Une communauté juive a vécu de manière irrégulière à Utrecht à partir du XIVe siècle. Au XVe siècle, les juifs vivaient dans le centre-ville, dans une rue qui s’appelle encore aujourd’hui Jodenrijtje (soit quartier juif), située dans une cour derrière la Bakkerstraat. En 1546, les juifs furent bannis d’Utrecht et de ses environs par le roi Charles V. Ainsi, ce n’est qu’au XVIIIe siècle qu’un juif obtiendra pour la première fois le droit de citoyenneté dans la ville.
Au XVIIIe siècle, les juifs se rendant à Utrecht pour participer à sa foire annuelle se rassemblaient pour prier à De Hollandse Tuyn, une maison située dans la rue Boterstraat. Les services religieux étaient organisés par le Reis Chewre, une société d’aide aux voyageurs religieux. Au cours des dernières décennies du XVIIIe siècle, la population juive d’Utrecht s’était tellement développée qu’en 1792 une ancienne église située rue Jufferstraat est louée pour être utilisée comme synagogue. Auparavant, les Juifs résidant à Utrecht priaient dans une maison de Korte Nieuwstraat. L’ancienne église est achetée par la communauté d’Utrecht en 1796. La synagogue est restée en service jusqu’en 1981. Le bâtiment a été restauré à quatre reprises au cours des deux siècles où elle a servi de maison de prière à la communauté.
Au cours de la période de domination napoléonienne aux Pays-Bas, Utrecht fut choisie comme siège du rabbinat en chef de la province. Après le redécoupage des communautés juives sous le règne du roi Willem Ier, la résidence du grand rabbin fut transférée à Amersfoort. Dans les années 1830, la communauté d’Utrecht était divisée par une série de conflits sur l’interdiction du yiddish comme langue de prière dans la synagogue.
Jusqu’en 1807, les Juifs d’Utrecht enterraient leurs morts dans un cimetière juif situé près de la ville voisine de Maarssen. En 1808, la communauté achète un terrain pour un nouveau cimetière sur le quai Zandpad, adjacent à la rivière Vecht.
En 1821, une école destinée aux enfants juifs pauvres est construite. Le nombre d’enfants scolarisés augmente tout au long du XIXe siècle, malgré l’intégration continue des enfants juifs dans l’enseignement public à la suite de l’adoption d’une réforme nationale de l’éducation en 1857.
Preuve du dynamisme de la communauté, des branches locales de la Société pour le bien-être des israélites aux Pays-Bas, de l’Alliance israélienne universelle et de la Société pour la pratique des sciences juives voient le jour. L’Orphelinat central israélite ouvre ses portes à Utrecht en 1871.
La population juive d’Utrecht augmente rapidement au cours des premières décennies du XXe siècle. En conséquence, le siège rabbinat régional revient à Utrecht en 1917. Au cours de la même période, de nouvelles organisations juives apparurent à Utrecht, notamment des sociétés sionistes, un mouvement de jeunesse et un club sportif. À l’époque, la majorité des juifs d’Utrecht travaillaient comme commerçants et colporteurs. D’autres juifs de la ville travaillaient comme marchands en gros, fonctionnaires, enseignants, professeurs d’université et avocats.
Durant les premières années de l’occupation allemande des Pays-Bas pendant la Seconde Guerre mondiale, les juifs allemands chassés des zones côtières de leur pays viennent nombreux à Utrecht, formant ainsi une communauté de réfugiés dans la ville. Tous les juifs d’Utrecht sont touchés par les mesures anti-juives mises en place par les Allemands et leurs collaborateurs. En novembre 1940, les juifs sont licenciés de la fonction publique. Le maire d’Utrecht sera démis de ses fonctions en raison de sa réticence à appliquer les mesures anti-juives. Les enfants juifs sont expulsés des écoles publiques d’Utrecht en septembre 1941. En octobre 1941, un représentant du Conseil juif sous contrôle allemand est nommé à Utrecht.
La déportation des juifs d’Utrecht commence en septembre 1942. Cependant, même pendant la période des déportations, la vie juive à Utrecht reste active, à la fois sur le plan culturel et religieux. Le dernier juif connu des autorités à rester à Utrecht est déporté dans le camp de détention de Vught en avril 1943. Plusieurs centaines d’autres juifs sont restés cachés, aidés en partie par des groupes de résistance à Utrecht, notamment le Kindercomité. D’autres ont trouvé à se cacher dans les villes et villages voisins de Zeist, Maartensdijk et Loosdrecht.
La synagogue fut mise à feu en 1941, mais l’incendie ne prit pas. La synagogue fut fermée à la suite de l’expulsion du dernier Juif appréhendé dans la ville. Le bâtiment est resté intact pendant la guerre et a rouvert ses portes le 10 mai 1945, juste après la libération d’Utrecht. Un certain nombre de manuscrits de la Torah et d’objets cérémoniels de la synagogue avaient été cachés et furent récupérés.
La vie juive a continué à Utrecht pendant la période d’après-guerre. Un monument dédié aux plus de 1000 Juifs d’Utrecht assassinés pendant la guerre a été érigé au cimetière juif en 1948. Un second mémorial se trouve en face du Musée du rail.
En 1981, la synagogue du Springweg, devenue trop grande pour la communauté d’Utrecht en déclin fut vendue. Depuis lors, les offices religieux hebdomadaires sont organisés dans un local plus petit doté de l’Arche sainte de l’ancienne synagogue ashkénaze de Maarssen (fondée en 1776). La communauté juive d’Utrecht a célébré son 200e anniversaire en 1989.
Le cimetière juif a été restauré en 1990. En 2004, des volontaires de la Fondation pour la pénitence et la réconciliation (Stichting Boete en Verzoening) ont participé à la restauration de 200 pierres tombales au cimetière.
Une communauté juive libérale s’est établie à Utrecht en 1993. Les bureaux et la synagogue de la communauté libérale sont situés dans le bâtiment de l’ancien Orphelinat central israélite rue Nieuwegracht. En 1994, le maire d’Utrecht a dévoilé dans l’immeuble une plaque commémorant l’ancien orphelinat. La ville compte également une communauté orthodoxe et un beit habad Lubavitch.
Tous les ans au printemps se tiennent les journées du patrimoine juif d’Utrecht où vous pourrez visiter avec un guide les maisons où ont vécu les membres le plus éminents de la communauté.
Source : Musée d’Histoire juive d’Amsterdam