qui, au prix même de leur liberté, au péril de leur vie, ont sauvé des juifs des affres de la barbarie. Ce sont les Hassidey Oumot ha-Olam ou « Justes parmi les Nations » célébrés par l’Institut Yad Vashem de Jérusalem qui maintient vivante la mémoire des six millions de victimes de la Shoah, en octroyant ainsi la « Médaille des Justes ». Nombre de Montpelliérains valeureux ont reçu cette haute distinction.

Au sortir de la guerre, la collectivité juive exsangue (une cinquantaine de familles de souche alsacienne, ashkénaze et turque pour la plupart) est une mosaïque meurtrie par la Shoah.
En 1946, de la rue Marceau à la rue des Trésoriers de France, le lieu de culte de l’Association Cultuelle Israélite de Montpellier (ACIM) évolue. Le Conseil d’administration, sous la direction de César Uziel (qui avait aidé, pendant la guerre, les coreligionnaires apatrides fuyant l’avancée allemande), acquiert le rez-de-chaussée d’un immeuble rue des Augustins. La synagogue inaugurée en 1952 y demeure jusqu’en 1985, avant son transfert rue Lafon, aux côtés de la synagogue dite Mazal Tov , rue Proudhon. L’année 1956 voit l’arrivée du rabbin Roger Kahn dont le dynamisme à l’égard de la jeunesse modifie la collectivité, à la suite également de l’ouverture en 1957 du nouveau centre communautaire de l’avenue de Lodève.
L’arrivée des Juifs d’Afrique du Nord constitue à Montpellier, comme partout ailleurs en France, un tournant historique. Les membres de la communauté, toutes origines confondues, accompagnent ces réfugiés, amenés à s’adapter à des contrées, méditerranéennes certes, mais différentes à bien des égards ; les nouveaux venus apportent en héritage la chaleur de l’Orient, mâtinée d’un rigorisme rituel. Leur judaïsme décomplexé et exubérant, revivifie le groupe communautaire qui demeurait ténu.
L’arrivée aux responsabilités de Georges Frêche est décisive pour les Juifs. Par ses réalisations tangibles, il devient un « juif de cœur » pour les 6000 juifs montpelliérains. Il marque de son empreinte la collectivité juive qui lui est acquise.
Retenons naturellement la restauration du mikvé médiéval lors du millénaire de la ville ; ou encore le jumelage avec Tibériade (où selon la tradition, Maïmonide est enterré) – tissant déjà un lien entre Maïmonide et la « Ville du Mont » (Ir ha har, en hébreu) médiévale.
Dans les années 1980-90, l’essor du judaïsme montpelliérain, se cristallise autour de la création de la Radio Juive languedocienne (RJL), aujourd’hui Radio Aviva, co-fondée par Carol Iancu auquel l’on doit aussi la co-découverte du mikvé médiéval de la ville, et qui crée également à l’Université Paul Valéry, le Centre de Recherches et d’études juives et hébraïques (1983).

Une autre émanation du Centre Communautaire et Culturel Juif de Montpellier (CCCJ) en 1978, est « La Journée de Jérusalem », rassemblement populaire annuel. Le « Festival du film juif et israélien », tôt disparu, a eu le mérite de traiter de la diversité de la création cinématographique israélienne dans une ville à la longue mémoire sioniste : on compte quatre délégués juifs montpelliérains au Congrès de Bâle de 1897, des tractations eurent lieu en préfecture pour le départ de l’Exodus à Sète.
Les années 2000 sont marquées par la création d’une école et d’un collège juifs, ainsi que du Comité Français pour Yad Vashem. Un renouveau générationnel se manifeste.
Suite à la découverte d’un des plus anciens (XIIe siècle) mikvaot européens, et partant du constat qu’à Montpellier, le judaïsme médiéval connut un âge d’or jusqu’aux édits d’expulsion du XIVe s, les universitaires Georges Frêche et l’ancien Grand Rabbin de France, René-Samuel Sirat, créent en 2000 l’Institut Universitaire Euro-Méditerranéen Maïmonide (IUEMM) en vue de réinscrire la figure médiévale de Maïmonide dans la Ville. L’Institut qui s’est imposé dans le paysage culturel local est sis au dessus du mikvé médiéval dans l’immeuble historique de la Barralerie où s’affrontaient- il y a 700 ans – les passions juives autour de la pensée philosophique. Développer l’histoire et la civilisation du judaïsme et d’Israël, favoriser le dialogue interreligieux, constituent les axes fondateurs de cet Institut. La salle dite « don Profiat » pérennise le souvenir du dernier des Tibbonides.

