Espagne / Andalousie

Cordoue

Patio de la synagogue de Cordoue ©Américo Toledano

Patrie de Maïmonide, Cordoue était sous le Califat arabe de d’Abderahman III la plus grande juderia andalouse. Sous le règne musulman, la communauté juive vit en harmonie avec les conquérants qui, pour économiser leurs armées réduites, confient aux juifs l’administration de Séville et Cordoue.

L’histoire de la communauté juive de Cordoue suit celle de l’occupation arabe et des invasions almohades et almoravides qui limitent les libertés accordées aux juifs quand elles ne les massacrent pas, provoquant la fuite de la communauté vers Grenade. Néanmoins cette période allant du Xe au XIIe reste la plus faste l’âge d’or de la culture séfarade en Espagne.

En 1236 Ferdinand III reprend la ville et accorde un certain nombre de privilèges aux juifs mais exige un impôt de 30 monnaies d’or chaque année. Sous le règne de Ferdinand III commencent des violences qui atteindront leur paroxysme avec les prédications de 1391 et les nombreuses conversions forcées. En 1492, la communauté se plie au décret des Rois Catholiques et émigre en grande partie vers le Portugal et l’Afrique du Nord.

Maïmonide

Né à Cordoue en 1138, il était aussi connu sous le nom de RaMBam, acronyme de rabbi Moïse ben Maïmon. Homme de loi, philosophe, penseur le plus éminent du judaïsme médiéval, médecin et astronome.Sa contribution à la littérature religieuse du judaïsme, et à la pensée juive en général est immense, tant dans le domaine de la Halakhah que dans celui de la philosophie. La pièce maîtresse de son oeuvre juridique reste le Michneh Torah (la seconde thorah). C’est la plus considérable des compilations de la loi juive jamais rédigée. Quand au moreh nevoukhim « guide des égarés », il constitue un sommet de l’aristotélisme juif du Moyen-Âge. La philosophie  de Maïmonide s’exprime également à travers ses ouvrages de Halakhah et les responsa qu’il rédigea en qualité de rabbin décisionnaire. Il fut, en effet, la plus haute autorité rabbinique de son temps.

À la suite de la prise de pouvoir par la dynastie musulmane des Almohades qui se signalèrent par leur fanatisme religieux, la famille de Moïse fut obligée de prendre la fuite en 1148. Après une période d‘errance, elle s’établit à Fès au Maroc en 1160. C‘est là que Maïmonide reçut une formation de médecin. En 1165, Maïmonide et les siens partent pour l’Egypte et la Palestine. Ils séjournèrent d’abord à Alexandrie, puis à Fostat, la vieille ville du Caire. Maïmonide fut entretenu par son frère David, un riche marchand qui mourut en 1169 dans l’Océan Indien. Cela permit au jeune homme de se consacrer exclusivement à l’étude. Puis, il se mit à exercer la médecine et en 1185 il devint le médecin attitré à la cour du Vizir de Saladin Al Fadil. En 1177, il fut nommé chef de la communauté juive de Fostat jusqu’à sa mort en 1294.

Extrait du Dictionnaire encyclopédique du judaïsme , Cerf, Paris 1993.

Le quartier juif s’étend près de la mosquée et du palais épiscopal. Entrez par la porte mauresque d’Almodovar. Les noms des places et des rues, donnés au XIXe siècle, font allusion à ce passé : la place de Maïmonide, de Juda Levi et de Tibériade, etc. Le monument le plus important est  la synagogue , miraculeusement conservée. Elle a été construite, ou reconstruite, en 1315 d’après les inscriptions que porte l’édifice. Après l’expulsion, elle fut transformée en hôpital puis, en 1588, devint le siège de la confrérie des cordonniers de la ville. Redécouverte par un archéologue en en 1884, elle est immédiatement déclarée monument historique et restaurée. On y accède par un petit patio et une porte modeste soulignée par un arc en brique. L’intérieur, de style mudéjar, a une forme carrée (6 m sur 6, environ). La décoration à base de motifs végétaux est très riche. Elle est accompagnée d’inscriptions, en particulier autour de l’aron ha-Kodesh : citations d’Isaac Moheb ben Efraim, qui aurait terminé ce temple en 1315, extraits du Livre des psaumes écrits en rouge sur fond bleu. C’est, après Tolède, le plus spectaculaire symbole de la présence juive en Espagne. Le bâtiment est d’ailleurs classé au patrimoine mondial de l’Unesco depuis 1994.

