Espagne / Andalousie

Séville

Juderia de Séville. Photo de Steve Krief

L’actuel quartier de Santa Cruz, protégé par l’Alcazar, est l’ancienne et célèbre judería. Le lacis des rues aux noms typiques donne une bonne idée de ce qu’elle était en 1492.

Promenez-vous en particulier dans les rue de la Judería, du Callejon, del Agua, des Levis, et de Santa María la Blanca, qui en était peut-être la rue principale. La rue de la Susona évoque une vieille légende qui raconte l’insurrection de conversos contre l’Inquisition, sous la direction d’une femme : la Susona. Les façades blanchies à la chaux, les fleurs et les patios font le charme du quartier et permettent d’imaginer la vie quotidienne de Sefarad. Vous devez cependant tenir compte du fait que les places ont été ouvertes au XIXe siècle pour aérer le quartier.

Si les Anglais aiment dîner tôt par rapport aux Français, ils savourent ce repas à l’heure du déjeuner espagnol. Qui se prolonge de tapas en tapas le long de l’après-midi. Oui, c’est un peu cliché, mais c’est l’impression que vous aurez en traversant les anciens quartiers des villes ibériques, les touristes et locaux s’y mêlant et se léguant les places prisées aux terrasses des bistrots. Par contre, concernant les visites des monuments historiques, mieux vaut être un couche tôt. Et Séville n’échappe pas à cette règle.

Santa Maria. Photo de Steve Krief

L’ancienne synagogue de Séville n’est ouverte que quelques heures par jour, de manière fluctuante. Mieux vaut donc commencer la visite par celle-ci. Lors de l’été 2022, notre équipe s’est rendu sur place, à 11 h 15, Google annonçant que le lieu était ouvert jusqu’à midi, et finalement la synagogue était fermée depuis 11 h, repoussant la visite au lendemain. Est-ce un départ précipité des fidèles pour anticiper le déjeuner ?

Malgré le ton un peu ironique de cette présentation, nous devons admettre que ces passages prolongés dans les bistrots de la ville furent très plaisants. Certes, vous ne trouverez des lieux avec des noms aussi aberrants que Houmous Kafka à Prague, mais certains établissements, aux liens très ténus avec les mœurs culinaires de l’ancien quartier juif portent reprennent le nom de juderia pour attirer les touristes. Peu importe, le plaisir se situe dans la perte de repères spatio-temporels dans ces ruelles aux façades nacrées de tant de couleurs et d’histoire. Et à la rencontre de cours et jardins intérieurs que quelques portes vous autorisent à admirer.

Alcazar. Photo de Steve Krief

A l’intérieur de la  cathédrale, le piédestal du mausolée qu’Alphonse X fit construire pour son père, Fernando III, comporte une inscription en hébreu qui donne la date de la mort du roi selon le calendrier hébraïque. Dans le trésor de la cathédrale, sont conservées les clés en argent remises par les juifs au roi Fernando III. Elles portent deux inscriptions en hébreu qui annoncent que « Dieu ouvrira, le roi entrera » et que « le Roi des rois ouvrira, le roi de la terre entière entrera ».

Trois sceaux, ayant appartenu à des personnalités juives du XIIe siècle, sont exposés au  Musée archéologique de Séville, tandis que  les Archives générales des Indes renferment un exemplaire de l’almanach perpétuel d’Abraham Zacuto, qui a tant servi à Christophe Colomb et Vasco de Gama. Il existe deux petites synagogues ouvertes au culte : la  synagogue orthodoxe et la synagogue RaMBaM de rite masorti.

Plaza de Espana. Photo de Steve Krief

Vous pouvez prolonger la visite vers ses magnifiques monuments qui défient le temps et réconcilient les cultures, voisins de quelques murs et siècles. En commençant par le somptueux Alcazar et ses jardins, puis le long des différents palais et l’Université, vous pourrez passer une très agréable fin de journée à la Plaza de Espana. Ce monument conçu pour l’exposition de 1929 est de forme demi-ovale et s’étale sur 200 m. Les œuvres artistiques, en particulier les céramiques, rendent hommage à la diversité des provinces espagnoles et leurs villes phares. Si les petites promenades en barque en face du monument amuseront certains, notre équipe a particulièrement apprécié les spectacles improvisés sur les marches, principalement de flamenco.

L’originalité de la Plaza de Espana inspira de nombreux cinéastes, le lieu servant de décors pour des films aussi différents que Lawrence d’Arabie, Star Wars et Le Dictateur de Sacha Baron Cohen. Ce dernier film aux dialogues notamment en hébreu ramène une touche juive humoristique à ce lieu et cette ville symboles aujourd’hui d’une rencontre harmonieuse et généreuse des cultures. Promenez-vous ensuite dans le parc, jusqu’au joli petit pont protégé par les cygnes. Sur le chemin du retour, en passant par le Paseo de las Delicias, vous tomberez sur la Torre del Oro qui protégeait naguère la ville des invasions.