Suisse

Süsskind von Trimberg portant un chapeau juif avec un dignitaire de la ville de Constance (XIVe siècle, bibliothèque de l'université d'Heidelberg)
Süsskind von Trimberg portant un chapeau juif avec un dignitaire de la ville de Constance (XIVe siècle, bibliothèque de l’université d’Heidelberg)

Des artisans et commerçants juifs s’installèrent dans les cités romaines de Suisse entre le IIIe et le IVe siècle, mais les premiers documents les mentionnant ne datent que du XIIIe siècle. Au cours des deux siècles suivants, les juifs furent régulièrement accusés de crimes rituels sur les enfants chrétiens ou d’empoisonnement des puits. Ils furent expulsés de toutes les villes entre 1384 et 1491. Quelques familles bénéficièrent toutefois de la tolérance des autorités locales. Ce n’est qu’au début du XIXe siècle que des communautés se constituèrent de nouveau, à l’initiative de juifs alsaciens. Les juifs de Suisse furent parmi les derniers en Europe à obtenir l’égalité politique, en 1866, sous la pression étrangère. En 1893, un vote populaire interdit l’abattage rituel en Suisse. Cette interdiction est toujours en vigueur aujourd’hui et la viande casher doit être importée.

L’attitude prétendument neutre de la Suisse pendant la Seconde Guerre mondiale a donné lieu, à partir de 1995, à un vaste débat : de nombreuses recherches historiques ont montré que le gouvernement suisse avait adopté une politique d’asile antisémite, en refoulant des milliers de réfugiés, en exigeant de l’Allemagne un tampon J sur les passeports de ses ressortissants juifs. Les banques suisses ont finalement admis avoir indûment conservé des comptes en déshérence appartenant à des victimes de la Shoah, tandis que les assurances étaient montrées du doigt pour non-paiement de primes aux ayants droit. Cette remise en question fondamentale de l’histoire suisse, jusque-là auréolée de mythes de neutralité, de résistance et d’engagement humanitaire, a donné lieu à une profonde vague d’antisémitisme, attisée par des déclarations de hauts responsables politiques et relayée dans les médias. La petite communauté juive (18000 personnes), habituée à la discrétion, s’est soudain trouvée en première ligne, prise en étau entre les revendications des organisations juives et l’attitude des institutions suisses. Il faudra plusieurs années de dialogue pour que l’antisémitisme diminue en Suisse.

Pourquoi je suis juif ?

Edmond Fleg, de son vrai nom Flegheimer, est un romancier, poète et penseur né à Genève en 1874. Jusqu’à sa mort, en 1963, il a été engagé pour la cause juive, dans le cadre des éclaireurs israélites de France, de l’Alliance israélite universelle et de l’amitié judéo-chrétienne.

« Je suis juif, parce qu’en tous lieux où pleure une souffrance, le juif pleure.
Je suis juif, parce qu’en tous temps où crie une désespérance, le juif espère.
Je suis juif, parce que la parole d’Israël est la plus ancienne et la plus nouvelle.
Je suis juif, parce que la promesse d’Israël est la promesse universelle. »

Texte de 1928, Paris, Rééd. Aux Belles Lettres, 1995.


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