France / Provence

Marseille

Grande synagogue de Marseille. Photo de Rvalette – Wikipedia

La présence juive marseillaise semble remonter au 6e siècle, attestée par Grégoire de Tours, mais datant probablement de l’Empire romain. Avec notamment la venue de juifs de Clermont-Ferrand ayant fui des persécutions. Comme dans de nombreuses villes françaises à l’époque, on retrouve au Moyen-Age une rue des juifs, ainsi que d’autres lieux indiquant leur présence.

Au 12e siècle, deux communautés marseillaises se développèrent. La première dans la parie basse de la ville, sous l’autorité du vicomte et la seconde dans les hauteurs sous la dominance du cardinal. Le voyageur Benjamin de Tudèle évoque ces communautés dans ses récits. Selon lui, des yeshivot poursuivaient leur enseignement dans la partie haute de la ville. La partie basse, proche du port, favorisa l’afflux de marchants, bien que les juifs travaillent peu dans les secteurs maritimes. Bien qu’obtenant le statut de citoyens en 1257, les juifs de Marseille furent soumis à des restrictions conséquentes.

Escalier menant à l’arche sainte. Photo de Efraim69 – Wikipedia

Au 14e siècle, les deux communautés s’unifièrent, tandis que les restrictions s’assouplirent. Il y avait alors trois synagogues et un mikveh. En 1484-1485, le quartier juif fut attaqué. Pillages et meurtres provoquèrent la fuite de nombreux d’entre eux.

Une émigration limitée par l’apaisement organisé par la municipalité l’an suivant ainsi que, quelques années plus tard, par l’arrivée de juifs d’Espagne suite à l’Inquisition. Néanmoins, un avis d’expulsion de la Provence fut décrété en 1500-1501, accompagné d’une vague conséquente de conversions.

Le 18e siècle vu l’arrivée d’autres familles juives et l’établissement d’une nouvelle communauté. Une petite synagogue ainsi qu’un cimetière juif virent le jour. Si la communauté ne compta que 450 membres en 1808, elle évolué rapidement : 1000 en 1821 et 2500 en 1865.

Une école juive fut créée ainsi que la  Grande synagogue, rue Breteuil, toujours en activité. Construite à partir des plans de Nathan Salomon en 1860 et inaugurée le 22 septembre 1864, elle est même devenue la synagogue principale. Lieu d’études, elle accueille aussi de nombreuses festivités.

Vue du second étage de la Grande synagogue. Photo de Efraim69 – Wikipedia

Pendant la Shoah, après l’invasion de la Zone libre, la traque des juifs fut intense, menant à des arrestations et déportations, et la mise à sac de la synagogue.

Suite à la Libération, Marseille compta entre 5 et 10 000 juifs, principalement originaires de Provence, d’Alsace et d’Afrique du Nord. Ces derniers vinrent en plus grand nombre suite à la décolonisation et participèrent à la reconstruction et au développement de la communauté. Ainsi en 1969, 65000 juifs vivaient à Marseille.

Albert Cohen dédie de nombreuses pages à la ville qui l’accueillit enfant dans Mangeclous, Le Livre de ma mère et O vous frères humains, qu’il s’agisse de son glorieux personnage Scipion, des moments de douceur sur la Canebière mais aussi de sa première confrontation avec l’antisémitisme.

Rencontre avec Xavier Nataf, créateur à Marseille du 1er Festival du cinéma israélien, lequel a rendu hommage du 22 au 28 juin 2022 à l’immense actrice Ronit Elkabetz.

 

Vous êtes impliqué depuis longtemps dans le rayonnement de la culture juive marseillaise, comment percevez-vous l’évolution de l’intérêt du public ?

Je crois qu’on peut dire qu’il y a eu une évolution ; il y a plusieurs décennies la culture juive étonnait, intéressait, avait certainement quelque chose d’étrange pour le plus grand nombre. Aujourd’hui, il me semble que c’est une culture qui, comme les autres, fait partie du paysage marseillais. Bien entendu, je parle bien des aspects culturels spécifiques ; je ne parle pas de la communauté et des juifs qui eux font partie intégrante de la grande communauté marseillaise depuis toujours ou presque.

 

Quel lieu lié au patrimoine culturel juif marseillais mériterait d’être mis plus connu ?

Bien sûr, la grande synagogue est un endroit tout à fait remarquable à découvrir mais pour être honnête, moi j’ai une affection particulière sur le vieux cimetière juif de Saint-Pierre. On y voit une histoire des juifs de Marseille depuis des siècles.

 

Xavier Nataf

Vous avez créé le premier festival du Film israélien en France. Cette année, vous avez mis Ronit Elkabetz à l’honneur en projetant Cahiers Noirs. Qu’est-ce qui vous a le plus marqué chez elle ?

J’ai eu la chance d’être contemporain de son ascension en tant qu’actrice et réalisatrice. Elle a fait partie des tous premiers invités du festival et nous l’avons accompagné jusqu’à la fin. Le plus frappant quand on la connaissait un peu c’était l’incroyable mélange de force et de fragilité. Elle avait une hypersensibilité qui était assez fascinante.

 

Depuis deux ans, vous animez le podcast Nonobstant, consacré à la culture pop juive. Quelle découverte récente dans ce domaine vous a particulièrement étonné ?

Avec ce podcast j’essaye de partager mes passions pour le cinéma, les séries, la bande dessinée… chaque semaine en cinq minutes chrono, je témoigne de la richesse de la production dans le domaine de l’identité juive… dans le domaine de la bande dessinée, je dois dire que la BD de Jean Dytar # j’accuse m’a carrément scotché. Dans les grosses claques au cinéma, j’ai adoré le film italien de Gabriele Mainetti, Freaks Out.

Pour en savoir plus sur le Festival du cinéma israélien : https://www.festival-rci.com/