Au musée archéologique de Cordoue  on peut admirer une pierre tombale juive retrouvée en 1958 à Lucena. Elle était encastrée dans le mur d’une maison de cette ville. On y lit : « Rabbi Amicos, dors en paix et repose en paix jusqu’à l’arrivée du consolateur annonciateur de la paix à la porte de Salem et qui prédit la bonne nouvelle de la paix. Que ta demeure soit en paix ».

Enfin, vous pouvez achever votre visite de la Cordoue juive par un détour dans le centre culturel, librairie et boutique  Casa de Sefarad , qui organise des expositions, des visites guidées de la judería, des concerts et des conférences.

Le restaurant  Casa Mazal sert une cuisine d’inspiration sefardi et des repas casher.

Rencontre avec Marta Puig Quixal, Directrice générale de Caminos de Sefarad

Jguideeurope : Quelle est la mission principale des Caminos de Sefarad ?

Marta Puig Quixal : Une action coordonnée entre de nombreuses villes de toute l’Espagne pour récupérer les traces de la culture sépharade. Une culture essentielle au sein de nos différentes racines mais qui, malgré cette réalité, reste la plus méconnue. Par conséquent, la mission principale se concentre sur la recherche de notre propre histoire espagnole à travers l’histoire des familles qui ont vécu dans les villes.

Une autre mission clé est de se connecter physiquement et émotionnellement avec les sépharades du monde entier. Ceux qui ont maintenu cette culture et cette tradition en vie pendant les cinq siècles où elles étaient cachées et oubliées.

Quel sera le thème principal de cette année et quels événements sont organisés autour de celui-ci ?

Nous avons développé trois grands axes de travail : Premièrement, la conception d’itinéraires culturels. Ce qui a été fait en préparant nos villes à être visitées, en marquant les lieux, en formant nos guides, en promouvant nos destinations. Ensuite, nous avons développé un projet éducatif, en fournissant des outils aux enseignants qui leur permettent d’avoir une idée simple mais efficace de qui étaient les sépharades. Enfin, nous concentrons nos efforts sur la présence culturelle. Celle-ci est encouragée par l’organisation d’événements culturels permanents, ce qui est un excellent moyen d’entrer en contact avec les citoyens espagnols. Il est probablement temps d’intensifier le travail institutionnel car nous sommes accidentellement devenus ceux qui représentent une culture par les lieux où ils ont vécu. Nous sommes les rues, les portes, les paysages de nombreuses familles diasporiques.

Pouvez-vous partager une anecdote personnelle à propos d’un événement précédent ?

Je préfère souligner à quel point mon travail est émotionnel et touchant, même pour un non-juif comme moi. Je me rends souvent à l’étranger, consacrant du temps et des efforts à des activités promotionnelles et culturelles. J’attends toujours avec impatience l’occasion de rencontrer les communautés sépharades, où qu’elles se trouvent. Je pense personnellement que la diaspora sépharade constitue l’un des événements historiques les plus incroyables de tous les temps. Et le sentiment d’appartenir à un lieu (l’Espagne) que les anciennes générations ont quitté, pardon, ont été forcées de quitter il y a des siècles, est incroyable.

Quel lieu particulier lié au patrimoine juif espagnol devrait, selon vous, être mieux connu ?

Il est impressionnant que plus de cinq siècles d’efforts pour effacer tout signe juif de notre patrimoine et de notre histoire n’aient pas suffi à décourager l’enthousiasme de la redécouverte par les Juifs. Si nous sommes tous d’accord pour dire que le patrimoine juif préservé aujourd’hui n’est pas l’un des plus impressionnants du point de vue de la préservation, nous devons admettre que les récits reliant toutes nos destinations le rendent très émotionnel, exotique. Tout cela devient très intéressant pour les visiteurs nationaux et étrangers. Chacun des 21 quartiers que nous avons récupérés mérite une visite, et tous devraient être mieux connus.


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