Belgique

Liège

Synagogue de Liège ©flickr (Marc Delforge)

Liège est une ville connue comme Gand, pour sa grande population universitaire, mais aussi pour sa cathédrale, ses gaufres et ses cinéastes, les frères Dardenne.

La présence juive liégeoise semble dater du Moyen Age. Des documents du 11e siècle attestent d’un conflit religieux local entre un évêque et un médecin juif. Le cas d’un prêtre guéri par un médecin juif est mentionné en 1138. Mais au fil des siècles suivants, les principales mentions de présence juifs sont liées à des conversions locales au christianisme.

Ce n’est qu’à partir de la présence française au 18e siècle que la population juive s’y établit durablement. Ainsi, on recense 24 juifs en 1811, puis une vingtaine de familles juives à la fin de ce siècle, principalement originaires des Pays-Bas, du Limbourg hollandais, d’Allemagne et d’Alsace-Lorraine. La plus ancienne tombe située dans le cimetière juif date de cette époque. La reconnaissance formelle de la communauté juive de Liège n’a lieu qu’en 1876.

Une nouvelle Synagogue de Liège , marquant cette reconnaissance et évolution démographique, est conçue dans un mélange de styles par l’architecte Joseph Rémont, fut inaugurée en 1899. Située à proximité du Palais des Congrès, lassée aujourd’hui comme monument historique par la Région wallonne.

La population juive liégeoise augmente au début du 20e siècle suite à l’arrivée de migrants d’Europe de l’Est travaillant dans le bassin industriel très prospère de l’époque. Mais aussi d’étudiants belges et français attirés par la qualité de son Université et la vie liégeoise agréable. En 1914, la communauté, composée de Hollandais et d’Alsaciens, se voit renforcée par des juifs russes qui avaient été faits prisonniers par les Allemands. Certains d’entre eux s’installent à Liège dès 1917. La haute réputation internationale de l’Ecole des Mines attira de nombreux juifs d’Europe de l’Est entre les deux guerres.

A la veille de la Shoah, il y avait près de 3000 juifs liégeois. Près d’un tiers furent assassinés pendant la Shoah. A la Libération, il ne restait plus que 1200 juifs dans la ville. Des monuments de la synagogue commémorent les victimes de la Shoah et rend aussi hommage aux résistants.

Un chiffre qui déclina au fil du temps, atteignant 594 en 1959. Un sursaut permit à la communauté d’atteindre 1500 personnes en 1968, mais déclina à nouveau vers 1000 au début des années 1980. La synagogue sert depuis également de lieu de rencontres culturelles.

En raison de l’insalubrité et la vétusté des immeubles jouxtant Foyer culturel juif et d’un projet de construction, celui-ci est fermé temporairement depuis 2022.

Des petites communautés existèrent également dans les villes environnantes de Seraing et Spa. La première en raison des travailleurs du bassin industriel qui s’y établirent au début du 20e siècle et la seconde dans le cadre des séjours balnéaires de cette ville connue pour son eau.

Sources, Musée juif de Belgique, Consistoire, Encyclopaedia Judaica, Politique et Religion : le Consistoire Central de Belgique au XIXe siècle

Michel Kichka a dédié son plus bel album à son père, Henri Kichka, à ce témoignage si lourd à partager de la Shoah et à la (re)construction d’une famille juive de la région liégeoise. Ces dernières années, Henri Kichka était devenu un inlassable combattant pour le partage du témoignage de cette expérience auprès de nombreux lycéens belges.

Jguideeurope : Vous avez partagé votre histoire dans la bande dessinée Deuxième génération. Avec ses moments de bonheur et ses moments sombres liés à la guerre. Qu’est-ce qui motiva l’installation de votre famille à Seraing ?

Michel Kichka : Mon grand-père maternel s’y est installé avant la guerre, y a ouvert un commerce de confection, persuadé qu’il y avait de bonnes opportunités dans ce cœur économique de la Wallonie. Sa famille a pu se réfugier en Suisse sous l’Occupation, puis est retournée à Seraing après un crochet par Bruxelles. Mon père et ma mère ont tenu une boutique de fringues à Seraing de 1952 ou 53 jusqu’à 1986.

Quels furent les lieux importants qui, pour vos parents, puis pour vous, évoquaient la culture juive à Liège et dans la région ? 

Le Foyer juif de Liège (aujourd’hui on dirait Centre Communautaire) où la communauté se retrouvait pour des célébrations et pour des rencontres était un lieu important. La synagogue de Liège aussi, il n’y en avait qu’une. On y se célébrait les fêtes, mariages et les bar et bat mitsva mixtes. Et puis, le Ken (local) de l’Hachomer Hatzaïr, situé aux étages du Foyer.

La communauté était très homogène, majoritairement ashkénaze, composée de la génération de mes parents et grands-parents ayant survécu à la Shoah. La plupart des magasins de mode homme et femme étaient tenus par des familles juives en plein cœur de la ville qui, à l’époque de ma jeunesse, portait bien son nom : la Cité Ardente !

Que reste-t-il aujourd’hui de cette histoire ?

Un de mes amis d’enfance, Thierry Rozenblum, a publié un livre à ce sujet, Une cité si ardente : les Juifs de Liège sous l’Occupation (Editions Luc Pire, 2010). Il travaille en ce moment sur un second. Au fil du temps, la majorité des familles s’est installée à Bruxelles.

Michel Kichka, Deuxième génération : ce que je n’ai pas dit à mon père. Editions Dargaud, 2012.


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