La Municipalité propose depuis 2008 avec l’aide de l’IUEMM et de la « Nouvelle Gallia Judaica », équipe CNRS qui fut intégrée dans le bâtiment historique de la Barralerie pendant une décennie, sept vitrines didactiques à l’intention des passants, qui relatent l’histoire du Montpellier hébraïque médiéval. C’est dire si la glorieuse histoire juive médiévale résonne « forte », comme il est dit en musique, dans la « Ville du Mont » !
Lieu incontournable de Montpellier, l’Institut Universitaire Maimonide-Averroès-Thomas d’Aquin, dont les compétences aux religions filles du monothéisme – Christianisme et Islam –, ont été élargies par Philippe Saurel, Maire de la Ville et Président de la Métropole, attire de nombreux événements et visiteurs. L’histoire du judaïsme montpelliérain et languedocien médiéval est une histoire de rencontres judéo-chrétiennes autour du legs gréco-arabe; et aussi et surtout une histoire de passions hébraïques autour de la pensée maïmonidienne et de la philosophie; des passions exacerbées jusque dans la synagogue du quartier juif du XIIIe siècle, là-même où l’Institut est basé: clin d’œil à l’Histoire, légitimité topographique indéniable.
Page écrite par Michaël Iancu, Docteur en Histoire et Directeur de l’Institut Universitaire Maimonide-Averroès-Thomas d’Aquin. Michaël Iancu est l’auteur de Spoliations, déportations, résistance des Juifs à Montpellier et dans l’Hérault, 1940-1944 (Barthélémy, 2000), Vichy et les Juifs. L’exemple de l’Hérault, 1940-1944 (Presses Universitaires de la Méditerranée, 2007) Les Juifs de Montpellier et des terres d’Oc. Figures médiévales, modernes et contemporaines (Cerf, 2014) et de textes pour les ouvrages collectifs Ombres et lumières du Sud de la France. Les lieux de mémoire du Midi (Les Indes savantes, 2015 et 2016), Nouvelle Histoire de Montpellier (Privat, 2015).
Rencontre avec Michaël Iancu
Jguideeurope : La ville de Montpellier est très impliquée dans le partage du patrimoine culturel juif. Comment expliquez-vous cet engagement ?
Michaël Iancu : Sans interprétation apologétique de l’histoire locale, il importe de savoir qu’au Moyen Age, Montpellier n’est pas loin d’avoir représenté une oasis de tolérance, ou tout au moins de progrès dans la connaissance, dans l’accueil aux individus d’où qu’ils venaient, dans l’ouverture aux sciences d’où qu’elles provenaient. Les historiens ont mis en avant la place privilégiée de la ville de Montpellier, proche de l’Espagne, commerçant avec le monde arabe, bénéficiant de la proximité des savants juifs établis à Lunel ou à Béziers. Il est significatif d’ailleurs que le programme de la licence en 1309 juxtapose Galien, Avicenne, Rhazès et Isaac Israeli, autrement dit les médecines antique, arabe, et juive d’expression arabe. Les Juifs ont été dans cette « Petite Cordoue » qu’était Montpellier pour la période médiévale, des passeurs de cultures entre l’Ibérie musulmane et la Chrétienté féodale. Ainsi, tout naturellement, la municipalité a souhaité retrouver les racines juives de la cité. Racines certes essentiellement chrétiennes, mais avec des interférences hébraïques prégnantes.
La découverte du mikvé est assez récente. Qu’a-t-on découvert et établi sur son utilisation au Moyen-Age ?
Montpellier a cette chance de posséder par-delà les âges un vestige archéologique de tout premier plan : le mikvé, bain rituel juif daté du XIIe siècle, connu certes des anciens érudits locaux (tel le chanoine Charles d’Aigrefeuille en 1737), retrouvé et restauré l’année du millénaire de la ville en 1985.
Du reste, le bâtiment synagogal médiéval où est basé l’Institut, a été déclaré « Monument Historique » en 2004, et fait actuellement l’objet d’investigations menées par la DRAC et la Ville de Montpellier avec son maire Philippe Saurel, très impliqué dans la revalorisation du patrimoine montpelliérain hébraïque médiéval. Objet : tenter de mettre à jour le lieu de culte médiéval, la maison de l’aumône (domus helemosine) et la maison d’études, composantes de la Schola Judeorum selon des sources croisées, latines chrétiennes et hébraïques.

De par son nom, l’institut Universitaire Maimonide-Averroès-Thomas d’Aquin représente aujourd’hui un lieu d’ouverture et de rencontre unique. Pouvez-vous nous rencontre interculturelle qui vous marqua ?
Une Rencontre en 2004, salle Rabelais de Montpellier, intitulée : « La Fraternité d’Abraham, un voeu pieu ? Partition pour un quatuor à l’unisson ? » avec René-Samuel Sirat, président fondateur de l’Institut Maïmonide et ancien Grand Rabbin de France; Dalil Boubakeur, (alors) Recteur de la Grande Mosquée de Paris, Jean-Arnold de Clermont, (alors) président de la Fédération Protestante de France et Guy Thomazeau, (alors) Archevêque de Montpellier.
Constatez-vous des changements dans les attentes du public par rapport à la période pré-Covid ?
Le public est revenu nombreux après la période Covid-confinement même si la vigilance est toujours de mise. Nous filmons désormais toutes nos manifestations et les diffusons sur notre chaîne YouTube. Ainsi, les personnes ne pouvant se déplacer, ne perdent rien de la programmation maïmonidienne.

Comment expliquez-vous le beau succès en librairie du Hors-Série de Midi Libre consacré au judaïsme occitan et est-il encore disponible en ligne ?
Il y a un intérêt croissant pour mieux comprendre notre histoire commune. Montpellier et d’une manière plus large le Languedoc ont été pour la période médiévale, une terre de passage et de brassage, de rencontres judéo-chrétiennes autour du legs gréco-arabe. Longtemps l’on a tu toute origine juive, qu’elle soit familiale ou patrimoniale. Aujourd’hui, sans aller jusqu’à s’enorgueillir, il y a une curiosité réelle pour les racines juives de la France et de l’Europe, racines éminemment chrétiennes mais aussi hébraïques. Le succès du Hors-Série s’explique en partie ainsi.