Les plus anciens vestiges de la présence juive en Allemagne se trouvent dans la région rhénane. Le fleuve constitua longtemps la frontière orientale de l’Empire romain, et les juifs de la diaspora trouvent dans les cités forteresses de ce limes, comme Colonia Agrippina (Cologne), des conditions favorables à l’exercice de leurs talents industriels et commerciaux.
Plus tard, au Moyen Âge, ils bénéficient dans ces cités, dont certaines comme Worms ou Francfort sont sous l’autorité directe de l’empereur, de la protection que le souverain leur accorde. Quelques princes-évêques, comme ceux de Spire et de Mayence, marquent leur autonomie vis-à-vis de Rome en accordant des franchises aux communautés juives, alors que la papauté prône une politique de mise à l’écart des tenants d’une religion considérée comme hérétique et rivale. Aux Xe et XIe siècles, ce judaïsme rhénan rivalise en prospérité et en vitalité religieuse et intellectuelle avec celui de l’Andalousie d’avant la Reconquista.
Développement du judaïsme rhénan
Bien des siècles plus tard, le judaïsme rhénan, qui doit sa survie aux tourmentes à l’habileté des juifs de cour, engendre quelques éclaireurs de la modernité : Meyer Amschel Rothschild à Francfort, Karl Marx à Trèves, Heinrich Heine à Düsseldorf et Jacques Offenbach à Cologne.
En 2021, les vestiges juifs de trois villes de la région, Worms, Spire et Mainz furent reconnus sur la liste du patrimoine universel de l’Unesco. Une première concernant le patrimoine culturel juif en Allemagne pour cette institution. Elles furent saluées pour leur rôle de berceau de la civilisation juive régionale mais aussi pour le travail interreligieux avec les communautés chrétiennes effectué par les communautés de ces villes.
La communauté juive de Mainz est la plus nombreuse de la région avec près de 1000 membres. Une nouvelle synagogue y a été d’ailleurs construite en 2010. Elle fut construite à l’emplacement d’une synagogue précédente, datant de 1912 et détruite pendant la Shoah.
Le rabbi Meir de Rothenbourg
Ce savant de la Torah, qui attirait dans sa yeshiva des étudiants venus de l’Europe entière, prêchait le retour à la terre des ancêtres pour fuir les persécutions dont les juifs étaient alors victimes.
Il se mit lui-même en route pour Jérusalem, mais fut arrêté en Lombardie par les troupes de l’empereur Rodolphe de Habsbourg qui ne voulait pas voir ses « protégés», et surtout contribuables, fuir vers l’Orient. Emprisonné de 1286 à sa mort, le rabbi Meir avait refusé que ses amis payent l’énorme rançon exigée pour sa libération. Ce n’est que quatorze ans plus tard que l’empereur consentit à remettre sa dépouille à sa communauté. Elle fut rachetée par Alexander Süsskind Wimpfen, un riche juif de Francfort, qui y sacrifia sa fortune à la seule condition de reposer, après sa mort, aux côtés du rabbi Meir.