Ville relativement moderne, Mannheim fut fondée en 1606 par Frédéric IV (1574-1610). Située au confluent du Rhin et du Neckar, Mannheim est le plus grand port fluvial du pays. C’est aussi une ville connue pour son industrie et son université, située en partie dans son château baroque. On peut y apprécier de nombreux bâtiments inspirés par l’Art nouveau.

Ville récente donc, ce n’est qu’à partir du milieu du 17e siècle que 5 familles juives s’y établirent. Bénéficiant d’une lettre de protection qui leur fut accordée en 1660, les Juifs de Mannheim furent autorisés à pratiquer toutes sortes de métiers. Certes, ils furent un petit nombre, mais ils jouirent d’avantages non négligeables comparés à d’autres coreligionnaires régionaux. N’étant d’ailleurs pas obligé de vivre dans un ghetto. Ils construisirent leur première synagogue en 1660. L’année où Charles Ier Louis (1617-1680), dans son décret, décrit 13 points qui régissent les droits et les devoirs des juifs de Mannheim. Très intégrés à la ville, une bonne partie d’entre eux participent à sa défense lors de l’attaque française à la fin du 17e siècle.

Une centaine d’années plus tard, on compte à Mannheim près de 250 familles juives. De nombreuses autres villes européennes bénéficiant de l’esprit de tolérance insufflé par l’esprit révolutionnaire français et les évolutions dans différents pays européens, en 1812 Mannheim accorda aux juifs les mêmes droits que leurs concitoyens.

Dans ce climat d’émancipation, la population juive de Mannheim augmenta, atteignant un peu moins de 2000 personnes au milieu du 19e siècle. Ils participèrent pleinement au développement de la ville dans différents domaines. Parmi les métiers principaux dans lesquels ils travaillaient, on peut mentionner l’industrie du tabac, les céréales, les distilleries, les tanneries et le textile. Parallèlement, ils créèrent de nombreuses œuvres sociales et médicales.

En 1854, une nouvelle synagogue, de courant libéral, fut construite, remplaçant une autre plus petite construite en 1700. En 1708, la synagogue Klause, orthodoxe celle-ci, avait été inaugurée.
La population juive augmenta à la fin du 19e siècle et au début du 20e, passant de près de 4000 en 1875 à 6400 en 1910. Un chiffre qui se stabilisa, puisqu’ils étaient 6500 en 1933, lorsque les nazis prirent le pouvoir.

Parmi les personnages importants du tournant du 20e siècle, on peut citer Bernhardt Herschel (1837-1905), marchand, conseiller municipal et généreux donateur à la ville qui finança de grandes installations balnéaires. Également, Léopold Ladenburg (1809-1889), un avocat à la cour supérieure de Justice et pionnier de l’émancipation des Juifs. Citons enfin Ludwig Frank (1874-1914), avocat et président du parti SPD à Mannheim. Grand patriote et politicien réformiste libéral, âgé de 40 ans, il n’hésita pas à se porter volontaire lorsque la Première Guerre mondiale éclata. Frank mourut les armes à la main lors de la première semaine de la guerre. Un monument a été érigé en son honneur, mais il fut détruit par les nazis en 1933.

À l’image de ce qui arrivait dans d’autres villes allemandes, les nazis ne tardèrent pas à appliquer leur politique de discrimination à l’égard des juifs. Étant graduellement interdits de toutes activités professionnelles et d’accès à de nombreux lieux. Ils furent même attaqués en 1935 par des SA. Lors de la Nuit de cristal du 9 au 10 novembre 1938, la synagogue principale fut détruite, ainsi que les cimetières et de nombreux commerces appartenant à des juifs.

Un grand nombre d’entre eux furent déportés au camp de concentration de Dachau. Suite à cela, le reste des commerces appartenant à des Juifs fut liquidé. La forte activité des mouvements sionistes permit à 240 enfants d’être sauvés et emmenés en Israël. De 1933 à 1940, près de 4000 Juifs de Mannheim réussirent à se sauver d’Allemagne. Néanmoins, environ 2400 Juifs de Mannheim furent assassinés pendant la Shoah. En leur mémoire, un cube de verre sur lequel sont écrits leurs noms a été érigé sur la Paradeplatz, dans le centre-ville de Mannheim, en 2003.

Au lendemain de la guerre, la communauté juive de Mannheim n’était composée que d’une poignée de Juifs. Atteignant quelques centaines dans les années 1970, un petit centre communautaire avec une synagogue a été construit en 1957 sur la Maximilianstrasse.

Trente ans plus tard, la synagogue est relocalisée sur la Rabbiner-Grünewald-Platz. À cette époque, la communauté juive augmenta à 400 membres, grâce notamment à l’arrivée de juifs de l’ex-URSS.

Parmi les activités culturelles juives de Mannheim, une journée Limoud y fut organisée en 2018.

Un détail amusant, cette synagogue est située dans le bâtiment jouxtant celui dans lequel vécut Mozart. Le grand compositeur y séjourna avec sa mère en 1777-8. Inspiré par une résidente locale, il y écrit une sonate. Sa rencontre avec l’orchestre de Mannheim sera déterminante pour l’évolution de sa carrière…